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« Les féminicides politiques entretiennent l’idée que la vie publique appartient aux hommes »

En parte­nar­i­at avec plusieurs médias, dont La Défer­lante, le col­lec­tif de jour­nal­istes indépendant·es You­press pub­lie en ce mois de mars une grande enquête jour­nal­is­tique sur le phénomène mon­di­al des fémini­cides poli­tiques. Femmes élues, activistes, mem­bres d’associations ou encore jour­nal­istes : elles paient quo­ti­di­en­nement leur engage­ment pub­lic par des men­aces, des vio­ls et des assas­si­nats. Mona Lena Krook, pro­fesseure de sci­ences poli­tiques à l’université Rut­gers, dans le New Jer­sey (États-Unis), explique dans cet entre­tien en quoi s’intéresser au genre des vic­times de vio­lences poli­tiques per­met de mieux com­pren­dre les luttes sociales et leur répres­sion, à l’échelle de la planète.
Publié le 03/03/2023

Modifié le 16/01/2025

Berta Cáceres, militante écologiste hondurienne
Juli­ette Robert / You­press

Com­man­dez le dernier numéro de La Défer­lante : Habiter, de août 2023. La Défer­lante est une revue trimestrielle indépen­dante con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société.
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Comme point de départ à son tra­vail d’enquête, le col­lec­tif You­press a mobil­isé deux data jour­nal­istes pour con­stituer une base de don­nées inédite sur les fémini­cides poli­tiques à tra­vers le monde. En analysant près de 300 cas d’assassinats au prisme du genre, en retraçant le par­cours de cha­cune de ces activistes et en revenant sur les cir­con­stances de leur mort, les jour­nal­istes ont pu établir qu’une par­tie de ces femmes avaient été assas­s­inées non seule­ment en rai­son leur engage­ment poli­tique, mais aus­si en rai­son de leur genre.

 

En quoi est-il per­ti­nent de par­ler de « fémini­cide poli­tique » ?

Dans la plu­part des pays, les femmes sont en pre­mière ligne des com­bats pour la jus­tice sociale. Quand une mil­i­tante est tuée, il ne s’agit pas seule­ment d’une perte indi­vidu­elle, mais aus­si d’une perte pour les luttes qu’elle incar­ne. C’est donc per­ti­nent de s’intéresser à ce qui lui est arrivé, non seule­ment par égard pour la vie de cette per­son­ne, mais aus­si à l’échelle de toute la com­mu­nauté. Étudi­er ce con­cept pour­rait per­me­t­tre de mieux étudi­er les vio­lences con­tre les femmes en poli­tique de manière générale.

Com­ment prou­ver que ces activistes sont tuées parce qu’elles sont mil­i­tantes et femmes à la fois ?

C’est une ques­tion sur laque­lle j’ai beau­coup tra­vail­lé. Ce qui compte selon moi, c’est d’identifier l’intention de l’assassin et l’impact du meurtre. L’intention gen­rée peut être prou­vée facile­ment quand il y a des vio­lences sex­uelles par exem­ple. Ce fut le cas au Zim­bab­we avec le recours au viol con­tre les opposantes poli­tiques au régime de Robert Mugabe, en 2008. D’autres indices exis­tent, comme l’emploi de formes par­ti­c­ulières de vio­lences psy­chologiques ou physiques [insultes sex­istes, diffama­tion, atteinte à la répu­ta­tion, acharne­ment sur le corps].


Quand une mil­i­tante est tuée, il ne s’ag­it pas seule­ment d’une perte indi­vidu­elle mais aus­si d’une perte pour les luttes qu’elle incar­ne.


Vous par­lez de « vio­lence con­tre les femmes en poli­tique ». Qui sont pré­cisé­ment ces femmes ?

Au départ, je m’étais con­cen­trée sur les vio­lences con­tre les femmes poli­tiques (élues ou can­di­dates). Aux États-Unis, par exem­ple, il y a eu de nom­breuses attaques envers les femmes poli­tiques après cer­taines déc­la­ra­tions de Don­ald Trump. Mais au cours de mes recherch­es j’ai com­pris que ces actes visaient aus­si de sim­ples obser­va­tri­ces : les défenseuses des droits humains et les jour­nal­istes. Quand on par­le de vio­lences con­tre les femmes en poli­tique, on par­le de toutes ces femmes aus­si.

Mal­gré tout, si on regarde les sta­tis­tiques de l’ONU ou de Front Line Defend­ers, les hommes sont davan­tage visés que les femmes par des assas­si­nats poli­tiques. Com­ment répon­dez-vous à cet argu­ment ?

Je dirais que ce n’est pas une ques­tion de fréquence ni de vol­ume. Le nom­bre d’attaques n’est de fait pas com­pa­ra­ble, mais c’est le con­tenu et le con­texte qui peu­vent nous aider à iden­ti­fi­er les biais de genre : la for­mu­la­tion des men­aces, les mots employés, la sym­bol­ique qui est der­rière ces vio­lences. Il y a une analo­gie à faire avec les crimes de haine [racisme, xéno­pho­bie, LGBT­pho­bies, intolérance religieuse] qui sont cen­sés envoy­er un mes­sage. Ils veu­lent sig­ni­fi­er aux autres mem­bres du groupe : « Cela aurait pu être toi. »

Ces fémini­cides doivent-ils être pen­sés dans une mécanique de vio­lences plus large ? 

Votre base de don­nées va met­tre en lumière les assas­si­nats, mais il y a de nom­breuses femmes poli­tiques qui sont « juste » con­stam­ment men­acées de mort. On ne se rend pas encore assez compte de l’ampleur des men­aces en ligne con­tre les mil­i­tantes et femmes poli­tiques ! Julia Gillard, Pre­mière min­istre aus­trali­enne de 2010 à 2013, avait évo­qué publique­ment ces vio­lences quo­ti­di­ennes, à l’occasion d’un hom­mage à la députée bri­tan­nique assas­s­inée en juin 2016, Jo Cox.

Dans les cas que j’ai pu étudi­er, l’assassinat est la dernière étape : il inter­vient quand les autres men­aces n’ont pas été assez effi­caces. Cer­tains dis­ent que ce serait le prix à pay­er par les femmes pour faire par­tie de la vie publique. La vio­lence gen­rée entre­tient l’idée selon laque­lle la vie poli­tique appar­tient aux hommes : les femmes, elles, seraient can­ton­nées à la sphère privée. Nous ne devri­ons plus penser de cette façon. Il nous faut lut­ter con­tre la banal­i­sa­tion de la vio­lence con­tre les femmes en poli­tique, car ces actes qui les visent les empêchent de par­ticiper à la vie démoc­ra­tique.

  Toutes les infor­ma­tions sur l’enquête Femmes à abat­tre sont disponibles ici.

→ Retrou­vez la revue de presse ain­si que les coups de cœur de la rédac­tion juste ici.

Collectif Youpress

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Habiter : Brisons les murs

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