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En Italie, le combat des mères lesbiennes devant la justice

Depuis le 28 novem­bre et jusqu’au 22 décem­bre 2023, un procès hors norme se tient devant le tri­bunal de Padoue dans le nord de la pénin­sule : celui de 33 mères les­bi­ennes qui attaque­nt l’État pour ne pas se voir effacées des actes de nais­sance de leurs enfants. Dans un con­texte de croisade anti-LGBT+ de l’extrême droite au pou­voir, cette résis­tance pour­rait faire date.
Publié le 08/12/2023

Modifié le 16/01/2025

À Padoue, le 22 avril 2023, lors de la manifestation organisée à l'initiative de l'association LGBT+ Famiglie Arcobaleno. Les manifestant·es tiennent un stylo pour symboliser le droit des mères sociales à être reconnues officiellement et donc à signer les actes administratifs et médicaux. Crédit Photo : Matilde Grasso.
À Padoue, le 22 avril 2023, lors de la man­i­fes­ta­tion organ­isée à l’ini­tia­tive de l’as­so­ci­a­tion LGBT+ Famiglie Arcobaleno. Les manifestant·es tien­nent un sty­lo pour sym­bol­is­er le droit des mères sociales à être recon­nues offi­cielle­ment et donc à sign­er les actes admin­is­trat­ifs et médi­caux. Crédit Pho­to : Matilde Gras­so.

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C’est un anniver­saire par­ti­c­uli­er pour Ettore. Mar­di 28 novem­bre 2023, jour de ses 5 ans, ses par­ents, Cate­ri­na Minozzi et Anna Girelli, ont posé une journée de con­gé. Elles sont atten­dues au tri­bunal de Padoue (Vénétie). Les deux mères com­para­is­sent pour que Cate­ri­na, qui n’a pas porté l’enfant, ne soit pas rayée de l’acte de nais­sance de leur fils.

Une audi­ence de six min­utes, face à des mag­is­trats « glacials », racon­te Anna, sous le choc. « Ils ont mécanique­ment répété la demande de la pro­cureure d’effacer la mère inten­tion­nelle, c’est-à-dire celle n’ayant pas accouché. Notre avo­cat a eu une minute pour plaider et j’ai eu quelques sec­on­des pour ajouter que je trou­vais cela con­ster­nant que 40 per­son­nes soient mobil­isées aujourd’hui, gaspillant du temps et des ressources, vu les prob­lèmes aux­quels doit faire face l’Italie actuelle­ment. »À la fin de la com­paru­tion, leur avo­cat a rap­pelé qu’il avait demandé à plusieurs repris­es un regroupe­ment des audi­ences pour cette famille égale­ment con­vo­quée une semaine plus tard, cette fois-ci pour l’acte de nais­sance de leur fille de 22 mois. « La prési­dente a haussé les épaules, donc on a posé un deux­ième jour de con­gé. »

Comme elles, 66 mères com­para­îtront devant ce tri­bunal, jusqu’au 22 décem­bre 2023, pour faire val­oir leurs droits. Leur com­bat a com­mencé en juin dernier, lorsque le par­quet de Padoue a con­testé les actes de nais­sance de tous les enfants de cou­ples les­bi­ens enreg­istrés par la Ville depuis 2017. Une déci­sion qui fai­sait suite à une cir­cu­laire du min­istère de l’Intérieur de jan­vi­er 2023, ordon­nant aux mairies de ne plus inscrire le deux­ième par­ent sur les actes de nais­sance des familles homo­parentales. Seules les mères ayant accouché peu­vent désor­mais être recon­nues. Con­crète­ment, pour un cou­ple, cela sig­ni­fie que celle qui n’a pas accouché devra deman­der l’autorisation de sa con­jointe pour aller chercher son enfant à l’école, l’emmener chez le médecin ou à l’hôpital… Et pire, en cas de décès de la mère ayant porté l’enfant, celui-ci serait con­sid­éré comme orphe­lin. Face à cette mesure claire­ment hos­tile à leurs droits et à ceux de leurs enfants, les 33 familles con­cernées, appuyées par des asso­ci­a­tions, se sont mobil­isées et ont déposé un recours en jus­tice.

Fin juil­let, quand Anna a reçu le cour­ri­er de con­vo­ca­tion, elle était presque soulagée. « Cela fai­sait des semaines qu’on savait que ça allait arriv­er, je n’en pou­vais plus de sur­sauter dès que j’entendais l’interphone », pour­suit la jeune femme de 36 ans. Au-delà de la vio­lence de la let­tre, dans laque­lle il est écrit « qu’au vu du jeune âge de l’enfant, une mod­i­fi­ca­tion de son acte de nais­sance n’impacterait pas son iden­tité », Anna témoigne des con­séquences délétères sur sa san­té. « J’ai com­mencé à avoir des cram­pes d’estomac et des col­iques comme je n’en avais jamais eu dans ma vie. J’ai fait plein d’examens pour qu’on m’explique que c’était sim­ple­ment lié au stress. »


On se bat surtout pour celles et ceux qui vien­dront après nous


Mal­gré les maux de ven­tre et les insom­nies qui envahissent leur quo­ti­di­en, Anna et Cate­ri­na sont déter­minées à se bat­tre. Tout comme la mère de Cate­ri­na, Anna Dami­na­to, qui n’envisage pas un seul instant être des­ti­tuée de ses droits de grand-mère. « Je vais les chercher à la crèche, on joue ensem­ble, je les aime plus que tout », racon­te cette Ital­i­enne de 70 ans. Elle déplore que toute cette mas­ca­rade judi­ci­aire soit faite au détri­ment de l’intérêt des enfants. « Ce que je trou­ve le plus cru­el et inhu­main dans cette his­toire, c’est que ce sont les enfants les pre­mières vic­times de ces procé­dures, c’est à eux qu’on va retir­er un par­ent, pour rien. »

En Ital­ie, la pro­créa­tion médi­cale­ment assistée (PMA) est autorisée unique­ment aux cou­ples hétéro­sex­uels mar­iés depuis au moins trois ans. Comme la PMA est inter­dite aux cou­ples les­bi­ens sur le ter­ri­toire nation­al, aucune loi ne garan­tit la recon­nais­sance de ces enfants. Jusqu’ici, les mairies accep­taient sou­vent d’inscrire le nom de la deux­ième mère sur les actes de nais­sance, notam­ment à Padoue. Mais le gou­verne­ment d’extrême droite de Gior­gia Mel­oni s’est emparé de ce vide juridique pour lim­iter les droits des per­son­nes LGBT+. « Mal­heureuse­ment, le gou­verne­ment actuel veut seule­ment punir. C’est un gou­verne­ment répres­sif », pour­suit Anna Dami­na­to, qui fait allu­sion au pro­jet de loi pro­posé par Fratel­li d’Italia (le par­ti au pou­voir), et adop­té cet été au Par­lement, de faire de la ges­ta­tion pour autrui un délit uni­versel. « On est tou­jours en retard en Ital­ie, mais je ne pen­sais pas qu’un jour on reviendrait en arrière », con­clut-elle.

L’Italie très en retard sur les droits des personnes LGBT+

Une inquié­tude que partage Chiara Cuc­cheri, prési­dente de l’Arcigay, une asso­ci­a­tion de défense des droits LGBT+ de Padoue : « En plus des attaques con­tre notre com­mu­nauté, ils empêchent tout pro­grès en matière de droits, alors que l’Italie est extrême­ment en retard sur ces ques­tions. » Aucune loi ne con­damne l’homophobie, les cou­ples de même sexe n’ont pas le droit de se mari­er (l’union civile est autorisée depuis 2016) ni d’adopter, et n’ont pas accès à la PMA. « Les dia­tribes de Mel­oni sur la famille naturelle “un papa et une maman”, le “lob­by LGBT” qu’il faudrait com­bat­tre… Cela légitime la haine et la dis­crim­i­na­tion envers les per­son­nes LGBT+ », pour­suit Chiara Cuc­cheri. Selon le classe­ment annuel de la sit­u­a­tion des droits humains des per­son­nes LGBT+ en Europe réal­isé par l’Ilga-Europe, la pénin­sule est 34ᵉ sur 49 pays. Pire, si l’on prend la caté­gorie « crime et dis­cours de haine », l’Italie est en dernière posi­tion, ex æquo avec la Pologne et la Russie.

Anna Girelli est résignée : « On a les épaules larges, on encais­sera les coups… On se bat surtout pour celles et ceux qui vien­dront après nous. Mais hon­nête­ment, si j’avais dix ans de moins et que je réfléchis­sais à fonder une famille, je ne le ferai pas en Ital­ie. »

Les audi­ences devant le tri­bunal de Padoue se tien­dront chaque mar­di. Les déci­sions seront ren­dues en jan­vi­er.

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Rêver : la révolte des imaginaires

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