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Donald Trump ou le triomphe des hommes blancs

Au terme d’une cam­pagne féroce, le can­di­dat répub­li­cain Don­ald Trump s’est imposé, mer­cre­di 6 novem­bre, comme le vain­queur de l’élection prési­den­tielle aux États-Unis. Pour La Défer­lante, Char­lotte Reco­quil­lon, géo­graphe spé­cial­iste des États-Unis revient sur cette élec­tion où les ques­tions de race et de genre n’ont cessé d’être sur le devant de la scène.
Publié le 08/11/2024

Modifié le 16/01/2025

Le 6 novembre, sur le campus de l’université Howard à Washington, des citoyen·nes réagissaient au discours de Kamala Harris reconnaissant sa défaite. Crédit : Brendan SMIALOWSKI / AFP
Le 6 novem­bre, sur le cam­pus de l’université Howard à Wash­ing­ton, des citoyen·nes réagis­saient au dis­cours de Kamala Har­ris recon­nais­sant sa défaite. Crédit : Bren­dan SMIALOWSKI / AFP

Retrou­vez le numéro 16 de la revue sur le thème « S’habiller », paru en novem­bre 2024. Con­sul­tez le som­maire.

En début de semaine, le camp trump­iste a non seule­ment rem­porté la Mai­son Blanche mais égale­ment le Sénat et prob­a­ble­ment la Cham­bre des représen­tants.

Ces vic­toires, ajoutées à la main­mise des répub­li­cains sur la Cour suprême, laisse le champ libre à Don­ald Trump pour met­tre en place son pro­jet 2025, qui est un pro­gramme d’extrême droite : défense des fron­tières, retour à un mod­èle de famille tra­di­tion­nel, déman­tèle­ment de l’État. Son élec­tion met en dan­ger la vie et les droits des per­son­nes racisées – en par­ti­c­uli­er les per­son­nes immi­grées entrées illé­gale­ment sur le ter­ri­toire, mais aus­si des per­son­nes trans et, plus glob­ale­ment, des femmes.

Jour­nal­iste et chercheuse à l’Institut français de géopoli­tique, spé­cial­iste de la com­mu­nauté noire aux États-Unis, Char­lotte Reco­quil­lon revient sur les ressorts de ce suc­cès.

 

Qu’implique la vic­toire de Don­ald Trump pour les femmes, les per­son­nes LGBT+, racisées et plus large­ment pour toutes les minorités aux États-Unis ?

C’est une cat­a­stro­phe. Ces résul­tats con­fir­ment une lame de fond : le vote con­ser­va­teur et d’extrême droite aux États-Unis s’enracine dans des crises économiques, san­i­taires et iden­ti­taires pro­fondes. Déjà, lors de la prési­den­tielle de 2020, alors même que Trump l’a finale­ment per­due, la stratégie de mobil­i­sa­tion der­rière le slo­gan « Make Amer­i­ca Great Again » (Ren­dez sa grandeur à l’Amérique) qui con­sis­tait à agiter les peurs et à jouer sur les men­aces extérieures avait fonc­tion­né et per­mis de gag­n­er plus de 10 mil­lions de votes par rap­port à 2016. Car tout cela fonc­tionne très bien avec les hommes blancs qui, selon les sondages à la sor­tie des urnes, ont voté Trump à 60 %.

Kamala Har­ris, la can­di­date démoc­rate, a fait du droit à l’avortement le piv­ot de sa cam­pagne. En par­al­lèle, elle a mis en avant une féminité décom­plexée. Quel rôle les ques­tions de genre ont-elles joué dans cette élec­tion ?

L’annulation en 2022, sous l’administration Biden, de l’arrêt Roe vs Wade qui garan­tis­sait le droit à l’avortement dans l’ensemble des États-Unis, découle du pre­mier man­dat de Don­ald Trump. Et mal­gré l’existence d’une frange anti-avorte­ment par­mi les conservateur·ices, la majorité des femmes répub­li­caines reste attaché au droit des per­son­nes à dis­pos­er de leur corps. Ce sont ces élec­tri­ces que les démoc­rates ont ten­té de con­ver­tir pen­dant la cam­pagne.

Mais il faut rap­pel­er que les per­son­nes qui souf­frent de l’interdiction d’avorter sont prin­ci­pale­ment aujourd’hui des femmes noires et pau­vres, qui vivent dans d’anciens États esclavagistes du Sud, à l’intersection de plusieurs dis­crim­i­na­tions. Comme lors des précé­dents scruti­ns, ces femmes ont don­né leur sou­tien au Par­ti démoc­rate. À l’échelle du pays, les Africaines-Améri­caines sont 91 % à avoir voté pour Kamala Har­ris.

Des arti­cles de presse ont aus­si lais­sé enten­dre que beau­coup d’hommes noirs mais aus­si des lati­nos, avaient ral­lié Trump…

Ces sondages de sor­tie des urnes mon­trent effec­tive­ment que le vote démoc­rate dans la com­mu­nauté africaine-améri­caine a bais­sé de 11 points pour les hommes et de 5 points pour les femmes entre 2016 et 2024.

Un nom­bre non nég­lige­able d’hommes noirs (21 %) sem­ble avoir voté pour Trump. Les démoc­rates ont con­sid­éré à tort qu’il s’agissait d’un élec­torat cap­tif et homogène, sans véri­ta­ble­ment pro­pos­er de mesures qui répon­dent à leurs reven­di­ca­tions (je pense notam­ment à la lutte con­tre les vio­lences poli­cières). Cela a créé de la décep­tion et de l’attrait pour Trump.


Mais focalis­er sur cette par­tie de l’électorat pose plusieurs prob­lèmes. D’abord, les désign­er comme respon­s­ables de la défaite des démoc­rates, c’est en faire des boucs émis­saires alors que, par exem­ple, les femmes blanch­es aus­si ont voté pour Trump à 53 %. Cela invis­i­bilise égale­ment le fait qu’au sein de cette com­mu­nauté, la part des indécis·es ou de celles et ceux qui votent pour les candidat·es indépendant·es a aug­men­té. Mais égale­ment qu’à côté de cela, une écras­ante majorité des élec­tri­ces et électeurs africains-améri­cains reste démoc­rate : 85 %, con­tre 41 % de l’électorat blanc !


« Ce n’est défini­tive­ment pas de Kamala Har­ris ni de son par­ti que vien­dra la résis­tance face à Trump »


Pour­tant, la ques­tion raciale a bien été présente dans la cam­pagne de Trump ?

Depuis une quin­zaine d’années, à la faveur du mou­ve­ment Black Lives Mat­ter, on assiste à une résur­gence de ces ques­tions dans le débat pub­lic aux États-Unis. Les sail­lies racistes de Don­ald Trump sont régulières (en 2015 il dis­ait des Mex­i­cains qu’ils étaient des vio­leurs ; en 2018, il surnom­mait « Poc­a­hon­tas » une séna­trice démoc­rate qui revendi­quait des orig­ines chero­kees), et la mise en avant de son iden­tité poli­tique blanche n’est pas une nou­veauté (en 2020, il partageait sur Twit­ter une vidéo mon­trant des opposants au mou­ve­ment Black Lives Mat­ter hurlant « White pow­er »).

C’était déjà une ten­dance de fond chez les con­ser­va­teurs du Tea Par­ty, un mou­ve­ment d’inspiration lib­er­tari­enne né au début de la prési­dence Oba­ma qui protes­tait con­tre l’augmentation des dépens­es publiques, notam­ment con­tre le sys­tème de pro­tec­tion sociale.

Don­ald Trump a con­tin­ué à tenir des pro­pos racistes, y com­pris à l’encontre de sa rivale, Kamala Har­ris, dont il a mis en doute l’identité raciale. Avant même sa can­di­da­ture offi­cielle, en juil­let 2024, le genre de la vice-prési­dente était aus­si un angle d’attaque pour Don­ald Trump. Il l’a à plusieurs repris­es qual­i­fiée de « stu­pide », « avec un faible QI », « paresseuse » et « folle »

Dans quelle mesure le bilan du man­dat Biden-Har­ris explique-t-il aus­si la défaite de la can­di­date démoc­rate ?

Lors de la prési­den­tielle de 2020, en pleine affaire George Floyd, les militant·es du mou­ve­ment Black Lives Mat­ter avaient soutenu le Par­ti démoc­rate de façon mas­sive dans l’espoir de voir pro­gress­er la jus­tice sociale et raciale. Joe Biden et Kamala Har­ris promet­taient à l’époque la fin des injus­tices struc­turelles.

Qua­tre ans plus tard, leur bilan est cat­a­strophique : le nom­bre de per­son­nes tuées par la police n’a jamais été aus­si élevé, le bud­get des forces de l’ordre a explosé, les pro­jets de con­struc­tion de cen­tres d’entraînement pour policiers en plein cœur des villes se mul­ti­plient, et l’abolition de la peine de mort a été retirée du pro­gramme démoc­rate. Certes, Derek Chau­vin, le polici­er respon­s­able de la mort de George Floyd a été con­damné et c’est his­torique. Mais cela n’a pas suf­fi à gom­mer l’image d’un man­dat très favor­able à la police.

Par ailleurs, même si elle se dit choquée par le sort des civil·es palestinien·nes, le sou­tien de Kamala Har­ris à Israël dans sa guerre con­tre Gaza et le Liban a sidéré une grande par­tie de la pop­u­la­tion améri­caine, notam­ment les jeunes, les étudiant·es, les Arabes américain·es ou encore de nom­breux juifs et juives.

En fin de compte, Joe Biden et Kamala Har­ris ont don­né l’image de dirigeant·es indifférent·es aux vio­lences subies par les per­son­nes noires et racisées. Ce n’est défini­tive­ment pas de Kamala Har­ris ni de son par­ti que vien­dra la résis­tance face à Trump. L’écosystème du ter­rain, les militant·es, les organ­i­sa­tions de défense des droits civiques et les héritages du mou­ve­ment Black Lives Mat­ter seront prob­a­ble­ment les seuls à tenir un vrai rôle d’opposition.

Par Anne-Lau­re Pineau

Jour­nal­iste indépen­dante, mem­bre du col­lec­tif You­press et du comité édi­to­r­i­al de La Défer­lante. Voir tous ses arti­cles.


Pour aller plus loin : Char­lotte Reco­quil­lon, Harlem. Une his­toire de la gen­tri­fi­ca­tion, édi­tions de la Mai­son des sci­ences de l’homme, 2024.

Anne-Laure Pineau

Journaliste pigiste indépendante, membre du collectif Youpress et de l’AJL (Association des journalistes lesbiennes, gay, bi·es, trans et intersexes). Pour ce numéro, elle a écrit le scénario de la BD sur Diana Sacayan. Voir tous ses articles

S’habiller, en découdre avec les injonctions

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