Dans un rapport des Nations unies publié en 2020, l’experte Lucina Di Meco définit la désinformation genrée (gendered disinformation en anglais) comme la « diffusion d’informations et d’images trompeuses ou déformées à l’encontre de dirigeantes politiques, de journalistes et de personnalités publiques féminines, suivant des scénarios qui s’appuient souvent sur la misogynie et des stéréotypes sexistes ». Véhiculant des clichés du type les femmes seraient plus faibles que les hommes ou incapables d’occuper des postes importants –, la désinformation genrée est une stratégie destinée à caricaturer et silencier les femmes et les minorités de genre. Amplifiée par le fonctionnement des algorithmes des réseaux sociaux qui donnent davantage de visibilité aux propos insultants ou provocateurs, elle croise d’autres discriminations : les femmes noires sont ainsi plus souvent exposées à des campagnes de désinformation relevant de la misogynoir.
Cette désinformation genrée est en grande partie le fait d’influenceurs masculinistes. Andrew Tate, suivi par plus 10 millions d’abonné·es sur X, participe ainsi à la diffusion de stéréotypes alimentant la désinformation genrée, rapporte la journaliste Mathilde Saliou dans son article « Réseaux sociaux, armes de désinformation massive » (La Déferlante no 19). Sur X, il a par exemple affirmé « qu’une femme aurait son ADN transformé par le sperme des hommes avec lesquels elles ont des rapports sexuels », explique Ketsia Mutombo, cofondatrice du collectif Féministes contre le cyberharcèlement. Les communautés « tradwives » (pour traditional wife, littéralement « épouse traditionnelle »), de plus en plus populaires sur les réseaux sociaux, relaient également des discours essentialisants à travers la promotion de la femme au foyer.
Pour aller plus loin
- ODIL Le podcast, « La désinformation genrée », saison 2, épisode 6, 10 juillet 2023, 30 minutes.
- Élie Hervé, Transphobia. Enquête sur la désinformation et les discriminations transphobes, Solar, 2025, 304 pages.

