Le shadow ban, « bannissement silencieux », est initialement une technique de modération utilisée par les forums internet. Elle limite la visibilité des posts d’un·e utilisateur·ice sans l’en informer. Aujourd’hui, alors que la modération des réseaux sociaux est à la fois automatisée (par des intelligences artificielles) et participative (les community notes), nombre d’utilisateur·ices estiment être victimes de blocages abusifs. Dans son essai Féminisme et réseaux sociaux. (Hors d’atteinte, 2022), la militante féministe Elvire Duvelle-Charles a montré que la pratique du shadow ban ciblait avant tout les comptes proposant des contenus progressistes tels que le féminisme ou l’antiracisme. Elle touche aussi massivement les contenus LGBTQIA+.
Bien souvent, la pratique du shadow ban précède des mesures plus drastiques qui vont jusqu’au bannissement total. Dans son article « Réseaux sociaux, armes de désinformation massive » (La Déferlante no 19), la journaliste Mathilde Saliou rapporte par exemple comment la militante Mélusine a vu son compte Twitter suspendu, en 2021, après avoir posté la phrase « Comment fait-on pour que les hommes cessent de violer ? », en réaction aux mouvements MeToo, MeTooGay et MeTooInceste. Pour éviter les suspensions ou les shadow bans, les activistes ou créateur·ices de contenu détournent les algorithmes et règles implicites des plateformes, en remplaçant par exemple des mots comme « viol » par une pastille de couleur violette afin que les posts ne perdent pas en visibilité.
Pour aller plus loin
- Elvire Duvelle-Charles, Féminisme et réseaux sociaux. Une histoire d’amour et de haine, Hors d’atteinte, 2022, 216 pages.
- Mouv’, « Peut-on parler de shadowban sur Instagram concernant les sujets sur la Palestine ? », podcast Quinze, 16 octobre 2023, 15 minutes.


