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Virginie Despentes & Philippe Poutou : Ping-pong théories

Vir­ginie Despentes et Philippe Poutou ne s’étaient jamais ren­con­trés. Pour­tant, entre l’icône fémin­iste et le can­di­dat à la prési­den­tielle 2022 du Nou­veau Par­ti ant­i­cap­i­tal­iste (NPA), les sujets à partager sont nom­breux : jeunesse mil­i­tante, con­cep­tion de la mas­culin­ité, rap­port aux médias, vio­lence poli­tique, révolte sociale, #MeToo… Entre­tien croisé entre deux utopistes pleine­ment engagé·es dans les com­bats de notre époque.
Publié le 29/06/2023

Modifié le 24/04/2025

Philippe Poutou et Virginie Despentes lors de la rencontre de La Déferlante 8 - Rire
Léa Crespi

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°8 Jouer, de mai 2023. La Défer­lante est une revue trimestrielle indépen­dante con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société.
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Vir­ginie Despentes, c’est vous qui avez voulu ren­con­tr­er Philippe Poutou. Pourquoi ?

Vir­ginie Despentes Parce que pen­dant toute la séquence prési­den­tielle cette année, c’était vrai­ment impor­tant de te voir dans l’espace médi­a­tique. Et pas unique­ment pour moi.

Ta can­di­da­ture était impor­tante pour plein de gens. C’était comme une res­pi­ra­tion. En France, il y a une dépres­sion col­lec­tive qui s’incarne dans le vote d’extrême droite et dans la poli­tique libérale qui est menée. Et, dans cette dépres­sion, la présence du NPA était vitale.Et vous, Philippe Poutou, pourquoi avez-vous accep­té cette invi­ta­tion ?Philippe Poutou L’idée de cet entre­tien me plai­sait, mais lorsque je reçois ce genre de sol­lic­i­ta­tion, je demande d’abord l’avis de mes cama­rades, parce que je ne suis que le porte-parole d’une organ­i­sa­tion. Et là, on m’a répon­du : « Mais évidem­ment qu’il faut la faire, cette ren­con­tre ! » Pour être franc, je te con­nais­sais très peu, Vir­ginie. Ce que je con­nais­sais de toi, en réal­ité, c’est le texte que tu avais écrit après la céré­monie des César en 2020 « Désor­mais on se lève et on se bar­re¹ ». Je l’avais trou­vé super fort, très poli­tique, et l’avais partagé sur Face­book. Et depuis, quand même, j’ai lu King Kong théorie parce que je savais que j’allais te ren­con­tr­er.

« Un des bons côtés quand on a passé les 50 ans, c’est qu’on n’at­tend plus grand-chose de nous. C’est un peu comme les les­bi­ennes, tu fais comme tu veux parce que de toute façon tu ne devrais même pas exis­ter. »

Vir­ginie Despentes


Vir­ginie Despentes, en pré­parant cet entre­tien, vous nous avez dit : « Ce qui m’intéresse chez Philippe Poutou, c’est sa mas­culin­ité. » Philippe, avez-vous déjà réfléchi à la mas­culin­ité que vous incar­nez ?

Philippe Poutou Je vais dire non… [rires]… Franche­ment… Quel sens vous met­tez sous le mot « mas­culin­ité », en fait ?

Vir­ginie Despentes Le sens, c’est que par­mi les hommes poli­tiques tu incar­nes quelque chose de dif­férent. Quand on t’agresse sur les plateaux télé, tu ne bouges pas, tu es vache­ment doux. Tu n’incarnes pas une mas­culin­ité arro­gante ou de bourge, que ce soit dans ta manière de t’habiller ou dans ta façon de par­ler. On est très loin de Mélen­chon, de cette mas­culin­ité patri­ar­cale, dom­i­nante, clas­sique. Et puis, il y a aus­si autre chose qui m’intéresse, je ne veux pas être blessante du tout, mais sou­vent dans les médias, tu es telle­ment mal­traité, que tu te retrou­ves dans une posi­tion que nous, les filles, on con­naît bien : tu as beau dire des choses impec­ca­bles, tout le monde s’en fout. Mais ce qui est génial, c’est que tu ne te laiss­es pas démon­ter : ça se passe à un autre niveau que l’agressivité mas­cu­line tra­di­tion­nelle telle qu’on la con­naît, notam­ment en poli­tique, notam­ment en France.

Philippe Poutou C’est vrai que je ne suis pas pris au sérieux. J’ai le sen­ti­ment que ce que je dis, ça ne compte pas. L’interview dans les médias, c’est physique. On est piégé, on ren­tre dans un truc où on ne maîtrise plus grand-chose.

Vir­ginie Despentes Hé ! tu te démerdes vache­ment bien. La pre­mière fois que je t’ai vu, c’était chez Ruquier, il y a une dizaine d’années, c’était une émis­sion qui était d’une vio­lence extra­or­di­naire, et tu t’en étais super bien démerdé [lire l’encadré page 14].

Philippe Poutou C’est dif­fi­cile de savoir com­ment réa­gir quand, comme moi, on ne maîtrise pas cet exer­ci­ce. Mais juste­ment, après ce pre­mier pas­sage chez Ruquier, on m’avait beau­coup reproché de ne pas avoir ouvert ma gueule, de ne pas avoir quit­té le plateau, par exem­ple.

La députée écol­o­giste San­drine Rousseau a été traitée de manière sim­i­laire pen­dant la cam­pagne prési­den­tielle et a dénon­cé la misog­y­nie dont elle a été l’objet. À votre avis, qu’est-ce qui fait que cer­tains médias en arrivent à traiter des invité·es de cette manière ?

Vir­ginie Despentes Depuis une trentaine d’années, les représen­tants de la gauche rad­i­cale sont rarement invités sur les plateaux de télévi­sion. Pour fréquenter depuis longtemps les milieux parisiens ultra priv­ilégiés, je peux dire que, dans leur esprit, cette gauche rad­i­cale, elle est foutue depuis longtemps, elle n’existe pas. Ça fait longtemps que les médias se font le relais d’une pen­sée ou d’une lec­ture de la réal­ité qui fait du sys­tème ultra­l­ibéral le seul sys­tème pos­si­ble. Et ça n’est pas pro­pre qu’à la France : partout dans le monde, on s’est lais­sé con­va­in­cre de cela. Mais je crois que cette élite est en train de com­pren­dre que le sort de l’extrême gauche n’est peut-être pas si réglé que ça, et que le Rassem­ble­ment nation­al ne sera pas pour tou­jours la seule voix pop­u­laire. C’est au niveau de nos imag­i­naires qu’il faut tra­vailler. On n’est plus capa­ble d’imaginer des réc­its dans le futur qui ne soient pas des dystopies atro­ces. Et ça, ça fait cinquante ans que ça dure. Quand on imag­ine un futur, le libéral­isme est tou­jours ultra gag­nant, l’État polici­er ultra gag­nant. Ce qui m’intéresse, c’est de récupér­er cette pos­si­bil­ité d’imaginer les choses dif­férem­ment.

Philippe Poutou Le monde est hyper vio­lent, mais la vio­lence, ce n’est pas juste bom­barder un peu­ple. Ça s’incarne aus­si dans la manière dont on s’adresse aux gens. Chez les Léa Salamé et Lau­rent Ruquier, on dirait que tout est per­mis : ils peu­vent rigol­er, dén­i­gr­er ce que racon­te une femme poli­tique comme San­drine Rousseau, ou d’autres invités. C’est une vraie vio­lence de la société. De toute façon, les médias, c’est quoi ? C’est l’exercice du pou­voir des dom­i­nants.

Vir­ginie Despentes, sur la ques­tion des mas­culin­ités, vous avez écrit dans King Kong théorie : « Tout ce que j’aime de la vie, tout ce qui m’a sauvée, je le dois à ma viril­ité. » Ça con­siste en quoi, la viril­ité chez une femme ?

Vir­ginie Despentes Je me pose de moins en moins la ques­tion de ce qui est féminin ou mas­culin chez moi. Mais, à l’époque où j’ai écrit King Kong théorie, oui, ça me sem­blait évi­dent. En tant que femme, j’ai passé mon temps à décevoir et ça a été prob­a­ble­ment la meilleure idée que j’ai eue. Et j’imagine que c’est ça qui est vir­il : ne pas être servi­able, ne pas être spé­ciale­ment aimable, ne pas être très attirée par la sphère domes­tique, ne pas avoir fait d’enfant, enfin tout ce qu’on attend d’une femme. Un des bons côtés quand on a passé les 50 ans, c’est qu’on n’attend plus grand-chose de nous. On est cen­sées car­ré­ment pas être là. C’est un peu comme les les­bi­ennes, il y a un côté où, bon… ben, là tu fais comme tu veux parce que de toute façon tu ne devrais même pas exis­ter.

Dans ce pas­sage, vous par­lez aus­si de votre attrait pour l’argent et pour le pou­voir. Est-ce que c’est com­pat­i­ble avec ce que vous défend­ez poli­tique­ment ?

Vir­ginie Despentes Ah qu’est-ce que j’aime l’argent ! Franche­ment, je le souhaite à tout le monde : plein d’argent gag­né sans rien foutre. Et c’est pareil pour le pou­voir. C’est vrai­ment une posi­tion idéale dans la vie. Surtout quand on est une fille. Quand tu es une femme, tu es cen­sée avoir de la pudeur par rap­port à l’argent et pas aimer l’argent. Je souhaite à tout le monde une douche d’argent et je pense que ça réglerait un tas de prob­lèmes.

Philippe Poutou L’argent, c’est la lib­erté de faire ce qu’on veut. L’émancipation, ça passe par ça aus­si. Donc OK pour l’argent, mais pas quand il per­met d’exercer du pou­voir sur les autres. L’argent pour vivre sa vie et envoy­er bouler les autres, oui. Toi, dans King Kong théorie, tu dis que t’aimerais être un homme dans le sens où tu as envie de gueuler, de dire merde, d’envoyer bouler tout ça et exprimer une révolte brute. C’est comme ça qu’on ren­verse le monde.

La ques­tion de la vio­lence défen­sive face aux oppres­sions, de classe ou de genre, est cen­trale dans vos réflex­ions, chez l’un·e comme chez l’autre. Dans la société française actuelle, quand le recours à la vio­lence est-il légitime, selon vous ?

Vir­ginie Despentes Ce qui m’interroge, ce n’est pas tant la légitim­ité de la vio­lence que son effi­cac­ité. Je ne con­damne pas la vio­lence, mais je remar­que à quel point elle peut être utile pour le pou­voir en place. En Espagne, ETA a per­mis aux gou­verne­ments espag­nols suc­ces­sifs d’instaurer des lois lib­er­ti­cides et répres­sives. En France, la vio­lence per­met de jus­ti­fi­er la mise en place de lois sur le séparatisme qui ne sont pas dis­cutées, alors même qu’elles sont sans précé­dent. Quand le pou­voir est extrême­ment vio­lent, pour y répon­dre et que ce soit payant, il faut vrai­ment que tu sois ultra vio­lent, ultra armé. J’ai été une femme jeune et vio­lente, j’ai vrai­ment com­pris dans mon corps ce qu’était l’envie de vio­lence. Mais je sais que la vio­lence reste le lan­gage du pou­voir.

Philippe Poutou Dans mon par­ti, je suis le pre­mier à jus­ti­fi­er la vio­lence de la révolte. Même quand elle vient des black blocs. Mais c’est vrai que ça pose immé­di­ate­ment la ques­tion de l’efficacité. Les blacks blocs, mal­heureuse­ment, ça per­met à Dar­manin, le min­istre de l’Intérieur, de jus­ti­fi­er la répres­sion. Je pense que le monde ne chang­era que si une forme de vio­lence s’exerce. Puisqu’il faut que le dom­i­nant ou le pos­sé­dant ait peur. S’il n’a pas peur, com­ment on frag­ilise le pou­voir ?

Vir­ginie Despentes On doit pou­voir désta­bilis­er un sys­tème autrement que dans la vio­lence. Moi, ça m’a vache­ment frap­pée quand même, le con­fine­ment, on a vu que, si on voulait, on pou­vait décider d’arrêter d’aller boss­er. J’entends par­ler de ces démis­sions en masse aux États-Unis. Je vois qu’en Espagne ils ont du mal à trou­ver des gens pour boss­er la nuit. Ce n’est pas impos­si­ble qu’à l’échelle mon­di­ale les jeunes qui, aujourd’hui, ont 17 ou 18 ans, se dis­ent un jour : on ne va plus boss­er ni acheter, vous nous cassez trop les couilles.

Philippe Poutou C’est ce qu’on appelle la désobéis­sance civile. C’est sûr que c’est un out­il effi­cace.

Vir­ginie Despentes Dès que c’est col­lec­tif, il y a moyen de faire dis­rup­tion. Mais pour que ça marche, il faut que tout le monde par­ticipe.


« Est-ce que les hommes ne pour­raient pas s’asseoir et se deman­der col­lec­tive­ment com­ment avoir une sex­u­al­ité moins glauque, moins bru­tale, moins meur­trière ? »

Vir­ginie Despente


Philippe Poutou La vio­lence est par­fois un out­il de faib­lesse. Elle est utile quand on est une minorité, mais si on est des mil­lions ou des dizaines de mil­lions, on n’a pas besoin de la vio­lence. Cer­tains pensent qu’être vio­lent, c’est être rad­i­cal, mais il existe des com­bats qui ne sont pas vio­lents tout en étant très rad­i­caux, et qui remet­tent en ques­tion le sys­tème. Les luttes fémin­istes, par exem­ple.

Vir­ginie Despentes Oui, les luttes LGBT ont été vrai­ment paci­fiques pour le coup. L’action la plus vio­lente qui ait été menée, ça a été de jeter du faux sang sur des murs². Et ça a changé la donne. En Amérique latine, il y a toute une réflex­ion autour de la dette. Si t’es une seule per­son­ne qui doit de l’argent à une banque, c’est la banque le chef, mais si tu représentes 300 mil­lions de per­son­nes qui doivent de l’argent, c’est toi le chef. Parce que si tu décides, en tant que syn­di­cat d’endettés, d’arrêter de pay­er, il va fal­loir que la banque dis­cute avec toi pour trou­ver une solu­tion. Et ça, c’est des trucs très rad­i­caux qui sont devenus presque inimag­in­ables dans nos têtes, comme annuler des dettes ou jouer le bras de fer avec la banque par exem­ple ou avec le monde de la finance, en se col­lec­tivisant. Ça, ce n’est pas de la vio­lence, c’est de la jus­tice.

Vir­ginie Despentes, vous êtes une des pre­mières femmes con­nues à avoir par­lé publique­ment de votre viol. De nom­breuses fémin­istes se deman­dent aujourd’hui com­ment faire pour que les hommes cessent de vio­l­er. Qu’en dites-vous ?

Vir­ginie Despentes J’ai des élé­ments, mais la réponse va être longue… ! Si les petites filles en mater­nelle appre­naient à se bat­tre de façon vrai­ment vigoureuse, je crois qu’il y aurait moins de vio­ls. En dehors de ça, sor­tir col­lec­tive­ment de l’hétérosexualité me sem­ble être une bonne piste pour pro­téger les femmes. Il faudrait qua­si­ment inter­dire l’hétérosexualité ! Mais le prob­lème du viol réside aus­si dans le fait qu’on ne par­le jamais aux garçons de leur sex­u­al­ité. Avec #MeToo, beau­coup d’hommes de ma généra­tion ont été totale­ment déphasés, parce que per­son­ne ne leur a jamais expliqué quoi que ce soit sur leur sex­u­al­ité. Il y a beau­coup de mecs qui vio­lent sans même être capa­bles de met­tre un nom sur ce qu’ils vien­nent de faire. Mal­gré cela, je trou­ve qu’une nou­velle généra­tion de jeunes garçons vrai­ment dif­férents est en train d’émerger. Est-ce que les hommes ne pour­raient pas s’asseoir et se deman­der col­lec­tive­ment com­ment avoir une sex­u­al­ité moins glauque, moins bru­tale, moins meur­trière ? Pourquoi ça les dérange autant que les femmes puis­sent avoir une sex­u­al­ité épanouie, alors que c’est une don­née néces­saire à leur sex­u­al­ité hétéro­sex­uelle ?


Cer­tains pensent qu’être vio­lent, c’est être rad­i­cal, mais il existe des com­bats qui ne sont pas vio­lents tout en étant très rad­i­caux, et qui remet­tent en ques­tion le sys­tème. Les luttes fémin­istes par exem­ple. »

Philippe Poutou


Quel peut être le rôle de la jus­tice pour que les hommes arrê­tent de vio­l­er ?

Philippe Poutou Il faut que la jus­tice soit beau­coup plus sévère, mais on sait que ça ne résoudra pas tout. La jus­tice fait peur, elle peut aider à lim­iter la vio­lence. Elle rend aus­si légitime une défense, en sanc­tion­nant l’oppresseur. Mais la ques­tion de l’éducation est cen­trale. Et plus glob­ale­ment, la ques­tion des rap­ports d’oppression, des rap­ports de pro­priété. Puisque la pro­priété aide à domin­er et à opprimer.

Vir­ginie Despentes Et d’ailleurs, il y a quelque chose que je voudrais ajouter, je ne fais pas de sépa­ra­tion entre la sex­u­al­ité hétéro­sex­uelle des mecs et le sys­tème ultra­l­ibéral. Dans les deux cas, il s’agit de retir­er tout pou­voir ou de silenci­er com­plète­ment l’autre, sans s’interroger sur la con­séquence de cette action, c’est-à-dire de refuser de recon­naître l’autre comme quelqu’un.

Mais en France, 70 % des plaintes pour vio­lences sex­uelles sont classées sans suite.

Vir­ginie Despentes #MeToo a été une vraie révo­lu­tion dans les esprits, mais dans la plu­part des pays, ça n’a pas fait bouger la jus­tice. Peut-être que les policiers, par­fois, sont mieux for­més pour pren­dre les plaintes, ce qui déjà est très impor­tant. Mais dans les cours de jus­tice, il y a eu très peu d’évolution. De toute façon, #MeToo, c’est un peu comme le Covid, t’as l’impression que les gens atten­dent que ça passe pour recom­mencer comme avant. Je pense que c’est super impor­tant de porter plainte si tu sens que ça va te faire du bien pour te recon­stru­ire. Autour de moi, par exem­ple, pour les gens qui ont été vic­times d’inceste ou de pédophilie, le fait qu’une autorité entende ce qu’ils et elles ont à dire est une étape vers la recon­struc­tion. Le prob­lème c’est que la réponse de la jus­tice est qua­si sys­té­ma­tique­ment la prison. Or, ça n’est jamais une réponse adéquate con­tre le viol : tu vois très peu de mecs sor­tir de prison en dis­ant : « Ça va beau­coup mieux, là j’ai com­pris un truc sur ma respon­s­abil­ité, le mal que j’ai fait, je ne recom­mencerai jamais. » En prison, ils ramassent telle­ment qu’ils devi­en­nent eux-mêmes des vic­times et qu’ils vont ensuite encore plus cass­er les couilles à tout le monde en sor­tant. L’enfermement, c’est prob­a­ble­ment une des plus belles usines à vio­leurs qu’on con­naisse.

Philippe Poutou Pour­tant, pour pro­téger les vic­times, t’es obligé d’enfermer les gens qui sont dan­gereux. À Méri­gnac, il y a eu l’histoire de Chahinez³, cette femme qui a été brûlée vive par son mari qui venait tout juste de sor­tir de prison, alors que per­son­ne n’était au courant qu’il était sor­ti. Dans ces cas-là, com­ment fait-on pour pro­téger les vic­times ? Mais c’est vrai que ça ques­tionne : le mec, il a fait de la prison, il ressort et il tue sa femme…

Vir­ginie Despentes Oui, il faut trou­ver autre chose.

Philippe Poutou Quand Damien Abad⁴ est réélu avec 57 % des voix [aux lég­isla­tives, alors qu’il est accusé de viol], quand Gérald Dar­manin reste min­istre de l’Intérieur [alors qu’il est accusé de viol], on se dit putain, en fait, ils s’en foutent de #MeToo. C’est que Macron et d’autres assu­ment ce genre de choses. Aujourd’hui, quand un homme est accusé de vio­lences sex­uelles, on devrait croire la parole des femmes et dire [au coupable] : allez, fini, tu t’en vas. Le fait qu’ils restent en place mon­tre que le rap­port de force est encore en leur faveur.

Vir­ginie Despentes, dans une inter­view il y a trois ans, vous disiez être « en colère con­tre les hommes ». C’est tou­jours le cas ?

Vir­ginie Despentes Les mecs n’ont pas beau­coup bougé depuis le début de #MeToo il y a cinq ans. Ou plutôt, ils ont bougé dans le sens de la sol­i­dar­ité mas­cu­line, en se défen­dant les uns les autres. Ça ne me sur­prend pas… Désolée, je ne veux pas te met­tre mal à l’aise, Philippe, mais #MeToo, c’est nous, les femmes, que ça con­cerne. C’est la pos­si­bil­ité de racon­ter notre his­toire entre nous. Et d’apprendre à s’écouter les unes les autres. Les hommes de ma généra­tion, je vois bien, ils n’ont pas enten­du. Je ne suis pas en colère con­tre eux, mais j’aurais préféré qu’ils écoutent un peu plus atten­tive­ment et qu’il se posent des ques­tions.
Ce qui me sur­prend, c’est qu’ils se soient aus­si peu exprimés en tant que vic­times. Je vois beau­coup de mecs qui com­men­cent à racon­ter leurs his­toires d’abus sex­uels quand ils étaient petits garçons ou jeunes ado­les­cents. Il faudrait qu’on se rende compte que les corps des garçons et les corps des ado­les­cents ne sont pas des corps d’hommes, ils sont presque comme des corps de femmes dans l’espace pub­lic. Les mecs de 20 ans aujourd’hui, quel que soit leur milieu, se sen­tent davan­tage con­cernés, ils sont capa­bles de con­sid­ér­er les femmes comme des per­son­nes à part entière, de penser que le fémin­isme, c’est aus­si impor­tant que l’antiracisme et que la lutte des class­es. Ils ont cessé de penser que les femmes étaient unique­ment des hôt­esses d’accueil. Sincère­ment, je ne pen­sais pas voir ça dans ma vie.

Philippe Poutou Moi, à la mai­son j’ai deux ados de 16 et 19 ans qui ont deux amis en train de faire leur tran­si­tion de genre et pour eux, c’est nor­mal. Nous, les vieux, même si on est ouverts, on a du mal à saisir ces ter­mes de « binaire », « non binaire », et on se fait repren­dre quand on utilise le pronom « il » alors qu’en fait c’est « elle ». Ces change­ments s’opèrent en pro­fondeur et c’est ras­sur­ant.

Les ques­tions de genre ont longtemps été absentes des mobil­i­sa­tions de l’extrême gauche. Les choses ont-elles évolué ?

Philippe Poutou Au NPA, on fonc­tionne avec des com­mis­sions dont une est spé­cial­isée sur ces ques­tions. Les cama­rades qui s’y trou­vent sont par­fois entrés chez nous dans le but de pouss­er ces sujets au sein du par­ti et de le bous­culer de l’intérieur. Ce sont elles et eux qui nous ont sensibilisé·es à ces ques­tions-là. On est un petit par­ti, donc c’est sans doute plus facile de chang­er des choses en interne. Et c’est néces­saire parce que les com­porte­ments machistes de dom­i­na­tion exis­tent, y com­pris chez les ant­i­cap­i­tal­istes.

Com­ment fonc­tion­nez-vous au sein du NPA quand il y a des accu­sa­tions de vio­lences sex­uelles ?

Philippe Poutou Nos statuts prévoient l’exclusion en cas de vio­lences sex­istes et sex­uelles. Dans un pre­mier temps, une com­mis­sion de médi­a­tion inter­vient, sus­pend les man­dats de la per­son­ne accusée et après enquête, une déci­sion est ren­due : en général, c’est l’exclusion. On a récem­ment eu un cama­rade qui a été accusé par sa com­pagne, elle aus­si mil­i­tante, d’agression : ça a mis quelques jours mais il a été débar­qué. Ce qui est ter­ri­ble, c’est que la plu­part des cama­rades, trou­vent tou­jours des excus­es à ces com­porte­ments et ten­tent de retarder la sanc­tion. On peut com­pren­dre que, quand on est proche de quelqu’un, il soit dif­fi­cile d’admettre qu’il a été vio­lent. Peut-être que si j’avais un pote qui était dans cette sit­u­a­tion j’aurais du mal à l’admettre. C’est très com­pliqué et ça mon­tre quand même l’énormité du chemin à par­courir dans les milieux mil­i­tants.

Philippe Poutou, dès 2012, dans un livre pro­gram­ma­tique sor­ti juste avant la prési­den­tielle, vous vous dites fémin­iste. Com­ment s’est opérée votre prise de con­science ?

Philippe Poutou Alors là j’en sais rien ! Quand j’étais ado, j’étais fan de Bron­s­ki Beat⁵, le groupe de Jim­my Som­merville. Je ne sais pas si tu te rap­pelles, Vir­ginie, mais quand tu ouvrais la pochette de leur album de 1984, tu trou­vais le tri­an­gle rose [en référence aux homo­sex­uels déportés pen­dant la guerre]. Donc, en tant que jeune mec, j’ai été sen­si­bil­isé aux luttes LGBT+. À l’époque, c’était une manière de dire merde à tout un monde. À la CGT, chez Ford, on me dis­ait : « T’es un curé, toi ! », parce que j’essayais d’expliquer à mes cama­rades l’importance de ces com­bats minori­taires. Après, on peut tou­jours se dire fémin­iste, on ne l’est jamais assez. Le plus com­pliqué, c’est les tâch­es domes­tiques : on a quand même moins le réflexe en tant que mecs de s’occuper du linge ou des autres tâch­es de la vie quo­ti­di­enne, je le vois dans ma vie per­son­nelle.

Vous ne faites pas la vais­selle chez vous ?

Philippe Poutou Si, c’est moi qui fais tout le temps la vais­selle ! Mais ça ne règle pas tous les prob­lèmes.

Vous venez l’un et l’autre de milieux mod­estes et plutôt engagés. Qu’avez-vous fait de cet héritage ?

Philippe Poutou Mon père était posti­er. Il a démar­ré à 14 ans comme télé­graphiste à vélo, à Bor­deaux. Et ensuite, après avoir passé des con­cours internes, il a fini sa car­rière comme receveur dans un bureau de poste.

Vir­ginie Despentes Pareil ! Papa était télé­graphiste, mais lui, il voy­ageait dans les trains de nuit.

Philippe Poutou Ma mère a arrêté ses études en troisième. Elle était dacty­lo dans l’administration. Et puis, de manière clas­sique, elle a arrêté de boss­er pour s’occuper de ses qua­tre enfants. Mes par­ents n’étaient pas mil­i­tants, mais ils étaient de gauche et très con­tents quand Mit­ter­rand a gag­né en 1981. Je les revois le soir de son élec­tion, lever les bras au ciel comme au stade quand un but vient d’être mar­qué. Quand j’ai com­mencé à militer à 18 ans [dans les mou­ve­ments anar­chistes], je m’engueulais avec mes par­ents… À l’époque je les voy­ais comme des cons qui ne font rien, qui ne mili­tent pas. Quand tu as 18 ans, tu pens­es que tu as tout com­pris, mais t’es con comme la lune. Ils votaient Arlette Laguiller en plus ! Il y avait pire quand même au niveau con­science poli­tique ! Et puis mon père avait fait grève en 1968, puis les grandes grèves de la Poste dans les années 1970. For­cé­ment, ils ont dû m’influencer. Si je milite, c’est grâce à eux. Je suis très fier d’eux, mais je ne le dis jamais.

Vir­ginie Despentes Moi, mes par­ents étaient super jeunes quand ils m’ont eue. J’ai sou­venir que, dans ma famille, la poli­tique était vache­ment impor­tante. C’étaient les années 1970, la péri­ode juste­ment des grandes grèves de la Poste. C’était très joyeux, très vivant, c’était quelque chose qui rendait heureux, parce que ces luttes ont été très sou­vent vic­to­rieuses. Il y aurait beau­coup de choses à dire sur la France des années 1970 et 1980. Le ser­vice pub­lic à l’époque, ça mar­chait pas si mal que ça. Quand je vois le par­cours qu’a eu mon père, qui a mon­té les éch­e­lons, en pas­sant des con­cours, ou celui de ma mère qui était très impliquée dans son syn­di­cat. C’était quand même quelque chose ! Je les voy­ais heureux dans leur tra­vail. Chez nous, il y avait vrai­ment ce ques­tion­nement : qu’est-ce que c’est qu’un ser­vice pub­lic ? Et c’était un truc dont on dis­cu­tait dans ma famille… Aujourd’hui, je peux pas aller dans un bureau de poste sans avoir une demi-heure de down. Ça me dés­espère de voir ce que cette boîte est dev­enue.

Philippe Poutou Mon père était fier d’être posti­er, fier d’être agent du ser­vice pub­lic. Être posti­er, c’était avoir des con­vic­tions, une voca­tion, un peu comme les per­son­nels soignants aujourd’hui. Mes par­ents n’étaient pas mil­i­tants, mais en étant de gauche, ils fai­saient quand même par­tie de ce monde-là. Je me rap­pelle que, quand j’étais gamin, mes par­ents étaient adhérents à la Fédéra­tion Cornec, l’ancêtre de la FCPE [Fédéra­tion des con­seils de par­ents d’élèves] : on allait aux ker­mess­es avec des com­mu­nistes ou des social­istes. C’était aus­si très lié au fait de tra­vailler dans le ser­vice pub­lic. C’était il y a cinquante ans à peine, mais tout s’est écroulé. Et il faut recon­stru­ire, car la mis­ère, aujourd’hui, elle provient aus­si du fait qu’il n’y a plus de ser­vice pub­lic.


« En tant que jeune mec, j’ai été sen­si­bil­isé aux luttes LGBT+. À ka CGT chez Ford, on me dis­ait : ” T’es un curé, toi “, parce que j’es­sayais d’ex­pli­quer à mes cama­rades l’im­por­tance de ces com­bats minori­taires. Après, on peut tou­jours se dire fémin­iste, on ne l’est jamais assez. »

Philippe Poutou


Dans ce con­texte économique de crise, et dans un con­texte poli­tique où infusent les dis­cours racistes, islam­o­phobes et misog­y­nes, est-ce que vous pou­vez nous don­ner des raisons d’espérer ?

Vir­ginie Despentes On va les trou­ver, attends… On va trou­ver, on va trou­ver… Eh bien déjà la per­spec­tive de Philippe Poutou prési­dent dans cinq ans est quand même plutôt agréable ! Ce qui est sûr, c’est que ce sys­tème ultra­l­ibéral est prob­a­ble­ment en bout de course. On n’a aucune idée de ce qui va se pro­duire dans les dix années à venir et ça dépend énor­mé­ment de com­ment on se com­porte, les uns les autres et de ce qu’on est capa­bles d’imaginer. C’est pour ça que je crois vache­ment aux jeunes. Moi, je vois bien, à 53 ans, on finit par réfléchir tou­jours un peu de la même manière, on a pris beau­coup de coups, donc on a un peu peur de tout ren­vers­er.

Philippe Poutou Il n’y a aucune rai­son d’abandonner tout espoir, car effec­tive­ment rien n’est écrit d’avance. Quand on milite, il y a des matins où les mau­vais­es nou­velles s’accumulent et où on se dit : « Putain, on n’y arrivera pas. » Mais en réal­ité, la ques­tion, c’est : « Est-ce qu’on y croit, est-ce qu’on n’y croit pas ? » Dans les meet­ings du NPA, je vois plein de jeunes. Et il y a des belles choses qui se passent : on par­lait du mou­ve­ment #MeToo, les colleuses, etc. Dans l’agriculture, il y a des paysans et des paysannes qui se bat­tent con­tre la machin­i­sa­tion infer­nale. Il y a des résis­tances partout.

Vir­ginie Despentes Oui, et puis tu dis­ais un truc qui était super posi­tif, c’est qu’aux meet­ings NPA il y a plein de gamins. Ça pour­rait ne pas être le cas, il pour­rait y avoir 500 per­son­nes qui ont toutes notre âge. Et moi, je l’ai vu sur les réseaux soci­aux, c’était extra­or­di­naire. On avait l’impression, sincère­ment, que t’allais être élu prési­dent !

Philippe Poutou Après j’ai fait 0,77 %… [rires]

Vir­ginie Despentes Il y a quelque chose qui va se pass­er après et ce sera col­lec­tif. Indi­vidu­elle­ment, on pour­ra tous s’occuper de nos chakras et de nos diètes respec­tives, mais col­lec­tive­ment il y a des grandes choses qui peu­vent avoir lieu.

Philippe Poutou Et on a vu avec les print­emps arabes au Maroc, en Algérie, ou encore le mou­ve­ment des para­pluies à Hong Kong. C’est la jeunesse qui est à l’origine de tout ça.

Vir­ginie Despentes Ça fait longtemps que l’extrême droite est là. À un moment, c’est pas impos­si­ble que la ten­dance se ren­verse !

Philippe Poutou En tout cas la gamelle de Zem­mour à l’élection prési­den­tielle, il faut qu’elle serve à quelque chose. Même si on est dans une ambiance qui est très réac, c’est un signe. Il s’est écroulé, et pour­tant en octo­bre-novem­bre, on ne par­lait que de lui, il était à 18 % dans les sondages.

Vir­ginie Despentes On ne peut pas pass­er notre temps à être pes­simistes, dés­espérés, avoir déjà per­du.

Philippe Poutou Par­fois, une vic­toire élec­torale, même lim­itée, redonne de la con­fi­ance, et c’est ça qui per­met de se relancer dans des mobil­i­sa­tions sociales. Au bout du compte, il faut qu’on reprenne la rue. •

Entre­tien réal­isé le 22 juin 2022, à Paris, par Lucie Gef­froy et Mar­i­on Pil­las, coré­dac­tri­ces en chef de La Défer­lante.

  1. Dans cette tri­bune pub­liée le 1er mars 2020 dans Libéra­tion, Vir­ginie Despentes revient sur la céré­monie des César, quelques jours aupar­a­vant, au cours de laque­lle Adèle Haenel avait quit­té la salle à l’annonce du prix du meilleur réal­isa­teur pour Roman Polan­s­ki. Elle dresse un par­al­lèle entre cet événe­ment et le pas­sage en force du 49.3 pour la réforme des retraites qui relèvent, selon l’écrivaine, d’un même phénomène social : la vio­lence de classe et de genre entre dom­i­nants et dominé·es.
  2. Dès sa fon­da­tion, en 1989, l’association Act Up-Paris, fig­ure de la lutte con­tre le sida et de la défense de la com­mu­nauté LGBT+, s’est fait con­naître pour ses hap­pen­ing, con­tre des insti­tu­tions publiques ou des lab­o­ra­toires phar­ma­ceu­tiques : des plac­ardages d’affiches et l’utilisation de faux sang bal­ancé sur les façades des bâti­ments.
  3. Chahinez Daoud est morte le 4 mai 2021, blessée par arme à feu et brûlée vive par son mari devant chez elle à Méri­gnac (Gironde). L’homme avait déjà été con­damné pour des vio­lences con­ju­gales en 2015 et en 2020. L’affaire a relancé le débat sur le traite­ment judi­ci­aire des vio­lences con­ju­gales.
  4. Au moment de cet entre­tien, Damien Abad, visé par des accu­sa­tion de viol, ten­ta­tive de viol et agres­sion sex­uelle, était encore min­istre des Sol­i­dar­ités, de l’Autonomie et du Hand­i­cap dans le gou­verne­ment Borne I. Le 29 juin 2022, le par­quet de Paris a ouvert une enquête judi­ci­aire à son encon­tre pour ten­ta­tive de viol. Il n’a pas été recon­duit dans le gou­verne­ment issu du remaniement, le 4 juil­let 2022.
  5. Bron­s­ki Beat est un groupe de new wave anglais, créé en 1983. Son chanteur, Jim­my Som­merville, était homo­sex­uel et mil­i­tant d’Act Up New York.

Lucie Geffroy

Elle a travaillé comme journaliste à Courrier international puis au Monde. Cofondatrice de La Déferlante, elle en est également corédactrice en chef et cheffe d'édition. Depuis Marseille, elle coordonne, entre autres, les pages BD de la revue et supervise la maison d’édition avec Emmanuelle Josse. Voir tous ses articles

Marion Pillas

Après un détour par la production de documentaires, elle est revenue au journalisme avec La Déferlante. Elle en est cofondatrice et corédactrice en chef. Depuis Lille, elle supervise la newsletter, les partenariats et les événements. Voir tous ses articles

Danser : l’émancipation en mouvement

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°8 Jouer, de mai 2023. La Défer­lante est une revue trimestrielle indépen­dante con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société.
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