Le terme « prosexe » est apparu pour la première fois en 1981, sous la plume de la journaliste et militante féministe Ellen Willis dans l’hebdomadaire américain Village Voice. Dans cet article, elle appelle à une approche féministe du désir féminin, délesté de tout puritanisme. Le « féminisme prosexe » désigne le mouvement apparu à la même époque aux États-Unis, qui milite pour une réappropriation des questions sexuelles par les femmes. S’autodésignant également comme « sex-radical feminists » (« féministes radicales sur la sexualité »), « anti-anti-pornographie » ou se réclamant d’un « féminisme sexpositif », ses adeptes luttaient notamment contre l’interdiction de la pornographie ou de la prostitution. Par opposition, les féministes prônant l’encadrement de la pornographie et l’abolition de la prostitution sont parfois désignées comme « féministes antisexe » – une appellation qu’elles rejettent.
Au cours des années 1980, aux États-Unis, les débats politiques qui voient s’opposer ces deux courants théoriques ont donné lieu à ce que l’on appelle aujourd’hui a posteriori les Sex Wars. Dans l’article « Sex Wars – Quand les féministes se déchiraient sur la pornographie » (La Déferlante, mai 2025), la journaliste Marie Kirschen explique que ces antagonismes se sont cristallisés lors de la neuvième Scholar and Feminist Conference organisée au Barnard College à New York en 1982.
Dans la plupart des pays occidentaux, on retrouve aujourd’hui des lignes de fracture similaires, notamment au sujet du travail du sexe. Les débats autour de la loi adoptée le 13 avril 2016, dite de « lutte contre le système prostitutionnel », ont opposé, d’une part, les féministes abolitionnistes considérant que la prostitution est une violence patriarcale à combattre à tout prix par la pénalisation des clients et l’accompagnement à la sortie de la prostitution, et, d’autre part, des féministes estimant que le travail du sexe est un métier comme un autre et que les femmes ou les minorités de genre doivent être libres de l’exercer.
Pour aller plus loin
Lilian Mathieu, La Condition prostituée, Textuel, coll. « La Discorde », septembre 2007.
Amia Srinivasan, Le Droit au sexe. Le Féminisme au vingt-et-unième siècle, traduction Noémie Grunenwald, PUF, 2002 ; réédition Points, 2024.