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Crystal Chardonnay, Drag Queen à Lille

Publié le 31/05/2023

Modifié le 16/01/2025

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°6. La Défer­lante est une revue trimestrielle indépen­dante con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société.

Cer­taines drag queens par­lent de sujets sérieux, touchants ou graves, ce n’est pas mon cas. Ou alors je le fais très rarement. Pour moi, un drag show, c’est comme un exu­toire, autant pour la drag queen que pour le pub­lic. D’autant plus que je fais essen­tielle­ment des soirées pour des per­son­nes queer, dont le quo­ti­di­en n’est pas for­cé­ment facile. Donc, par le rire, on essaie d’expulser toute cette néga­tiv­ité. Qu’importe le genre de la per­son­ne, l’idée, c’est vrai­ment qu’elle passe un bon moment. Le temps d’une soirée, on donne le droit aux gens d’être eux-mêmes, d’exprimer qui ils sont réelle­ment, en leur offrant un envi­ron­nement safe, le plus safe pos­si­ble.

 

Du bar-tabac aux soiréex Bingo

C’est ça qui m’a don­né envie de faire du drag. Quand j’ai com­mencé, il y a qua­tre ans, à Lille, je fai­sais par­tie des pre­miers. Je me suis d’abord pro­duit dans un bar-tabac, puis dans des bars un peu plus grands avant d’avoir l’occasion d’organiser des soirées Bin­go Drag au Saint-Sauveur [anci­enne gare réha­bil­itée en lieu cul­turel]. Ça m’amusait beau­coup. Au fur et à mesure que je me pro­dui­sais, j’ai com­mencé à réfléchir à la place de cha­cun. C’est très com­pliqué pour une per­son­ne queer de trou­ver sa place dans la vie de tous les jours et les drags shows sont juste­ment un moyen de relâch­er la pres­sion et de se retrou­ver avec des per­son­nes qui nous ressem­blent. C’est la rai­son pri­mor­diale pour laque­lle je fais du drag, et c’est aus­si la rai­son pour laque­lle je veux faire rire le pub­lic. Le rire, c’est un truc hyper com­mu­ni­catif et ça per­met de trans­met­tre une bonne énergie à tout le monde. Quand la salle rigole ça nous fait super plaisir et ça crée un réel échange. Il y a même des gens du pub­lic qui lan­cent des petites vannes !

Moi, pour faire rire les gens, je ne me repose pas sur mon aspect physique ou mon corps, j’ai une esthé­tique qui est assez tra­vail­lée, qui n’est donc pas là pour faire rire. C’est plus au micro ou dans l’histoire que racon­te la per­for­mance que je m’efforce d’être drôle.

Les drags shows peu­vent être très dif­férents, mais le plus sim­ple pour entr­er en matière, c’est vrai­ment de faire un bin­go, clas­sique. Comme quand tu joues avec ta grand-mère, sauf que là ce sont des drag queens qui présen­tent. Imag­ine une soirée avec qua­tre par­ties, et à la fin de chaque par­tie t’as une drag queen qui passe un temps infi­ni au micro à réciter des numéros. Ça paraît hyper bar­bant dit comme ça. Mais c’est juste­ment là qu’il faut être le plus drôle !

Par­fois, c’est vrai­ment pas com­pliqué, le rire est très spon­tané. Par exem­ple, dans l’un de mes derniers spec­ta­cles, j’ai per­for­mé sur la chan­son René, Mau­rice et tous les autres de Corine [chanteuse de dis­co-pop] et pen­dant tout le début du jeu, il y avait juste la musique, très lanci­nante, un peu stel­laire, et moi, à moitié caché der­rière un drap que je tenais sous les yeux. Et juste ça, ça a fait rire plein de monde, alors que je n’avais même pas encore com­mencé. Donc le rire arrive très naturelle­ment et on n’a plus qu’à rebondir dessus.

Les gens rient beaucoup avec nous et non de nous

Le jour de ma pre­mière scène, j’avais très très peur d’être moqué, surtout avec le stress, mais j’ai vite rigolé, même de moi-même. Je me rap­pelle que la scène était assez haute et qu’en voulant la descen­dre je me suis un peu tor­du la cheville, bon bah, une fois que c’est fait, autant en rire. Et quand on est sur nos talons hauts, nous les drag queens, sou­vent on n’est pas très sta­bles et les chutes font par­tie inté­grante de notre per­for­mance. Le pub­lic voit qu’on n’est pas à l’aise, il se moque et, en fait, ce n’est pas grave.
Il faut pren­dre ça à la légère, je ne pense vrai­ment pas que ce rire soit méchant. Moi, j’ai quand même l’impression que les gens rient beau­coup avec nous et non de nous. C’est peut-être aus­si parce qu’on incar­ne pleine­ment notre per­son­nage, notre féminité, on n’est pas là pour car­i­ca­tur­er les femmes. Alors que dans la cul­ture pop­u­laire, quand on pense à Zaza et Rena­to dans La Cage aux folles par exem­ple, j’ai l’impression que les per­son­nages jouent en se moquant des femmes, et les spec­ta­teurs se moquent d’eux à leur tour. Nous, on n’est pas du tout dans cette logique-là.

Notre rap­port à ceux qui nous regar­dent est dif­férent aus­si. J’adore le moment après le show, où j’échange avec les per­son­nes du pub­lic, qui par­fois vien­nent pour la pre­mière fois et qui sont très intimidées. J’essaie de faire une blague le plus vite pos­si­ble pour déten­dre l’atmosphère et parce qu’il n’y a rien de mieux pour bris­er la glace. •

Pro­pos recueil­lis le 16 févri­er 2022 à Lille par Nada Didouh, étu­di­ante à l’École supérieure de jour­nal­isme de Lille, en alter­nance à La Défer­lante. Dans la retran­scrip­tion de cet entre­tien, nous avons fait le choix de restituer les pro­pos tenus sans les déclin­er en écri­t­ure inclu­sive.

Nada Didouh

En master de journalisme à l’ESJ Lille , elle a rejoint La Déferlante  pour un apprentissage d’un an. Elle se spécialise en investigation journalistique et s’intéresse aux sujets sociaux et sociétaux. Voir tous ses articles

Rire : peut-on être drôle sans humilier

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°6. La Défer­lante est une revue trimestrielle indépen­dante con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société.


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