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Dans les vignes, la colère gronde

Publié le 30/07/2021

Modifié le 16/01/2025

Jusqu’à récemment, les femmes du vin étaient cantonnées à des rôles de subalternes. Désormais, vigneronnes, œnologues, sommelières et ouvrières viticoles s’imposent dans la filière. Mais cette féminisation n’empêche pas une persistance de propos sexistes et de violences sexuelles. Depuis peu, la dénonciation de ces discriminations s’organise et monte en puissance.

L’événement était suff­isam­ment excep­tion­nel pour faire les grands titres des revues spé­cial­isées, jusqu’à se gliss­er dans les jour­naux télévisés. Le 11 novem­bre 2018, un an après le début du mou­ve­ment #MeToo, Pas­ca­line Lep­elti­er est sacrée « meilleur som­me­li­er de France » (sic). Depuis sa créa­tion en 1961, seuls des hommes avaient reçu ce prix. Pour­tant, depuis une dizaine d’années, les som­melières sont majori­taires dans les écoles, où elles com­posent plus de 50 % des effec­tifs. Une fois sor­ties des for­ma­tions, elles ne représen­tent plus qu’un quart des professionnel·les en exer­ci­ce. Cette éva­po­ra­tion s’expliquerait, selon Philippe Fau­re-Brac, prési­dent de l’Union de la som­mel­lerie française, par « des ques­tions de mater­nité ». « [Elles] ne restent pas néces­saire­ment dans le méti­er et vont plutôt tra­vailler dans le réseau des cav­istes, voire en œno­tourisme », croit savoir l’ancien cham­pi­on du monde de som­mel­lerie.

La lec­ture des expéri­ences partagées sur le compte Insta­gram Paye ton pinard per­met d’avancer d’autres expli­ca­tions. Du sex­isme ordi­naire aux agres­sions sex­uelles les plus graves, les femmes qui s’y con­fient décrivent une car­rière jalon­née de dis­crim­i­na­tions. Isabelle Per­raud qui en est l’animatrice depuis sep­tem­bre 2020 reçoit trois à qua­tre témoignages par semaine. Longtemps restée anonyme pour préserv­er sa lib­erté de ton, elle a accep­té de racon­ter la genèse de ce pro­jet à La Défer­lante. Pro­duc­trice de vin con­ver­tie au bio en 1998, cette vigneronne quin­quagé­naire nous reçoit chez elle, à Vauxre­nard, dans le Beau­jo­lais. Vol­u­bile, elle com­mence l’entretien avec sa petite-fille sur les genoux, le pour­suit au déje­uner, avec deux de ses enfants et son mari, Bruno, et le ter­mine à 100 km/h sur les routes sin­ueuses du Beau­jo­lais.

« Toutes les his­toires sont sim­i­laires, les femmes vivent les mêmes trau­ma­tismes. Je veux que ça s’arrête, je n’en peux plus », dit-elle. Cette pro­fes­sion­nelle recon­nue s’était déjà engagée publique­ment pour une meilleure représen­ta­tiv­ité des vitic­ul­tri­ces, mais, depuis plusieurs années, son exis­tence a pris un nou­veau tour­nant. En 2016, sa fille aînée est vic­time d’un viol com­mis par un homme proche du milieu viti­cole. Dès le dépôt de plainte, Isabelle Per­raud perçoit à quel point le sex­isme ordi­naire et la cul­ture du viol imprèg­nent les réac­tions de son entourage. « Mais qu’est-ce qu’elle fai­sait là-bas ? », entend-elle. « Après tout, elle a peut-être joui pen­dant le viol », va jusqu’à penser tout haut sa psy­cho­logue. L’avocat Éric Morain, défenseur de plusieurs professionnel·les du vin nature, prend le dossier en charge. Après un non-lieu, le pro­cureur a demandé en appel le ren­voi de l’affaire aux assis­es, sur lequel les juges devaient se pronon­cer le 31 août.

Les vio­lences sex­uelles, « cela arrive dans tous les milieux », lui répon­dent par­fois ses inter­locu­teurs lorsqu’elle s’insurge. Qu’importe : c’est dans le sien qu’Isabelle Per­raud a le devoir d’agir, estime-t-elle. Elle veut per­me­t­tre à d’autres femmes d’éviter le par­cours douloureux et soli­taire qu’elles ont tra­ver­sé, sa fille et elle. Le compte Insta­gram PayeTon­Pinard per­met de met­tre des mots sur un vécu com­mun, de le con­sci­en­tis­er. Devant l’afflux de réc­its qui lui parvi­en­nent, la vigneronne a égale­ment lancé en juin 2021 un site Inter­net (https://survivantes.umso.co), pour cen­tralis­er les alertes des vic­times d’agression, et leur per­me­t­tre de se regrouper en vue d’une plainte con­certée si un agresseur com­mun est iden­ti­fié. La plate­forme per­met égale­ment d’obtenir un pre­mier con­seil juridique d’Éric Morain, ain­si qu’une liste de psy­cho­logues spécialisé·es dans les vio­lences sex­uelles.

Le sex­isme n’épargne pas celles qui réus­sis­sent à se faire une place dans le milieu viti­cole. La cav­iste et autrice (1) San­drine Goey­vaerts est recon­nue pour son exper­tise et son engage­ment fémin­iste. En 2014, elle a reçu pour son blog viti­cole La Pinar­dothèque le « Prix de l’homme de l’année » (sic) décerné tous les ans par la Revue des vins de France. Elle dénonce l’appellation du prix et fait, depuis, l’objet d’attaques sex­istes régulières. En 2017, elle a fondé l’association Women Do Wine, qui œuvre pour la vis­i­bil­i­sa­tion des ini­tia­tives féminines dans le vin. À chaque incur­sion fémin­iste, « cer­tains hommes du vin réagis­sent avec plus de sex­isme et de malveil­lance, ils ont l’impression que l’on va leur con­fis­quer quelque chose », analyse-t-elle.

UN VIEUX MONDE QUI SE CABRE

Grossiste renom­mée en vins nature, autrice de ban­des dess­inées (2), Fleur Godart se dit « tout le temps » con­fron­tée à un dén­i­gre­ment de ses com­pé­tences. Par­fois même au sein de l’entreprise qu’elle dirige : « Au bout de trois ans de col­lab­o­ra­tion, un jeune employé m’a expliqué que je n’avais aucune légitim­ité, que mes bouquins étaient un ramas­sis d’anecdotes sans fond. »

San­drine Goey­vaerts et Fleur Godart ont déposé plainte après la pub­li­ca­tion d’une car­i­ca­ture sex­iste dans la revue trimestrielle spé­cial­isée En Mag­num, fondée en 2015 par Michel Bet­tane et Thier­ry Desseauve, un duo de cri­tiques qui font et défont les répu­ta­tions dans le vin. En novem­bre 2020, le titre fait paraître un dessin représen­tant une agente de vins jouant sur son physique pour ven­dre son vin à un cav­iste bedonnant. Fleur Godart, agente de pro­duc­teurs de vins nature, s’estime visée. Son entre­prise se nomme Vins et Volailles, tan­dis que l’agente car­i­caturée tra­vaille pour une boîte imag­i­naire, Poulet-Rau­tiz. Elle voit dans cette car­i­ca­ture le symp­tôme d’un « vieux monde qui se cabre » et porte plainte pour injure publique en rai­son de son sexe. Le 8 juin, Thier­ry Desseauve, le directeur de la pub­li­ca­tion d’En Mag­num, a été relaxé. Selon le tri­bunal, il n’était pas pos­si­ble d’identifier Fleur Godart sur le dessin incrim­iné, mais le délibéré du juge­ment rap­pelle tout de même que le pro­cureur l’avait trou­vé « claire­ment sex­iste ». « Ce n’est pas une con­damna­tion mais une leçon, avec un goût de “n’y revenez pas” », com­mente Éric Morain, avo­cat de Fleur Godart.

Après avoir dénon­cé le sex­isme de la car­i­ca­ture, San­drine Goey­vaerts a quant à elle subi un raid numérique, prin­ci­pale­ment sur Face­book. Com­men­taires insul­tants, men­aces, vol puis pub­li­ca­tion de pho­tos intimes… Elle dépose plainte pour injures publiques sex­istes con­tre un blogueur vini­cole et culi­naire, mais l’homme con­tin­ue de « dévers­er sa bile », selon l’avocat Éric Morain. « On est face à des femmes qui désor­mais s’imposent et l’ouvrent, ce qui n’était pas le cas aupar­a­vant. Elles affir­ment qu’elles ne se lais­seront plus faire et elles ont une caisse de réso­nance. Et ça, cer­tains hommes de ce milieu du vin ne le sup­por­t­ent pas », résume-t-il. L’affaire sera plaidée le 24 novem­bre 2022, une date tar­dive due à l’encombrement post-coro­na- virus de la cham­bre de la Presse.

Mais la dénon­ci­a­tion reste l’apanage d’une poignée de femmes du milieu viti­cole. : « Je suis com­plète­ment indépen­dante : de nom­breuses femmes salariées n’ont pas cette chance », recon­naît Fleur Godart. Pour cette enquête, nous avons recueil­li de nom­breux témoignages rela­tant de graves vio­lences sex­istes, de l’injure au viol, mais tou­jours sous le sceau de l’anonymat, car les vic­times red­outent la mise au ban. À rai­son.

VICTIMES… ET PLACARDISÉES

La som­melière Emma Bent­ley, 34 ans, instal­lée en Ital­ie où elle s’est spé­cial­isée dans l’import-export de vins nature, en a fait l’expérience après avoir rap­porté à sa hiérar­chie la ten­ta­tive de viol dont elle a été vic­time à 23 ans. Le 6 août 2012, son supérieur Marc Sibard, respon­s­able des célèbres Caves Augé (groupe Lavinia) et présen­té comme l’un des meilleurs cav­istes de Paris, l’invite à dîn­er à son domi­cile pour dis­cuter de l’avenir de l’entreprise. Dans le réc­it qu’elle livre à La Défer­lante, elle se sou­vient s’être endormie sur son canapé après deux ver­res de vin. « C’est très bizarre, car je ne m’endors jamais chez les gens. Peut-être m’a‑t-il droguée, don­né un som­nifère, en tout cas ce n’est pas nor­mal, se remé­more-t-elle. C’est sa barbe sous ma culotte qui m’a réveil­lée. Il avait dégrafé mon sou­tien-gorge et soulevé ma jupe. Je me suis enfuie à toute vitesse », témoigne-t-elle aujourd’hui. Dans sa plainte déposée quelques semaines plus tard, Emma Bent­ley affirme avoir avisé sa hiérar­chie de ces faits sans qu’aucune mesure ne soit inten­tée, et avoir été con­trainte de démis­sion­ner le 31 octo­bre 2012. Le 6 juil­let 2017 au tri­bunal de grande instance de Paris, Marc Sibard fait face à Emma Bent­ley et à deux autres plaig­nantes, anci­ennes col­lègues, qui l’accusent de har­cèle­ment sex­uel et moral. Le juge­ment con­sulté par La Défer­lante le déclare coupable d’agression sex­uelle envers Emma Bent­ley, de har­cèle­ment sex­uel envers les trois femmes et de har­cèle­ment moral envers l’une d’entre elles. Con­damné à un an de prison avec sur­sis, il n’interjette pas appel. Sa peine est assor­tie d’une mise à l’épreuve de 24 mois et d’une oblig­a­tion de soins. Mais Emma Bent­ley s’est vue for­cée de quit­ter la France: « C’était devenu impos­si­ble pour moi d’y tra­vailler. Je n’étais pas la bien­v­enue dans cer­tains domaines. » Son cas n’est pas isolé: en 2013, trois salariées des maisons de cham­pagne Krug et Veuve Cliquot por­tent plainte pour har­cèle­ment sex­uel con­tre un de leurs col­lègues. Le tri­bunal de Reims con­firme les faits en pre­mière instance en 2015 et en appel en 2016, mais elles sont désor­mais exclues de leur milieu pro­fes­sion­nel ou « mis­es au plac­ard », selon Medi­a­part (3).

La fil­ière sem­ble prompte à glo­ri­fi­er sa fémin­i­sa­tion, moins à remet­tre en ques­tion les dis­crim­i­na­tions dont souf­frent encore les femmes. Une frange du milieu du vin fait car­ré­ment bloc, refu­sant de recon­naître la grav­ité des agres­sions. Mal­gré une mise à pied du groupe Lavinia au lende­main de sa con­damna­tion, Marc Sibard con­tin­ue de peser dans le milieu, d’après des témoignages de professionnel·les du vin que nous avons recueil­lis. Les prob­lèmes sont sou­vent réglés « en interne » de l’aveu même de Laeti­tia Trouil­let-Mar­tin, respon­s­able de la sec­tion som­mel­lerie au lycée Albert-de-Mun à Paris. Dans son lycée, lorsqu’une élève l’alerte sur des faits de har­cèle­ment au cours de son appren­tis­sage, l’enseignante « prend ren­dez-vous avec le tuteur », « crève l’abcès », « essaie de trou­ver une solu­tion à l’amiable ». « Il faut savoir écouter la ver­sion des respon­s­ables, car des jeunes filles peu­vent jouer la mal­trai­tance et racon­ter des bobards», juge-t-elle, à rebours de plusieurs études sur les fauss­es accu­sa­tions (4).

PAYÉES MOITIÉ MOINS

Les dif­fi­cultés à pren­dre con­science de l’existence du sex­isme et de la banal­i­sa­tion de celui-ci ne sont pas des phénomènes pro­pres au milieu du vin. Mais l’histoire du tra­vail féminin dans les vignes per­met de mieux com­pren­dre la per­sis­tance des dis­crim­i­na­tions. Les femmes ont longtemps exer­cé dans l’ombre, explique l’économiste Jean-Louis Escud­i­er, chercheur en économie à l’Inra de Mont­pel­li­er (5). Exclues des chais sous pré­texte qu’elles pou­vaient faire tourn­er le vin ou pour­rir les fruits pen­dant leurs règles, elles étaient pour­tant omniprésentes dans les vignes, assignées à des tâch­es dif­fi­ciles et ingrates. 

Elles étaient aus­si tenues à l’écart de l’héritage de la vigne : la tra­di­tion veut que les domaines revi­en­nent au fils aîné de la famille. Elles ne sont ni pro­prié­taires, ni asso­ciées, ni salariées, mais épous­es, mères et filles. Il faut atten­dre l’année 2005 pour qu’une femme n’ait plus besoin de la sig­na­ture de son mari pour obtenir le statut de con­joint col­lab­o­ra­teur, qui ouvre des droits à une retraite et à une pro­tec­tion sociale.

Jusqu’à la fin de la Sec­onde Guerre mon­di­ale, tout le sys­tème économique du vin repose sur des dis­crim­i­na­tions de genre. La règle du demi-prix du tra­vail féminin s’applique : les femmes, en bas de la grille, touchent la moitié du salaire des hommes. « Elles n’étaient pas ouvrières, gref­fières ou tailleuses… elles étaient femmes », explique Jean-Louis Escud­i­er. Avec la clas­si­fi­ca­tion des salariés agri­coles mise en place en 1946, toutes les ouvrières agri­coles intè­grent la caté­gorie « jeunes gens de moins de 18 ans, femmes, ouvri­ers à capac­ité réduite », faisant per­dur­er l’assimilation entre tra­vail sub­al­terne et tra­vail féminin. La loi fixe alors leur rémunéra­tion à 80% du salaire de l’ouvrier agri­cole de base.

Et les travaux dits « féminins » ne sont pas les moins pénibles : les femmes ramas­saient les sar­ments, ralen­ties par les enfants dont elles devaient s’occuper, cueil­laient le raisin même en cas de pluie ou de fortes chaleurs, désherbaient en posi­tion cour­bée ou accroupie. La taille de la vigne, qui ne demande pour­tant pas une grande force mus­cu­laire, était réservée aux hommes. L’invention des machines agri­coles est venue réduire la péni­bil­ité du tra­vail. Mais le tracteur a été imag­iné pour un homme stan­dard, et les femmes n’avaient pas le droit de le con­duire pour, dis­ait-on, préserv­er leurs organes. Ces pra­tiques de ségré­ga­tion pro­fes­sion­nelle ont longtemps par­ticipé à l’absence de recon­nais­sance du tra­vail des femmes.

« Aujourd’hui, nanties de diplômes en rela­tion avec l’activité viti­cole à laque­lle elles aspirent, jeunes filles et femmes appa­rais­sent de moins en moins comme des intruses dans le milieu viti­cole », sou­tient l’économiste. Des pla­fonds de verre saut­ent, des femmes sont désor­mais recon­nues unanime­ment pour la qual­ité de leur tra­vail : Sylvie Augereau est à la tête d’un des plus grands salons de vin nature mon­di­al; Ophélie Neiman, jour­nal­iste au Monde, est une cri­tique de vin respec­tée, comme l’Américaine Alice Feir­ing, papesse du vin nature. Les exem­ples de suc­cès indi­vidu­els sont de plus en plus nom­breux. Mais la fémin­i­sa­tion opère dif­férem­ment selon les secteurs. « L’élevage du vin [étape de la fab­ri­ca­tion, après la vini­fi­ca­tion et avant l’assemblage] est le domaine où l’évolution est la plus sen­si­ble, note encore Jean- Louis Escud­i­er. On ren­con­tre aujourd’hui bien plus de femmes à la tête d’un chai que de femmes cheffes de cul­ture [respon­s­able de l’organisation du tra­vail et des récoltes] ou régis­seuses d’une grande exploita­tion. » Finale­ment, les réus­sites féminines mis­es en avant sont plutôt le fait d’exploitantes qui « pos­sè­dent un cap­i­tal », explique l’économiste, qui rap­pelle que « pour les femmes salariées d’exploitation agri­cole, c’est la dou­ble peine » : sous-payées, elles subis­sent elles aus­si le sex­isme de leurs pairs et sont peu mis­es en avant.

Lorsqu’une agres­sion ou un prob­lème sur­git, il existe peu de per­son­nes auprès de qui son­ner l’alarme: en France, les exploita­tions viti­coles sont sou­vent dépourvues de respon­s­ables des ressources humaines, les référent·es « har­cèle­ment » sont inexistant·es dans les entre­pris­es, et rares sont les sen­si­bil­i­sa­tions des salarié·es aux vio­lences sex­istes. En 2019, l’Organisation inter­na­tionale du tra­vail a élaboré une con­ven­tion con­tre les vio­lences et le har­cèle­ment dans le monde du tra­vail. Les États mem­bres devront adopter une lég­is­la­tion pre­scrivant aux employeurs de pren­dre des mesures appro­priées afin de prévenir ces vio­lences dans l’entreprise. La France serait sur le point de rat­i­fi­er cette con­ven­tion, mais plusieurs asso­ci­a­tions fémin­istes encour­a­gent le gou­verne­ment à pro­pos­er une loi réelle­ment con­traig­nante pour les employeurs. Les sanc­tions finan­cières pour­raient être une piste effi­cace, avec des amendes imposées aux entre­pris­es qui ne pro­tè­gent pas leurs employé·es des dis­crim­i­na­tions liées au genre, à l’orientation sex­uelle, à l’ethnie, à l’âge ou à la reli­gion. De tels dis­posi­tifs per­me­t­traient de ren­forcer la lutte con­tre le sex­isme d’un point de vue juridique.

Jusqu’à présent, en France, la préven­tion con­tre les vio­lences sex­istes reste majori­taire­ment prise en charge par les mil­i­tantes des asso­ci­a­tions fémin­istes. Des « sen­tinelles, cha­cune dans son milieu », c’est ain­si que la vigneronne Isabelle Per­raud définit son rôle. Au mois de mai, elle est inter­v­enue dans un lycée viti­cole auprès d’élèves de BTS. Une bouf­fée d’oxygène pour les trois filles de la classe, qui essuient depuis deux ans les remar­ques sex­istes de leurs cama­rades mas­culins. « Isabelle Per­raud a calmé tout le monde », racon­te Cylia, 21 ans. L’éducation reste la clé, avec les réseaux de sol­i­dar­ité. San­drine Goey­vaerts préfère par­ler de « soror­ité ». « Si on veut régler ces prob­lèmes de sex­isme, on doit s’appuyer sur ce levi­er poli­tique puis­sant. »

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(1) Vigneronnes. 100 femmes qui font la dif­férence dans les vignes de France, édi­tions Nourit­ur­fu, 2019.
(2) Fleur Godart a cosigné avec Jus­tine Saint-Lô trois ouvrages sur le vin pub­liés aux édi­tions Marabout.
(3) Mathilde Goanec, « Har­cèle­ment sex­uel et moral: des ouvrières du cham­pagne vivent la dou­ble peine », Medi­a­part, 24 octo­bre 2018.
(4) « Plusieurs études améri­caines ten­dent à dire qu’il y a entre 2 % et 8 % de fauss­es allé­ga­tions [de viol]. Une étude aus­trali­enne a été menée sur 850 cas de viol : 2,1 % sont faux. Il n’y a mal­heureuse­ment aucune étude sta­tis­tique faite en France sur le sujet », écrit Valérie Rey-Robert dans Une cul­ture du viol à la française, Lib­er­talia, 2019.
(5) Jean-Louis Escud­i­er est auteur de l’ouvrage Les femmes et la vigne : une his­toire économique et sociale, 1815–2010, Press­es uni­ver­si­taires du Midi, 2016.

Illus­tra­tion : Léa Djeziri.

Léa Mormin-Chauvac

Journaliste et autrice, elle est membre du comité éditorial de La Déferlante. Entre la Martinique et l’Hexagone, elle travaille notamment sur les mouvements féministes noirs et postcoloniaux. Voir tous ses articles

Octavie Maurel

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