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Le combat des mots — Rokhaya Diallo et Adèle Haenel

Le témoignage de l’actrice Adèle Haenel et sa dénon­ci­a­tion des vio­lences sex­uelles ont fait d’elle une voix des reven­di­ca­tions fémin­istes actuelles. Chroniqueuse et jour­nal­iste engagée, Rokhaya Dial­lo incar­ne depuis une dizaine d’années le renou­veau des luttes antiracistes. L’une et l’autre font enten­dre une parole rad­i­cale, quitte à déranger le con­formisme des milieux dans lesquels elles évolu­ent. Pour La Défer­lante, elles racon­tent leur chem­ine­ment poli­tique et échangent sur les modal­ités de l’engagement, à une époque mar­quée par la polar­i­sa­tion des opin­ions.
Publié le 04/02/2022

Modifié le 15/04/2025

Flo­rence Bro­choire

Retrou­vez cet arti­cle dans La Défer­lante n°5 Par­ler (mars 2022)

Rokhaya Dial­lo, com­ment avez-vous perçu le témoignage don­né par Adèle Haenel à Medi­a­part en novem­bre 2019 ?

Rokhaya Dial­lo Cette révéla­tion (1) a été un moment fon­da­teur, his­torique.

De même que tout ce qui s’est passé après, dans la foulée : les Césars, puis le livre de Vanes­sa Springo­ra, Le Con­sen­te­ment, sur la pédocrim­i­nal­ité. Il nous fal­lait un réc­it qui s’inscrive dans le con­texte français pour que finale­ment le mou­ve­ment #MeToo ait un sens médi­a­tique ici, et que d’autres puis­sent s’en empar­er. Ce que j’ai trou­vé vrai­ment fort, c’est que tu as dépeint ta sit­u­a­tion avec des mots qui allaient au-delà de ta pro­pre per­son­ne, Adèle. C’est rare d’avoir suff­isam­ment de dis­tance pour par­ler d’une manière qui per­me­tte à cha­cun, à cha­cune de se recon­naître dans ce qui est dit.

Adèle Haenel L’enjeu pour moi à ce moment-là, c’était de par­ticiper à une mise en mou­ve­ment. Le déni autour des vio­lences sex­uelles per­met de dis­soci­er l’ordre patri­ar­cal de la vio­lence néces­saire à sa per­pé­tu­a­tion. De faire comme si ce sys­tème était naturel, « bon pour tout le monde ». La preuve : il tient tout seul. C’est un pro­jet poli­tique qui cherche à invis­i­bilis­er l’omniprésence du phénomène des vio­lences sex­uelles, pour faire comme si celui-ci avait à voir avec l’intime et non avec le poli­tique, avec le mon­strueux et non avec le banal, avec l’extérieur et non avec l’intérieur. Et c’est là notam­ment que l’ordre patri­ar­cal s’articule avec les oppres­sions racistes et islam­o­phobes. Le gou­verne­ment français, pro­fondé­ment misog­y­ne, ne bran­dit la cause des femmes que pour stig­ma­tis­er des patri­ar­cats non blancs, comme si l’oppression sex­iste était un prob­lème importé. En tant que fémin­istes, on doit faire très atten­tion à ne pas être instru­men­tal­isées pour servir ces fins racistes. C’est pour ça que, selon moi, il faut mar­quer les liens et faire les ponts, s’inscrire dans un mou­ve­ment glob­al. Au moment même où on se lev­ait aux Césars pour pro­test­er con­tre le fait de récom­penser un vio­leur, Aïs­sa Maï­ga dénonçait avec un immense courage le manque de représen­ta­tion des per­son­nes noires dans le ciné­ma français. Son dis­cours a été une claque. À titre per­son­nel, ça a été le déclic. J’ai réal­isé que le mou­ve­ment fémin­iste dans lequel je m’inscrivais était très blanc et j’ai com­mencé à pren­dre con­science de la dynamique inter­sec­tion­nelle des oppres­sions. Ce tra­vail de com­préhen­sion, je le fais aus­si en grande par­tie grâce à l’excellent tra­vail de Grace Ly et Rokhaya, avec le pod­cast Kiffe ta race (2). Donc mer­ci beau­coup Rokhaya.

Rokhaya Dial­lo Mer­ci… C’est parce que nos réflex­ions se croisent et se nour­ris­sent mutuelle­ment que nous pou­vons avancer col­lec­tive­ment. On ne réflé­chit pas dans des cas­es qui sont isolées : à chaque fois que je t’entends par­ler, Adèle, for­cé­ment j’intègre ce que tu dis dans ma réflex­ion. C’est impor­tant de ne pas rester figé·es sur des posi­tions lim­itées par nos pro­pres per­spec­tives. Je suis hétéro­sex­uelle, il y a plein de choses qui ne me vien­nent pas à l’esprit devant des prob­lé­ma­tiques que je ne ren­con­tre pas per­son­nelle­ment.

En novem­bre 2019, Adèle Haenel, vous avez eu cette phrase reprise depuis par cer­taines asso­ci­a­tions fémin­Istes : « La jus­tice nous ignore, on ignore la jus­tice. » Mais finale­ment, vous avez décidé de porter plainte con­tre Christophe Rug­gia après que le par­quet de Paris s’est auto­saisi de l’affaire. Quel regard portez-vous sur la capac­ité de la jus­tice à pren­dre en compte les vic­times de vio­lences sex­uelles ?

Adèle Haenel En ce qui con­cerne le fonc­tion­nement spé­ci­fique du sys­tème judi­ci­aire, je ren­voie au livre de Marine Turchi  [Faute de preuves, Seuil, 2021]  : une enquête colos­sale sur la jus­tice post #MeToo. Pour ma part, je dirais que ma cri­tique ne porte pas tant sur la jus­tice que sur la respon­s­abil­ité de l’État en matière de pro­duc­tion de la vio­lence, notam­ment sex­uelle et sex­iste. Je cri­tique la jus­tice en tant qu’émanation du pou­voir de l’État, lui-même tra­ver­sé par le sex­isme, le racisme et le clas­sisme 3. Quand on par­le du traite­ment judi­ci­aire des vio­lences sex­uelles, on est dans la non-jus­tice par excel­lence, puisque seule­ment un viol sur cent aboutit à une con­damna­tion. Mais les vio­lences sex­uelles sont un prob­lème poli­tique qui dépasse large­ment la ques­tion judi­ci­aire. Ce que nous voulons, c’est que ces crimes ne se pro­duisent plus et que nos vies ne soient plus piét­inées. Donc que la société dans son entièreté se déplace. Ça requiert une volon­té poli­tique forte, et des investisse­ments en par­ti­c­uli­er dans la recherche, le soin, la for­ma­tion, etc.


« Les vio­lences sex­uelles sont un prob­lème poli­tique qui dépasse large­ment la ques­tion judi­ci­aire. Ce que nous voulons c’est que ces crimes ne se pro­duisent plus et que nos vies ne soient plus piét­inées. »

Adèle Haenel



Qu’en pensez-vous, Rokhaya Dial­lo ?

Rokhaya Dial­lo C’est vrai que la jus­tice arrive au bout d’un proces­sus. Mal­gré tout, je pense que c’est impor­tant de con­tin­uer à faire appel à elle. Le fait qu’une per­son­ne comme Amal Ben­toun­si ait pu faire con­damn­er le polici­er qui avait tué son frère d’une balle dans le dos, ou qu’Assa Tra­oré essaie d’obtenir une réponse judi­ci­aire con­cer­nant les gen­darmes impliqués dans la mort de son frère, ou encore que la famille de Lamine Dieng ait épuisé toutes les voies de recours nationales et soit allée jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme pour obtenir un dédom­mage­ment de la France, cela per­met de doc­u­menter des faits. Per­son­nelle­ment, j’ai porté plainte à plusieurs repris­es, pour un appel au viol con­tre moi et des men­aces de mort, et les deux per­son­nes coupables de ces agisse­ments ont été con­damnées. C’est impor­tant, quand nous sommes des corps minori­taires, de rap­pel­er que ces insti­tu­tions sont là pour nous défendre, même si mal­heureuse­ment la plu­part des agres­sions ne seront jamais portées à la con­nais­sance des mag­is­trats.

Vous avez toutes les deux con­tribué au livre col­lec­tif Feu !, le dic­tio­n­naire des fémin­ismes présents (Lib­er­talia, 2021). Dans votre texte, Adèle Haenel, vous rap­pelez com­ment on intime aux vic­times de vio­lences sex­uelles de taire leur his­toire pour préserv­er l’unité d’une famille, d’un par­ti poli­tique, d’un cer­cle d’ami·es. Est-ce le même type d’injonction au silence que subis­sent les « enfants de la République » comme vous les appelez Rokhaya Dial­lo, qui ten­tent de par­ler de l’histoire colo­niale ?

Adèle Haenel Les per­son­nes qui croient ne pas pou­voir sup­port­er ta parole, soit parce qu’elles sont coupables, soit parce qu’elles ne sup­por­t­ent pas la remise en ques­tion de leur monde, vont dire que tu les bless­es et, qu’au fond, elles souf­frent plus que toi. Mais en vérité, je crois qu’elles s’en foutent. Elles veu­lent juste que tu dis­es autre chose. Le chan­tage affec­tif est une tech­nique par­mi d’autres pour faire régn­er un silence arrangeant. J’ai eu l’occasion de lire Fragilité blanche de la soci­o­logue état­suni­enne Robin DiAn­ge­lo : on y retrou­ve un pas­sage con­sacré aux « larmes blanch­es ». En « pleu­rant » dès qu’on pointe chez elles un com­porte­ment raciste, les per­son­nes blanch­es inversent le sens de la blessure et for­cent les per­son­nes vic­times de racisme à se taire.

Rokhaya Dial­lo Pour ce qui est des descendant·es des per­son­nes colonisées et de cette idée de « préserv­er le clan », oui, j’ai l’impression que lorsque nous prenons la parole pour dénon­cer le racisme, nous sommes perçu·es comme des enfants illégitimes qui s’invitent à la table famil­iale un jour de fête. C’est comme dans le film Fes­ten ! Il me sem­ble que, dans tous les cas, quand on dénonce des vio­lences sex­istes ou raciales, on brise tou­jours une sorte de con­sen­sus famil­ial implicite.


« Ma présence, le fait que je souligne ma con­di­tion (femme, fille d’ouvrier, noire, musul­mane) crée de la crispa­tion parce que, avec tous les écré­mages soci­aux, je ne devrais pas être là. »

Rokhaya Dial­lo


Rokhaya Dial­lo, vous tenez à l’idée d’un hori­zon com­mun : dans Feu !, vous déplorez que les fémin­istes qui, comme vous, dénon­cent l’enchevêtrement des oppres­sions (de genre, de race, de classe) soient « qual­i­fiées de par­tic­u­lar­istes ou com­mu­nau­taristes et donc privées de revendi­quer un uni­ver­sal­isme ».

Rokhaya Dial­lo L’« uni­ver­sal­isme » est un terme dont je refuse de me laiss­er dépos­séder. L’universalisme ne peut pas être défi­ni depuis trois arrondisse­ments parisiens, par un petit groupe bour­geois. C’est d’une folle arro­gance. L’universalisme, je le trou­ve dans des réc­its qui m’ont été racon­tés par mes par­ents, dans la lit­téra­ture africaine, dans des mou­ve­ments décolo­ni­aux d’Amérique du Sud, dans la Caraïbe. Le désir de lib­erté est inhérent au fait d’être un être humain : c’est ça l’universalisme. Mais des hommes se sont répan­dus partout dans le monde en se ser­vant de l’universalisme pour mas­quer des inten­tions belliqueuses et cap­i­tal­istes. C’est donc impor­tant de revendi­quer cette idée et de la déplac­er pour l’associer à ce que nous sommes, nous per­son­nes minori­taires. Parce que je crois véri­ta­ble­ment que la lutte uni­ver­sal­iste est de notre côté.

Adèle Haenel, vous avez racon­té que durant vos années lycéennes, on se dis­ait volon­tiers anar­chiste, ant­i­cap­i­tal­iste, antiraciste, mais pas fémin­iste.

Adèle Haenel Le mot fémin­iste, pour moi, n’existait pas, ou alors c’était vrai­ment un truc très ringard, tan­dis que je me suis tou­jours revendiquée d’une cul­ture antiraciste. Mais aujourd’hui, je réalise que je pen­sais le racisme comme un prob­lème moral, comme un prob­lème de droite. C’est récem­ment que j’ai pris con­science que c’était une lutte qui me con­cer­nait.

Rokhaya Dial­lo Même quand tu es concerné·e par le racisme, en France c’est très dif­fi­cile de trou­ver les out­ils, y com­pris pour le for­muler parce que l’antiracisme français, en tout cas celui qui est dom­i­nant et l’a été pen­dant toute ma jeunesse, c’est celui dont tu par­les, Adèle, c’est l’antiracisme moral. En gros, ailleurs que dans l’extrême droite, il n’y a pas de racisme. C’est très com­pliqué de trou­ver des ter­mes pour définir ce qui est de l’ordre du racisme ordi­naire.

Qu’est-ce qui vous a per­mis d’articuler et de pré­cis­er votre réflex­ion sur le racisme ?

Rokhaya Dial­lo Ma con­science poli­tique est venue de l’altermondialisme, notam­ment en lisant l’écrivaine et femme poli­tique mali­enne Ami­na­ta Tra­oré. Dans L’Étau, un livre écrit à la fin des années 1990, elle expli­quait com­ment la dette des pays africains envers les pays occi­den­taux était une dette colo­niale qui per­pé­tu­ait un lien de dom­i­na­tion, entre les pays d’Afrique fran­coph­o­ne et la France par exem­ple, puisque ces pays ne ces­saient de rem­bours­er des intérêts sans jamais par­venir à rem­bours­er la somme due ini­tiale­ment. Ensuite, il y a eu les deux chocs qu’ont été, pour moi, la loi sur le port des signes religieux à l’école en 2004, et la mort de Zyed Ben­na et Bouna Tra­oré en 2005 (4). Ces deux événe­ments et la manière dont ils ont été traités médi­a­tique­ment m’ont vrai­ment fait com­pren­dre le racisme français. En 2003–2004, tous les jours dans les médias, il y avait des débats sur le voile et jamais une seule per­son­ne con­cernée n’était invitée à s’exprimer. C’était hyper mas­culin, oppres­sant et choquant. J’avais le sen­ti­ment, en tant que musul­mane, d’être dépos­sédée de ma parole, de la pos­si­bil­ité de par­ler pour moi et de racon­ter mon vécu.

Adèle Haenel, vous datez votre prise de con­science fémin­iste de la décou­verte du livre de Vir­ginie Despentes King Kong théorie.

Adèle Haenel Les livres de Despentes ont été très impor­tants pour moi, sal­va­teurs, à un moment où je me sen­tais extrême­ment seule et con­fuse. La colère de Vir­ginie Despentes était nette, exces­sive, et elle me pro­tégeait. Mon par­cours d’adolescente, c’était vrai­ment de l’embrouille. Je n’arrivais pas à com­pren­dre ce qui m’arrivait, à met­tre des mots sur une sit­u­a­tion. Je me sen­tais seule, sale et déprimée. J’ai traîné cette con­fu­sion avec moi pen­dant pas mal de temps, je n’en suis sor­tie qu’assez récem­ment.

Dans Une bib­lio­thèque fémin­iste (L’Iconoclaste, 2021), vous dites : « Je pense que devenir les­bi­enne a eu pour con­séquence pra­tique de per­me­t­tre à Vir­ginie Despentes d’arrêter de ren­dre des comptes quo­ti­di­en­nement aux hommes, et par là même de dégager de l’énergie disponible. » Est-ce que cela vaut égale­ment pour vous ?

Adèle Haenel Oui, peut-être un peu : ça a été mon tra­jet à moi. À un moment ça a été un endroit où effec­tive­ment je n’ai pas eu à me jus­ti­fi­er des vio­lences que j’avais subies, où j’ai pu penser à autre chose qu’utiliser mon temps à essay­er de cor­re­spon­dre à un idéal féminin blanc, qui con­siste surtout à ne pas être. C’était pas mal d’énergie per­due. Et en plus je n’étais pas très forte là-dedans…

Et vous Rokhaya Dial­lo, quelles fig­ures vous ont mar­quée ?

Rokhaya Dial­lo J’ai lu plein de fois, à des épo­ques dif­férentes de ma vie, Une si longue let­tre de Maria­ma Bâ [1979]. Je trou­ve que c’est un livre d’une justesse, d’une per­ti­nence et d’une uni­ver­sal­ité incroy­able. C’est un réc­it fon­da­teur, inté­gré au pro­gramme sco­laire au Séné­gal et par­le du patri­ar­cat, du cou­ple et de la polyg­a­mie. Je pense aus­si au romanci­er et cinéaste Ous­mane Sem­bène, qui a écrit et réal­isé La Noire de…, le pre­mier long-métrage africain [1966]. C’est un film mag­nifique sur l’histoire d’une femme séné­galaise qui se retrou­ve employée de mai­son en France. Voir sur grand écran le réc­it d’immigration, de dom­i­na­tion, de sex­isme d’une femme noire africaine, m’a per­mis de légitimer des réc­its que je n’entendais pas.


« Si on veut une incar­na­tion fémin­iste dans une per­spec­tive poli­tique de gou­verne­ment, il faudrait qu’elle soit pen­sée et portée par des fémin­istes au sein d’un pro­jet révo­lu­tion­naire. »

Adèle Haenel


La sor­tie de King Kong Théorie en 2006 coïn­cide avec le tour­nage de Nais­sance des pieu­vres, votre pre­mier film, Adèle Haenel, avec la réal­isatrice Céline Sci­amma. A‑t-il aus­si con­sti­tué pour vous une forme d’éveil, de con­sci­en­ti­sa­tion ?

Adèle Haenel Dans mon par­cours, la poli­ti­sa­tion et la résilience sont absol­u­ment entremêlées. Ça a com­mencé le jour où j’ai décidé de met­tre un terme à l’emprise de R (5). À ce moment-là j’étais une ado­les­cente, seule, hagarde et dés­espérée. Je me suis fait la promesse que plus per­son­ne ne penserait pour moi. J’ai com­mencé à tra­vailler à l’école puisque c’est ce que j’avais à portée de main. Et puis, ensuite, en chemin, j’ai été accom­pa­g­née par des per­son­nes envers qui je serai éter­nelle­ment recon­nais­sante car je n’aurais pas réus­si à avancer seule bien longtemps. Céline est l’une d’entre elles. Toutes les deux, on a beau­coup dis­cuté d’art et de poli­tique notam­ment. On con­tin­ue d’évoluer ensem­ble aujourd’hui.

Vous n’avez pas tourné depuis Por­trait de la jeune fille en feu, de Céline Sci­amma, il y a deux ans. Est-ce qu’il y a des films que vous ne voulez plus faire ? Est-ce com­pliqué de faire cohab­iter votre con­science poli­tique et votre méti­er d’actrice au ciné­ma ?

Adèle Haenel Le ciné­ma est une indus­trie qui, pour une large part, con­tribue à véhiculer le sex­isme et le racisme, le clas­sisme, le validisme 6. Chacun·e deale dif­férem­ment avec ça, et les enjeux ne sont pas les mêmes pour tout le monde. Il y a des per­son­nes qui sont en mesure de sub­ver­tir les choses de l’intérieur. Je ne peux par­ler que de manière située, mais oui, j’essaie de ne pas pren­dre part à ce qui peut con­tribuer à toute forme d’exploitation, de dom­i­na­tion. Dans le domaine du ciné­ma, en effet ça réduit le champ des pos­si­bles.

Vous êtes en tournée au théâtre dans L’Étang, de Gisèle Vienne, et avez posé votre voix sur le doc­u­men­taire Retour à Reims. Ce sont deux œuvres qui ques­tion­nent les rap­ports de dom­i­na­tion. Aller vers ce type de créa­tion, est-ce une manière de vous réap­pro­prier votre voix, votre corps ?

Adèle Haenel Le théâtre et la col­lab­o­ra­tion avec Gisèle, c’est un tra­vail que j’adore. On mêle les réflex­ions poli­tiques, philosophiques, artis­tiques avec un plaisir très intu­itif de jeu de plateau. Je trou­ve exal­tant de chercher de nou­velles pistes d’incarnation pour par­ler depuis un corps com­pos­ite, de chercher à remet­tre en scène l’histoire sédi­men­tée dans le corps, avec ses con­tra­dic­tions, ses fil­i­a­tions. Réus­sir à par­ler depuis mon corps qui est par­lé par d’autres, qui par­le lui-même avec plusieurs voix [lire l’encadré en fin d’ar­ti­cle]. Com­ment penser un jeu d’actrice hors de l’individualisme et du cadre de la sou­veraineté indi­vidu­elle ? Ce sont des recherch­es pas­sion­nantes, je trou­ve.


« L’“universalisme” est un terme dont je refuse de me laiss­er dépos­séder. L’universalisme ne peut pas être défi­ni depuis trois arrondisse­ments parisiens, par un petit groupe bour­geois. C’est d’une folle arro­gance. »

Rokhaya Dial­lo


Vous êtes toutes les deux dev­enues des porte-paroles des luttes fémin­istes et antiracistes. Est-ce que vous vous définis­sez comme mil­i­tantes ?

Rokhaya Dial­lo Porte-parole, ce n’est pas une place que j’ai choisie, et le terme invis­i­bilise une par­tie de mon tra­vail tout comme celui des per­son­nes active­ment impliquées dans la lutte. Mes détracteurs me qual­i­fient sys­té­ma­tique­ment de « mil­i­tante », pour décrédi­bilis­er mon tra­vail de jour­nal­iste. Je ne trou­ve pas ça infamant d’être mil­i­tante, mais ce n’est pas mon activ­ité. Je ne milite dans aucune organ­i­sa­tion depuis dix ans, ni dans aucun par­ti.

Adèle Haenel De fait, la décon­struc­tion de l’image, des endroits intimes de ma vie où la vio­lence a eu lieu, et du médi­um qu’est le ciné­ma m’a amenée à être mil­i­tante, à vouloir soutenir des per­son­nes et des mou­ve­ments. C’est une respon­s­abil­ité : quand on par­le publique­ment, ça veut dire qu’il y a un « silence suff­isant » autour de notre voix pour qu’on soit enten­due. Donc la moin­dre des choses, c’est quand même d’essayer de se bat­tre pour une société plus juste.

Rokhaya Dial­lo, vous n’hésitez pas à inve­stir l’espace médi­a­tique. À l’inverse, Adèle Haenel, votre geste aux Césars en 2020 est une invi­ta­tion à faire séces­sion – que Vir­ginie Despentes a résumée dans une for­mule per­cu­tante : « On se lève et on se casse. » Pour lut­ter, faut-il porter des idées mar­gin­al­isées vers le cen­tre, ou au con­traire désert­er les espaces hos­tiles et aller du cen­tre vers la marge ?

Rokhaya Dial­lo Spon­tané­ment je n’irais pas chercher du tra­vail dans les émis­sions de diver­tisse­ment et de droite. Mais quand cela m’a été pro­posé, je n’ai pas hésité. Je ne m’étais jamais imag­iné que j’allais pass­er 12 ans à RTL [dans l’émission heb­do­madaire de débat On refait le monde], mais ça se passe bien, et c’est un endroit où je peux m’exprimer. J’écris aus­si pour le trimestriel Regards, et récem­ment dans Mar­i­anne. J’observe que dans de nom­breux médias proches de la gauche cen­triste, mes idées sus­ci­tent un malaise, alors que, para­doxale­ment, les médias plus posi­tion­nés à droite sont moins dérangés par ma présence qui leur per­met d’organiser des débats entre par­ties advers­es. Quand on fai­sait les Y’a bon Awards, les gens qui l’ont le plus mal vécu, c’était des gens de gauche.

Adèle Haenel Avec Rokhaya, on n’a pas la même stratégie, c’est clair. Mais on n’a pas les mêmes capac­ités non plus. Moi je serais absol­u­ment inca­pable de faire ce que tu fais au quo­ti­di­en. D’où vient d’après toi le gros malaise autour du racisme français de gauche ?

Rokhaya Dial­lo Les gens de droite se fichent bien d’être validés par quelqu’un de noir et de fémin­iste. La gauche française a tou­jours été très pater­nal­iste et s’est engagée en faveur d’une coloni­sa­tion civil­isatrice. Elle a tou­jours pré­ten­du faire le bien des minorités à leur place, et ne sup­porte pas d’être remise en cause, en par­ti­c­uli­er dans ses pra­tiques sur le fémin­isme, sur les ques­tions LGBTQIA+. Les mou­ve­ments et les médias de gauche ne sont pas encore tout à fait prêts à enten­dre des voix internes et minori­taires dis­cor­dantes.

Rokhaya Dial­lo, les for­mats télévisés dans lesquels vous inter­venez régulière­ment ne sont-ils pas généra­teurs de polémiques qui se révè­lent peu con­struc­tives ?

Rokhaya Dial­lo Le dis­posi­tif télévi­suel n’est que l’écho d’un con­texte d’oppression plus large. Je ne pense pas que mon absence de ces espaces ferait dis­paraître les polémiques. Ma présence, le fait que je souligne ma con­di­tion (femme, fille d’ouvrier, noire, musul­mane) crée de la crispa­tion parce que, avec tous les écré­mages soci­aux, je ne devrais pas être là… Mais je me demande en per­ma­nence dans quelle mesure ma par­tic­i­pa­tion est à même d’apporter du change­ment. Est-ce que je ne jus­ti­fie pas un dis­cours dom­i­nant en étant là et en ajoutant ma voix ? Ou est-ce que ma voix finale­ment per­met de faire exis­ter autre chose ? Je ne sais pas si c’est effi­cace. Entre le moment où j’ai com­mencé à la télé et aujourd’hui, on ne peut pas dire que les dis­cours racistes et sex­istes aient dis­paru. Pour autant, j’ai gran­di devant une télé où les per­son­nes comme Adèle ou moi n’avaient pas la parole.


« Les livres de Despentes ont été très impor­tants pour moi, sal­va­teurs, à un moment où je me sen­tais extrême­ment seule et con­fuse. La colère de Vir­ginie Despentes était nette, exces­sive, et elle me pro­tégeait. »

Adèle Haenel


Que dites-vous de la can­di­da­ture à la prési­den­tielle d’un homme comme Éric Zem­mour, ouverte­ment mas­culin­iste et raciste ?

Rokhaya Dial­lo Éric Zem­mour est né médi­a­tique­ment avec les posi­tions sex­istes de son livre Le Pre­mier Sexe (Denoël, 2006). Il doit son suc­cès à ce dis­cours très antifémin­iste et s’est ren­du vis­i­ble en ayant des posi­tions extrême­ment racistes et xéno­phobes dès la deux­ième moitié des années 2000. J’ai débat­tu avec Zem­mour deux fois, sur les plateaux télévisés, en 2008 et en 2010. En 2010, il me par­lait déjà de mon prénom ! Pour­tant, tout le monde réag­it comme si la rad­i­cal­i­sa­tion de son dis­cours était une décou­verte soudaine. C’est l’ensemble du spec­tre poli­tique qui s’est déplacé vers la droite. C’est tout un con­texte qui a ren­du Zem­mour accept­able et qui lui a per­mis d’exister, de pren­dre la parole – y com­pris dans les médias du ser­vice pub­lic –, de nor­malis­er son dis­cours, et d’ouvrir la porte à d’autres per­son­nes aux posi­tions équiv­a­lentes.

Adèle Haenel Je n’imagine même pas ce que ces injures répétées pro­duisent comme blessures pour les per­son­nes musul­manes ou iden­ti­fiées comme telles. C’est une honte qu’une grande par­tie de la classe poli­tique française valide les ter­mes racistes de ces débats. Cet acharne­ment sert à éviter de prob­lé­ma­tis­er les rap­ports soci­aux en ter­mes de classe et de penser les intérêts com­muns selon cet axe.

Pre­mière can­di­date fémin­iste post-#MeToo en France, San­drine Rousseau – que vous avez soutenue, Adèle Haenel – a échoué à la pri­maire des écol­o­gistes en sep­tem­bre dernier. Le fémin­isme peut-il s’incarner dans une voie élec­torale ? Ou bien ne passe-t-il que par des trans­for­ma­tions intimes ou des mou­ve­ments soci­aux ?

Rokhaya Dial­lo Ce qui s’est pro­duit avec San­drine Rousseau va mar­quer durable­ment la vie poli­tique française. Elle a porté à un niveau nation­al des ques­tions invis­i­bil­isées. Mais il n’y a pas que l’élection prési­den­tielle. L’essentiel de nos lois vient du Par­lement européen puisque les direc­tives européennes sont trans­posées en droit français, or ce sont des élec­tions qu’on nég­lige énor­mé­ment. Il faut aus­si penser à toutes les élec­tions inter­mé­di­aires, comme les séna­to­ri­ales… Mélanie Vogel est écol­o­giste, fémin­iste et antiraciste, sur une ligne assez proche de San­drine Rousseau, et elle siège au Sénat, la Cham­bre haute qui est assez con­ser­va­trice. Il faut penser la poli­tique en dehors de la prési­den­tielle, et se dire que les choses peu­vent et doivent bouger par ailleurs.

Adèle Haenel Les avancées réelles en matière de jus­tice et de droits effec­tifs des femmes, nous les devons unique­ment aux mil­i­tantes fémin­istes en action. Rien n’a été don­né. Des per­son­nes comme San­drine Rousseau et Alice Cof­fin ont eu à affron­ter une vio­lence inouïe pour avoir osé porter un pro­gramme dans lequel le fémin­isme était au cen­tre. On ne peut qu’être recon­nais­santes et admi­ra­tives de leur tra­vail. Cepen­dant, il me sem­ble que si on veut une incar­na­tion fémin­iste dans une per­spec­tive poli­tique de gou­verne­ment, il faudrait qu’elle soit pen­sée et portée par des fémin­istes au sein d’un pro­jet révo­lu­tion­naire. Les can­di­da­tures à l’extrême gauche doivent met­tre la lutte ant­i­cap­i­tal­iste, la lutte fémin­iste et antiraciste sur un pied d’égalité, comme cherche aujourd’hui à le faire Anasse Kaz­ib 7 par exem­ple. Sans une pen­sée poli­tique révo­lu­tion­naire qui affronte de front les struc­tures et qui artic­ule les éman­ci­pa­tions entre elles, le fémin­isme risque sans cesse d’être vidé de son con­tenu et recodé par le pou­voir afin de servir de joug dans le cadre d’une autre oppres­sion. •

Entre­tien réal­isé le 3 décem­bre 2021, au Point éphémère à Paris par Lucie Gef­froy, coré­dac­trice en chef de La Défer­lante et Léa Mormin-Chau­vac, jour­nal­iste indépen­dante.

  1. Le 4 novem­bre 2019, dans une longue enquête pub­liée par Medi­a­part, Adèle Haenel accuse Christophe Rug­gia d’attouchements et de har­cèle­ment sex­uel com­mis lorsqu’elle avait entre 12 à 15 ans. Le réal­isa­teur a été mis en exa­m­en pour agres­sions sex­uelles sur mineure de 15 ans.
  2. Dif­fusé depuis sep­tem­bre 2018, Kiffe ta race est un pod­cast bimen­su­el de Binge Audio. Un livre éponyme est paru en jan­vi­er 2022 aux édi­tions First.
  3. Le clas­sisme désigne toutes les dis­crim­i­na­tions basées sur l’appartenance ou la non-appar­te­nance à une classe sociale.
  4. Bouna Tra­oré (15 ans) et Zyed Ben­na (17 ans) sont morts le 27 octo­bre 2005 à Clichy-sous-bois, élec­tro­cutés dans un poste élec­trique où ils étaient entrés pour se sous­traire à un con­trôle de police. Leur mort a été à l’origine de trois semaines d’affrontements avec les forces de polices dans de nom­breux quartiers pop­u­laires.

 

ROKHAYA DIALLO ET ADÈLE HAENEL EN 8 DATES
1978 : Nais­sance de Rokhaya Dial­lo à Paris.

1989 : Nais­sance d’Adèle Haenel à Paris.

2007 : Rokhaya Dial­lo cofonde l’association Les Indi­vis­i­bles qui lutte con­tre les dis­crim­i­na­tions raciales.

2015 : Adèle Haenel reçoit le césar de la meilleure actrice pour son rôle dans Les Com­bat­tants de Thomas Cail­ley.

2015 : Le film doc­u­men­taire Les March­es de la lib­erté de Rokhaya Dial­lo qui ques­tionne l’identité française à tra­vers le regard de jeunes Améri­cains reçoit le prix du meilleur film doc­u­men­taire au fes­ti­val région­al et inter­na­tion­al de Guade­loupe.

2019 : Adèle Haenel accuse le réal­isa­teur Christophe Rug­gia d’attouchements et de har­cèle­ment sex­uel, ouvrant une dis­cus­sion nationale sur la pédocrim­i­nal­ité en France.

2020 : Adèle Haenel incar­ne Héloïse dans Por­trait de la jeune fille en feu, de Céline Sci­amma, récom­pen­sé à Cannes et aux Césars.

2021 : Rokhaya Dial­lo est classée par­mi les 28 per­son­nal­ités les plus influ­entes d’Europe en 2021 par le jour­nal état­sunien Politi­co.

 

Frag­ments de voix et réc­its poli­tiques
Depuis l’automne 2021, Adèle Haenel joue dans L’Étang, mise en scène par Gisèle Vienne d’après un texte de Robert Walser. La pièce de théâtre évoque la vio­lence et les non-dits des rela­tions fil­iales inces­tueuses. Sil­hou­ette longiligne et androg­y­ne, Adèle Haenel, qui y incar­ne un ado­les­cent, livre une véri­ta­ble per­for­mance physique : jouant sur la dis­so­ci­a­tion entre le corps et la parole, elle prête sa voix à plusieurs per­son­nages. « Le théâtre me per­met de m’interroger sur le jeu d’actrice et la façon dont on cherche à le réin­ven­ter », explique-t-elle. Quant au doc­u­men­taire Retour à Reims, il pose des images d’archives sur le texte éponyme du soci­o­logue Didi­er Éri­bon : Adèle Haenel est la nar­ra­trice du réc­it auto­bi­ographique de cet homme issu du monde ouvri­er devenu uni­ver­si­taire.

Si le grand pub­lic con­naît surtout Rokhaya Dial­lo pour son tra­vail de jour­nal­iste et édi­to­ri­al­iste, elle est aus­si une doc­u­men­tariste et autrice pro­lifique, dont le tra­vail précurseur sur le racisme en France est recon­nu inter­na­tionale­ment. Elle a écrit une dizaine de livres, dont l’essai biographique Ne reste pas à ta place ! (Marabout, 2019). Dans son doc­u­men­taire La Parisi­enne démys­ti­fiée (2021), elle décrypte le mythe de la femme parisi­enne, tan­dis que Booty­ful !, sur France.tv Slash, explique com­ment les gross­es fess­es, par­ti­c­ulière­ment moquées autre­fois lorsqu’il s’agissait de celles de femmes noires, sont dev­enues à la mode. « J’apprécie cette par­tie de mon activ­ité plus imag­i­na­tive et créa­tive, elle me per­met d’échapper au car­ac­tère instan­ta­né des polémiques », pré­cise-t-elle. Enfin, en mai 2021, elle a rejoint en tant que chercheuse en rési­dence le cen­tre de recherche Gen­der+ Jus­tice Ini­tia­tive de l’université de George­town à Wash­ing­ton. Cette insti­tu­tion inter­dis­ci­plinaire promeut la col­lab­o­ra­tion d’universitaires et de per­son­nes qui ne sont pas issues du monde académique autour de travaux relat­ifs au genre et à la jus­tice sociale.

 

Un essai et une pièce de théâtre en cadeau
C’était un ven­dre­di de décem­bre plu­vieux. Comme il fai­sait froid dans le grand stu­dio de danse du Point éphémère, Adèle Haenel a gardé son bon­net orange sur la tête tout au long de l’entretien et a prêté son blou­son à Rokhaya Dial­lo. À l’issue de la ren­con­tre, répon­dant à l’invitation de La Défer­lante, elles ont échangé un cadeau. À Adèle Haenel, Rokhaya Dial­lo a offert Le Iench (Actes Sud, 2020), une pièce de théâtre signée de la met­teuse en scène Eva Doumbia, mem­bre fon­da­trice du col­lec­tif Décolonisons les arts. Elle racon­te l’histoire de Dris­sa, un petit garçon français d’origine mali­enne qui vit dans un pavil­lon de province avec sa famille et rêve d’une vie banale, comme celle qui s’affiche dans les pub­lic­ités. « Tu vas voir, c’est un très beau texte de théâtre », a com­men­té Rokhaya Dial­lo. Celle-ci s’est vu offrir Le Pou­voir des mots de la philosophe améri­caine Judith But­ler, pio­nnière des théories queer. « Ce livre m’accompagne et me nour­rit dans ma réflex­ion sur la jus­tice », a pré­cisé Adèle Haenel. But­ler y analyse les effets des dis­cours de haine. Expli­quant pourquoi il est dan­gereux de con­fi­er à l’État ce qui relève du dici­ble et de l’indicible, le livre mon­tre que les per­son­nes ciblées par les vio­lences ver­bales peu­vent vider celles-ci de leur sub­stance en créant des espaces de luttes et de sub­ver­sion.

Lucie Geffroy

Elle a travaillé comme journaliste à Courrier international puis au Monde. Cofondatrice de La Déferlante, elle en est également corédactrice en chef et cheffe d'édition. Depuis Marseille, elle coordonne, entre autres, les pages BD de la revue et supervise la maison d’édition avec Emmanuelle Josse. Voir tous ses articles

Léa Mormin-Chauvac

Journaliste et autrice, elle est membre du comité éditorial de La Déferlante. Entre la Martinique et l’Hexagone, elle travaille notamment sur les mouvements féministes noirs et postcoloniaux. Voir tous ses articles

Parler : les voix de l’émancipation

Retrou­vez cet arti­cle dans La Défer­lante n°5 Par­ler (mars 2022)


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