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Camélia Jordana & Alice Zeniter

La chanteuse Camélia Jor­dana et l’écrivaine Alice Zen­iter ont con­nu très tôt le suc­cès, et le ver­tige de pass­er pour des jeunes filles mod­èles. Une image dont elles se sont affranchies en pointant toutes deux le poids de l’impensé colo­nial dans la mémoire col­lec­tive, le racisme anti-Arabes et la per­sis­tance des vio­lences poli­cières. Ren­con­tre entre deux artistes qui n’ont plus peur de déranger.
Publié le 17/10/2023

Modifié le 16/01/2025

Alice Zeniter & Camélia Jordana au Musée national de l'Histoire de l'immigration en septembre 2023 par Lynn S.K. pour La Déferlante 12 - Rêver
Lynn S.K. pour La Défer­lante

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°12 Rêver, paru en novem­bre 2023. Con­sul­tez le som­maire.

Ce n’est pas la pre­mière fois que vous vous ren­con­trez : vous vous con­nais­sez depuis longtemps.

ALICE ZENITER Camélia est une artiste que j’ai l’impression d’avoir vue grandir.

Elle peut s’emparer de n’importe quelle chan­son et la ren­dre telle­ment vibrante qu’on a le sen­ti­ment que c’est la chan­son qui nous a accompagné·e toute notre vie, ou celle qui nous man­quait jusqu’ici. Et poli­tique­ment, je l’ai vue se déploy­er très tôt. J’admire énor­mé­ment la manière dont elle a pris sa place en restant tou­jours debout, tou­jours droite.Vous-même avez été pré­coce avec un pre­mier roman, Deux moins un égal zéro, pub­lié à l’âge de 16 ans.

ALICE ZENITER J’ai com­mencé jeune ma car­rière d’autrice, mais en ce qui con­cerne les ques­tions poli­tiques, j’ai été beau­coup moins exposée que Camélia dans les médias. Il faut déjà avoir atteint un cer­tain stade de célébrité dans le champ lit­téraire pour être invité·e à réa­gir sur un sujet d’actualité.

N’est-ce pas en train de chang­er ? Diaty Dial­lo, dont le pre­mier roman, Deux sec­on­des d’air qui brûle (Seuil, 2022), racon­te l’embrasement d’une cité suite à des vio­lences poli­cières, a expliqué avoir été très sol­lic­itée par les médias après la mort de Nahel (1).

CAMÉLIA JORDANA C’est vrai qu’aujourd’hui, il y a une telle rad­i­cal­i­sa­tion dans le traite­ment médi­a­tique des per­son­nes racisées, qu’à la sec­onde même où l’une d’entre elles béné­fi­cie d’une notoriété, on lui demande tout de suite d’avoir une parole publique, de se posi­tion­ner. C’était déjà le cas au début de ma car­rière, mais je pense que c’est devenu plus vio­lent désor­mais. J’avais 17 ans quand, pour la pro­mo de mon pre­mier album post-« Nou­velle Star », je me suis retrou­vée à « On n’est pas couché », l’émission de Lau­rent Ruquier, aux côtés notam­ment d’Éric Naul­leau, Éric Zem­mour, Jean-François Copé, Jean-Marie Bigard et Luc Besson ! Une part de moi sen­tait le bain de ten­sion dans lequel j’arrivais, et en même temps j’avais une forme d’inconscience.

ALICE ZENITER Si on ne m’a pas autant sol­lic­itée sur cer­taines ques­tions, c’est aus­si parce que j’ai un white pass­ing (2) de malade. Per­son­ne ne pen­sait que j’étais fran­co-algéri­enne ! En 2010, dans Jusque dans nos bras (3), je met­tais en scène une jeune femme, Alice, issue de l’immigration et qui fait un mariage blanc avec son meilleur ami malien. Mais à l’époque, con­traire­ment à toi, Camélia, on ne m’a pas demandé de me posi­tion­ner, de dire ce que je pen­sais du port du voile. Jusqu’à l’âge de 27, 28 ans, je me suis pro­tégée, et c’est avec L’Art de per­dre (4) que j’ai fait mon out­ing en tant que fille d’immigré·es. Ne plus pou­voir choisir qui sait que tu es à demi-boug­noule et qui ne le sait pas, c’est une chose dont j’ai mesuré les effets assez tard dans la vie. Sur le moment, l’évocation de cette iden­tité m’a per­mis de faire enten­dre qu’une par­tie des mien·nes n’existait pas en lit­téra­ture, et que je voulais pou­voir créer des réc­its de référence pour les femmes comme moi, pour les enfants issus de l’immigration, qui avaient gran­di sans représen­ta­tions dans les livres de leur père, de leur mère, de leurs oncles et tantes. Mais à par­tir de là, j’ai aus­si com­mencé à avoir des retours très désagréables, surtout de la part de vieux messieurs blancs qui me dis­aient que j’étais un peu rad­i­cale dans ma con­damna­tion, puisque j’étais moi-même la preuve des bien­faits de
la coloni­sa­tion…

CAMÉLIA JORDANA Tu crachais dans la soupe, quoi !

ALICE ZENITER Finale­ment, cet out­ing a accéléré ma com­préhen­sion poli­tique de l’ampleur sys­témique du racisme. J’ai com­mencé à expéri­menter des choses que je ne con­nais­sais que de manière très théorique. Mais L’Art de per­dre, c’est aus­si le moment où beau­coup de gens m’ont dit qu’à tra­vers ce roman, ils avaient com­pris que ce qu’ils croy­aient être des traits pro­pres à eux ou à leurs familles, c’était en fait une angoisse partagée par l’ensemble des immigré·es, ou une pres­sion subie par nom­bre d’enfants de la deux­ième généra­tion.

Est-ce pour cela, Camélia Jor­dana, que vous avez dit un jour que L’Art de per­dre avait été « un grand cadeau » ?

CAMÉLIA JORDANA En plus de la grâce avec laque­lle Alice a écrit, inven­té, pen­sé, con­stru­it ce roman, elle est la seule à être par­v­enue à combler ce que j’appelle un endroit de vide.


« Il ne nous reste que notre gueule. Cette gueule qui fait que tu n’es pas admis·e, que tu n’es pas accepté·e, que tu déranges, que tu es microagressé·e quo­ti­di­en­nement, c’est tout ce que t’as. »

Camélia Jor­dana


Est-ce que l’histoire de votre grand-père, référent local du Front de libéra­tion nationale pen­dant la guerre d’Algérie, fai­sait l’objet d’un tabou dans votre famille ?

CAMÉLIA JORDANA Pas tout à fait, car même si on ne par­lait absol­u­ment pas de ce passé, mon grand-père était une fig­ure de référence, chez nous autant que dans la com­mu­nauté musul­mane du sud de la France. Mais quand j’évoque ce vide comblé par L’Art de per­dre, c’est qu’avec ce grand-père, la bar­rière de la langue m’empêchait d’échanger plus de trois mots. Je fais par­tie de la pre­mière généra­tion qui a subi cette rup­ture lin­guis­tique qui casse les liens. Je trou­ve que le plus dur, au quo­ti­di­en, ce n’est pas for­cé­ment le fait de ne pas se sen­tir chez soi quand on est là-bas, ni de ne pas se sen­tir reçu comme chez soi quand on est ici. Le plus douloureux, c’est d’être déraciné·e jusque dans la langue, de ne pas pou­voir entr­er en rela­tion avec les siens. C’est ça, l’endroit de vide. Et comme il n’y avait pas d’échange pos­si­ble, il n’y avait même pas, avant que je décou­vre L’Art de per­dre, de curiosité de ma part par rap­port à cet endroit de mon iden­tité. Ce silence-là, il est hérité d’une injonc­tion colo­niale qui a con­sisté à inter­dire aux gens de par­ler leur langue, de s’appeler par leur nom, qui a invis­i­bil­isé jusqu’aux noms des rues. Pour le dépass­er, pour s’autoriser à inter­roger cette his­toire colo­niale, il faut avoir la volon­té d’entamer un tra­vail de décon­struc­tion.

Camélia Jordana par Lynn S.K. pour La rencontre « Camélia Jordana & Alice Zeniter : retisser les héritages » - La Déferlante 12 RêverALICE ZENITER Comme je viens d’une famille anal­phabète, les seules traces écrites restantes de ma lignée en Algérie sont celles lais­sées par les colons. C’est comme si mon seul album de pho­tos de famille était tenu par un oncle raciste qui aurait écrit des hor­reurs à côté de chaque cliché ! Mais je voudrais rebondir sur ce que dit Camélia, sur la bar­rière de la langue. Les gens qui dis­ent aux par­ents immi­grés de ne pas par­ler leur langue natale à leurs enfants, j’aimerais qu’ils com­pren­nent ce que ça veut dire dans nos familles. Cet été, j’étais chez ma grand-mère. Quand elle dit un truc en arabe, ma tante en traduit un morceau, mon père con­tred­it ma tante, moi je réponds en français, mon père traduit, ma tante fait une blague dessus, ma grand-mère éclate de rire, j’attrape un mot, j’essaie de répon­dre sans atten­dre la tra­duc­tion, sauf que ça part dans tous les sens… Le salon de ma grand-mère, c’est la tour de Babel. On partage une intim­ité famil­iale très forte, mais on ne peut pas se par­ler sans mul­ti­pli­er les inter­mé­di­aires – avec tout ce qui s’y perd.

CAMÉLIA JORDANA Il y a la ques­tion de la com­plic­ité, du partage au quo­ti­di­en, mais aus­si le fait que le seul lien à nos racines passe par ces gens-là, avec lesquels on ne sait pas par­ler. C’est-à-dire qu’il ne nous reste que notre gueule. Cette gueule qui fait que tu n’es pas admis·e, que tu n’es pas accepté·e, que tu déranges, que tu es microagressé·e quo­ti­di­en­nement, c’est tout ce que t’as. Et encore. Moi, ça fait deux ans qu’officiellement je porte mes cheveux frisés, et un an que je ne veux plus les raidir, sauf pour le tra­vail. Ça m’a pris presque trente ans, toute une vie, pour en arriv­er là ! C’est névro­tique, ce rap­port à notre féminité et à notre beauté qui passe par le white wash­ing (5) total de nos physiques. Donc, il n’y a pas seule­ment la dis­pari­tion de notre langue et l’invisibilisation des héroïnes et des héros de notre cul­ture : ça va jusqu’à nos gueules. C’est une forme de néga­tion totale. Et on a beau tout faire pour « s’intégrer » – même si là, on par­le car­ré­ment d’assimilation –, ça ne change rien.


« Je ne choi­sis pas de faire de poli­tique : je suis un être poli­tique parce que je suis une femme et que je suis racisée. »

Camélia Jor­dana


On se trou­ve au palais de la Porte-Dorée, qui a servi autre­fois la pro­pa­gande colo­niale française (lire l’encadré p. 20). Com­ment appréhen­der la vio­lence mémorielle que dégage ce lieu ?

ALICE ZENITER Cette vio­lence-là, il faut qu’elle soit mon­trée et vue, car c’est une réponse à la propo­si­tion de loi sur les bien­faits de la coloni­sa­tion (6). Ce musée devrait être beau­coup plus vis­ité, car il dit la vérité des expédi­tions colo­niales : les êtres humains colonisés y sont représen­tés n’importe com­ment, et les matières pre­mières qui ont été pil­lées et exploitées sont partout. Ça racon­te claire­ment que ce n’est pas pour l’idéal des Lumières que la France a mené une telle entre­prise.

CAMÉLIA JORDANA C’est assez désta­bil­isant de con­stater le déficit de prise de con­science, de con­nais­sance et de trans­mis­sion con­cer­nant la coloni­sa­tion. Je me demande com­ment réus­sir à men­er mon tra­vail intime de mémoire, quand je vois à quel point le tra­vail col­lec­tif sur ces sujets se fait à recu­lons.

Alice Zeniter par Lynn S.K. pour La rencontre « Camélia Jordana & Alice Zeniter : retisser les héritages » - La Déferlante 12 RêverEst-ce que cette quête iden­ti­taire se réper­cute dans vos choix artis­tiques ?

CAMÉLIA JORDANA Oui, tout le temps. Je pense que j’ai tou­jours été intran­sigeante, mais au fil du temps, ma vig­i­lance s’est accrue : quand je par­ticipe à un pro­jet, par exem­ple ciné­matographique, je suis très atten­tive aux ques­tions de représen­ta­tion, je pointe cer­taines choses en don­nant des références et en essayant de trans­met­tre, juste­ment. Ce tra­vail de péd­a­gogie est oblig­a­toire. C’est comme faire un shoot­ing pho­to avec mon afro – même si, pour celui que j’ai fait ce matin avant de venir ici, j’ai dû accepter de me liss­er les cheveux, à mon grand regret !

ALICE ZENITER Moi aus­si, j’ai changé des choses dans la pra­tique de mon méti­er, notam­ment depuis L’Art de per­dre. Je ne referai pas de livre qui ne passe pas le test de Bechdel (7). Je ne referai pas de livre en étant com­plète­ment imprégnée de l’idée qu’un grand roman, ça com­prend un homme blanc con­quérant, et donc que mes héros doivent y ressem­bler. Ou que ce n’est pas pos­si­ble de créer un per­son­nage de loseur sym­pa­thique qui soit une femme, qu’on va for­cé­ment lui en vouloir. Je ne referai plus de roman où tout le monde est blanc.


« Ne plus pou­voir choisir qui sait que tu es à demi-boug­noule et qui ne le sait pas, c’est une chose dont j’ai mesuré les effets assez tard dans
la vie. »

Alice Zen­iter


Camélia Jor­dana, dans vos chan­sons, vous évo­quez les vio­lences poli­cières, vous par­lez de fémin­isme. On vous a aus­si enten­due sur la réforme des retraites. Revendiquez-vous l’étiquette d’« artiste engagée » ?

CAMÉLIA JORDANA Je ne choi­sis pas de faire de poli­tique : je suis un être poli­tique parce que je suis une femme et que je suis racisée. Que je le veuille ou non, ça impacte mon art. Je ne com­prends pas l’art désen­gagé. Je respecte le choix de certain·es de ne pas ques­tion­ner, dans leurs créa­tions, leur rap­port au monde, mais moi, j’en suis inca­pable, car c’est la seule manière que j’ai d’y sur­vivre.

ALICE ZENITER Je suis moins tolérante que toi. Plus ça va, plus je me dis que l’art apoli­tique n’existe pas. Il y a une pos­ture qui me paraît être un acqui­esce­ment au monde tel qu’il est. C’est une manière de dire : « Les iné­gal­ités telles qu’elles sont me con­vi­en­nent, je voudrais juste pou­voir en prof­iter. »

L’une et l’autre, vous êtes adoubées par vos pairs, par la cri­tique et par le pub­lic. Est-ce que cette légitim­ité facilite vos pris­es de parole ?

CAMÉLIA JORDANA C’est vrai­ment sur le fil. Je béné­fi­cie d’assez de lumière pour pou­voir pren­dre la parole sur cer­tains sujets. En revanche, si j’ai acquis cette recon­nais­sance, c’est parce que j’ai par­faite­ment endossé le cos­tume qui per­met de pren­dre une telle place. Et pren­dre la parole me coûte extrême­ment cher. Quand en 2020, chez Ruquier à nou­veau, au milieu d’une foule de sujets poli­tiques, j’ai par­lé des vio­lences poli­cières, ça a fait une énorme polémique (8). Je venais de sor­tir un album, et j’ai per­du des pro­gram­ma­tions télé et radio, des inter­views, des con­certs… Les présentateur·ices qui me rece­vaient étaient cyberharcelé·es par la fachos­phère. Donc, j’ai beau avoir fait tout ce qu’il fal­lait pour entr­er dans ce sys­tème, quand je par­le depuis ma place de femme racisée, on me le fait pay­er.

ALICE ZENITER L’ampleur de ce qu’on prend dans la gueule quand on s’exprime sur ces sujets-là est liée, d’une cer­taine manière, au fait qu’« on n’a pas signé pour ça ». Je suis une autrice étudiée au bac. Je représente l’entrée dans le pat­ri­moine, donc à un moment don­né, ça m’assied. Mais ça fait deux fois que je refuse une inter­view dans la mati­nale de France Inter, parce qu’en prenant la parole sur des sujets de société dans un for­mat qui ne me con­vient pas, je risque de me faire défon­cer sur les réseaux soci­aux. Je ne vais pas aller m’exposer comme ça. Je veux bien qu’on me défonce quand je par­le du racisme, comme je con­tin­uerai de toute façon à le faire, mais lais­sez-moi le faire dans une forme dont je sois fière.

Emmanuelle Josse, Alice Zeniter, Nora Bouazzouni et Camélia Jordana par Lynn S.K.

Avez-vous craint d’être instru­men­tal­isées ?

ALICE ZENITER Quand j’ai pub­lié mes deux pre­miers romans, à 16 et 23 ans, bon nom­bre d’articles dis­aient que j’étais « un exem­ple par­fait d’intégration ». Pen­dant un temps, je me suis sen­tie val­orisée par ça. Mais j’ai tou­jours trou­vé très dur de tenir une espèce de dou­ble dis­cours : évidem­ment qu’une tra­jec­toire sociale comme la mienne est pos­si­ble, puisque je suis là. Mais ça amène mes inter­locu­teurs blancs et bour­geois à se sen­tir très à l’aise, à croire que leur sys­tème fonc­tionne, qu’il est accueil­lant.

CAMÉLIA JORDANA Et que les autres ne font pas assez d’efforts !

ALICE ZENITER Dans le sys­tème de représen­ta­tion de l’immigration en France, j’ai claire­ment gag­né la par­tie, je fais par­tie des gens qui ont fait un dou­ble-six. Mais à côté de ça, la vio­lence est telle, l’étouffement est si per­ma­nent, que même avec un dou­ble-six, moi, je dis que ça n’en vaut pas la peine. Arrêtez de vous sen­tir à l’aise avec le fait que quelques-un·es d’entre nous parvi­en­nent à tir­er un dou­ble-six !

CAMÉLIA JORDANA Le sys­tème est aus­si con­va­in­cu que notre dou­ble-six nous immu­nise con­tre les micro-agres­sions. Mais je vous donne un petit exem­ple, une his­toire qui m’est arrivée récem­ment. Ma chi­enne a été blessée par un san­gli­er. Je débar­que à la clin­ique, accom­pa­g­née par un ami maro­cain. La dame de l’accueil s’approche, je pense qu’elle m’a recon­nue, et tout ce qu’elle trou­ve à dire pour ras­sur­er ma chi­enne, c’est : « Il était méchant, ce cochon, c’est sûr qu’il n’était pas halal ! » Tu imag­ines le tra­jet dans sa tête ?! C’est quand même énorme : elle a vu « san­gli­er », elle a vu « arabe », et donc elle a fait le lien avec « cochon », « musul­man », et donc « halal »… Le tout en une frac­tion de sec­onde, de la part d’une per­son­ne qui n’était même pas mal inten­tion­née ! Voilà com­ment on est ren­voyé à la gueule qu’on a. Alors aujourd’hui, je refuse d’être prise comme exem­ple. Même si à un moment, j’étais fière d’avoir ce rôle, je crois. C’est le même principe que le patri­ar­cat : quand on t’a ser­iné que la seule chose qui compte, c’est d’être belle et choisie par les hommes, devenir un trophée est une grande fierté. Être racisée, c’est pareil : quand tu as coché toutes les cas­es de l’assimilation pour t’intégrer, tu es hyper heureuse, à 18 ans, de par­ler de ta bib­lio­thèque sur France Cul­ture.

ALICE ZENITER Avant, j’avais tou­jours l’impression de jon­gler avec trop d’assiettes à la fois. Il y a ce sen­ti­ment de respon­s­abil­ité, mais tu veux aus­si mon­tr­er que tu n’as pas changé d’équipe ; que tu as beau avoir passé tous les stades de la val­i­da­tion, tu ne te réveilleras jamais un matin sans être une femme et sans être arabe. Cela dit, je trou­ve aus­si que l’attention bien­veil­lante de cer­tains
médias aide à faire pass­er cer­taines choses.

Est-ce qu’attirer et con­serv­er la sym­pa­thie du pub­lic, quand on est une femme racisée, ça néces­site d’en faire plus, de sourire davan­tage ?

ALICE ZENITER Les gens m’ont vue grandir, comme Camélia. Tu les sens à deux doigts de te pin­cer les joues en te dis­ant que tu es mignonne. Pen­dant un temps, ça m’a énervée, mais main­tenant je me dis que, stratégique­ment, ça m’aide, car je peux tenir un cer­tain nom­bre de dis­cours qui autrement me rangeraient dans la caté­gorie hys­térique, méchante ou rad­i­cal­isée. Donc tout en souri­ant et en par­lant gen­ti­ment, je peux dire : « Le sys­tème est raciste » ! Et c’est là que réside ma marge de manœu­vre, c’est là que je tente d’emporter la con­vic­tion.


« Tu as beau avoir passé tous les stades de la val­i­da­tion, tu ne te réveilleras jamais un matin sans être une femme et sans être arabe. »

Alice Zen­iter


CAMÉLIA JORDANA Mal­heureuse­ment, si pour avancer dans le sys­tème en ques­tion, une femme blanche doit sourire, être belle à regarder et un peu mys­térieuse, nous, on doit redou­bler de sym­pa­thie, car chez nous, femmes racisées, le mys­tère fait peur. Il faut mon­tr­er qu’il n’y a pas de dan­ger, pas de vice, se présen­ter comme la per­son­ne la plus aimable et la plus arrangeante, plus encore que n’importe quelle femme social­isée de cette manière depuis l’enfance.

Alice, vous n’avez donc pas opté pour la « parade vir­ile » des artistes mas­culins, une for­mule emprun­tée à la roman­cière Julia Kerni­non, que vous men­tion­nez dans Toute une moitié du monde ?

ALICE ZENITER Claire­ment, mon édu­ca­tion m’a per­mis d’adopter les codes plutôt mas­culins qui ne sont pas don­nés spon­tané­ment aux femmes, et qui per­me­t­tent d’entrer dans une grande école : une parole argu­men­tée et con­stru­ite, une cer­taine capac­ité à bluffer… Et je pense que j’ai déjà écrasé des gens par la parole. En revanche, j’ai caché la puis­sance de mon corps, alors que j’ai été très sportive ! Un grand nom­bre d’écrivains hommes par­lent du sport qu’ils pra­tiquent dans leurs livres ; mais dans les miens, je n’évoque jamais mon rap­port à la nage, activ­ité que j’ai pra­tiquée dix, douze heures par semaine pen­dant des années. On entend sou­vent des femmes dire qu’elles se font pass­er pour plus bêtes qu’elles ne sont afin de laiss­er les hommes briller. Moi, j’ai longtemps fait ça avec ma puis­sance mus­cu­laire, que je com­mence tout juste à me réap­pro­prier.

Alice Zeniter, la fille aux cent histoires

Autrice, à 37 ans, d’une œuvre déjà foi­son­nante, Alice Zen­iter aime met­tre ses per­son­nages aux pris­es avec la grande His­toire, qu’elle ait pour cadre
la Hon­grie com­mu­niste (Som­bre Dimanche, Albin Michel, 2013), l’Algérie lut­tant pour son indépen­dance (L’Art de per­dre, Flam­mar­i­on, 2017), ou la révolte des Gilets jaunes (Comme un empire dans un empire, Flam­mar­i­on, 2020). L’écrivaine mène aus­si une réflex­ion au long cours sur les pou­voirs de la fic­tion : les per­son­nages de Juste avant l’oubli (Flam­mar­i­on, 2015) sont ain­si han­tés par la fig­ure fan­toma­tique d’un écrivain dis­paru de manière mys­térieuse, et dans Je suis une fille sans his­toire, un seule-en-scène créé en pleine pandémie de Covid-19, elle décor­tique, avec humour
et péd­a­gogie, la façon dont on fab­rique des his­toires. Un ques­tion­nement qui l’amène à expéri­menter tous les for­mats créat­ifs pos­si­bles : la tra­duc­tion (I love Dick, de Chris Kraus, Flam­mar­i­on, 2016), le ciné­ma (avec la coréal­i­sa­tion du long-métrage Avant l’effondrement, en 2023), le théâtre, au sein de sa com­pag­nie L’Entente cor­diale, ou encore le dessin ani­mé sur lequel elle tra­vaille actuelle­ment.

Camélia Jor­dana, com­ment négo­ciez-vous avec ce corps que vos métiers d’actrice et de chanteuse imposent de mon­tr­er ?

CAMÉLIA JORDANA Je suis arrivée à un min­i­mum syn­di­cal avec lequel je suis OK. Je dois valid­er mon image au quo­ti­di­en, ce qui est à la fois un cadeau et un fardeau. Donc ma solu­tion, c’est le con­trôle : je suis ma pro­pre pro­duc­trice. Clips, visuels, pho­tos de cov­er d’albums, absol­u­ment tout est pro­duit et réal­isé par moi, avec des chef·fes de pro­jet sur cha­cun de ces postes. C’est en étant dans ce con­trôle que j’arrive petit à petit à lâch­er prise, par exem­ple en gar­dant dans un clip un plan que je trou­ve beau, même si moi j’y appa­rais sous un angle qui ne cor­re­spond pas aux codes de la féminité sexy et atti­rante.

Ce qui frappe, chez l’une et l’autre, c’est une forme de solid­ité, d’affirmation de soi con­stru­ite au fil des ans. Mais une chose demeure floue. Depuis le début de l’entretien, pour qual­i­fi­er cette iden­tité que vous partagez, vous nav­iguez entre dif­férents mots : arabe, fran­co-algéri­enne, racisée, fille d’immigré·es…

ALICE ZENITER Oui, c’est sûr, c’est le bor­del…

CAMÉLIA JORDANA Le vrai mot, c’est « berbère ». Mais à par­tir du moment où la France colonise l’Afrique du Nord, où vivent dif­férentes tribus berbères, ça devient des « Arabes »…

ALICE ZENITER Moi, j’aime bien utilis­er le terme « arabe » pour sign­er une sol­i­dar­ité. De la même manière, mais pas du tout dans les mêmes lieux, j’utilise le terme « boug­noule ». C’est une façon de dire : « De toute façon, c’est ça qu’on est pour eux », de tor­dre le bras à la pre­mière insulte raciste que j’ai prise dans la gueule. En revanche, comme dans toutes les sit­u­a­tions où tu retournes le stig­mate, quand quelqu’un, qui ne fait pas par­tie de cette com­mu­nauté d’entraide et de mémoire, dit « les Arabes » pour par­ler de gens qui ne le sont pas, là, je cor­rige.

Alice Zeniter & Camélia Jordana au Musée national de l'Histoire de l'immigration en septembre 2023 par Lynn S.K. pour La Déferlante 12 - Rêver

On manque aus­si d’un mot pour par­ler de ce qui se joue à l’intersection entre sex­isme et racisme anti-Arabes, un équiv­a­lent au terme « misog­y­noir » inven­té par les afrofémin­istes états-uni­ennes.

ALICE ZENITER J’ai l’impression qu’en ter­mes de lit­téra­ture sci­en­tifique ou de pro­duc­tion d’outils sur les ques­tions de racisme, on a beau­coup pris aux États-Unis – où le tra­vail était claire­ment plus avancé – et à d’autres fémin­istes noires, comme la roman­cière nigéri­ane Chi­ma­man­da Ngozi Adichie. Sauf qu’aux États-Unis, à la dif­férence de « Noir » ou « His­panique », « Arabe » n’est pas une caté­gorie admin­is­tra­tive…

CAMÉLIA JORDANA Dans les cast­ings inter­na­tionaux, j’ai le choix entre « Euro­pean », « Lati­na » ou « Mid­dle East »… Il n’y a jamais le nom de ma tête !

ALICE ZENITER On est oblig­ées de trans­former cer­tains con­cepts pour par­ler de notre cas. La cinéaste et autrice afrofémin­iste Aman­dine Gay est l’une des per­son­nes dont les réflex­ions me nour­ris­sent le plus aujourd’hui, mais c’est une penseuse de la con­di­tion des femmes noires. J’ai aus­si en tête l’écrivaine Maryse Condé, qui a écrit dans des con­di­tions matérielles extrême­ment dif­fi­ciles et qui a refusé d’appliquer les normes de la lit­téra­ture blanche pour être validée par ses pairs. Mais je ne con­nais pas de femme issue de nos com­mu­nautés qui jouerait un rôle équiv­a­lent. La plu­part des autri­ces algéri­ennes qui ont été éditées en France ont vu l’un de leurs livres ven­du comme un coup édi­to­r­i­al, mais le reste de leurs pub­li­ca­tions n’a pas suivi : Assia Dje­bar, présen­tée comme « la Sagan musul­mane », est entrée à l’Académie française, mais elle n’est pas étudiée en France ! Quand on pub­lie un roman et qu’on a de la vis­i­bil­ité, on a l’impression d’être la pre­mière, alors que celles qui ont fait le taf avant ont sim­ple­ment été invis­i­bil­isées. C’est pour répar­er ça qu’avec la roman­cière Faïza Guène on tra­vaille sur une forme de lec­ture musi­cale autour de ces écrivaines que j’ai décou­vertes très tard : Assia Dje­bar, Maïs­sa Bey, Leïla Seb­bar, Tas­sa­dit Imache… Leur efface­ment est très vio­lent, mais c’est parce qu’il n’y a pas eu de chaîne de trans­mis­sion pour qu’on puisse grandir avec ces autri­ces-là. Je trou­ve ça hyper impor­tant qu’on puisse con­naître, recon­naître et remerci­er celles qui ont écrit avant nous des réc­its qui nous ressem­blent.

CAMÉLIA JORDANA En ce qui me con­cerne, depuis quelque temps, je réfléchis à employ­er le terme « afropéenne ». J’ai eu le déclic à New York, dans un taxi con­duit par un Afro-Améri­cain d’origine éthiopi­enne. Il m’a demandé d’où je venais, et quand je lui ai répon­du que j’étais française mais que mes ancêtres étaient algériens, il m’a répon­du : « Ah, donc tu es afro-européenne ! ». Et là, je me suis dit… oui. En fait, oui. Comme L’Art de per­dre a comblé un vide, ce terme d’afro-européenne vient, pour l’instant, désign­er un endroit qui n’est pas dit, ni même pen­sé par nos dirigeant·es.

ALICE ZENITER Ce que j’aime avec ces ter­mes, « afro-européenne » ou « afro-descen­dante », c’est aus­si qu’ils nous per­me­t­tent de con­cevoir l’Algérie dans son rap­port au con­ti­nent africain, dans sa place au sein des mou­ve­ments panafricain, tiers-mondiste, non-aligné…

CAMÉLIA JORDANA Mais oui ! J’ai vu récem­ment un doc­u­men­taire sur les Black Pan­thers, qui se réfu­giaient à Alger pour fuir le har­cèle­ment du FBI !

ALICE ZENITER C’est exacte­ment ce que racon­te l’historien Syl­vain Pat­tieu dans Pan­thères et pirates (9). Ce genre d’ouvrage, comme les ter­mes « afro-européenne » ou « afro-descen­dante », ça élar­git encore la com­mu­nauté à laque­lle je pense quand j’utilise le mot « arabe ». Quand on n’évoque l’Algérie que dans son face-à-face avec la France, on pense à une his­toire de la coloni­sa­tion et de la très lente décoloni­sa­tion, mais on oublie le reste, qui est fasci­nant !

Camélia Jordana,une voix qui s’affirme

En 2014, Camélia Jor­dana évoque déjà sa « gueule » dans la chan­son éponyme tirée de son deux­ième album, Dans la peau : « Y a des fois où j’me sens seule / Y a des fois où j’ai peur de ma gueule / Ma gueule d’étranger / Ma gueule qui sait pas où aller… » Un disque sen­suel, plus exigeant et pointu que son pre­mier opus, Camélia Jor­dana, sor­ti en 2010 et écoulé à plus de 100 000 exem­plaires. En 2018, elle va encore un cran plus loin : dans l’album Lost, la chanteuse et actrice désor­mais césarisée mêle anglais, français et arabe pour dénon­cer la coloni­sa­tion (Empire), le racisme et les vio­lences poli­cières ; Fred­die Gray rend hom­mage à cet Africain-Améri­cain mort en 2015 après son arresta­tion vio­lente par des policiers à Bal­ti­more, et Dhaouw (lumière, en arabe) évoque le mas­sacre du 17 octo­bre 1961, com­mis par la police française lors d’une man­i­fes­ta­tion paci­fique d’Algérien·nes dénonçant le cou­vre-feu qu’on leur impo­sait. En 2021, Camélia Jor­dana pro­duit seule son dou­ble album Facile x Frag­ile, éclec­tique, tou­jours com­bat­if et plus ouverte­ment fémin­iste : « Mes­dames, les femmes, prenons les armes / Il est temps, usons de nos larmes / Aucun besoin de faire couler le sang / Comme eux seuls savent le faire. »

Est-ce que les livres, les mots, en changeant les représen­ta­tions, peu­vent con­tribuer à chang­er le réel ?

ALICE ZENITER Je pars du principe que les univers fic­tifs que l’on se con­stru­it à tra­vers une somme de films, de séries, de livres… ont une réal­ité, puisqu’ils ont des effets. Évidem­ment, chacun·e n’ayant pas fréquen­té exacte­ment les mêmes œuvres, on n’a pas le même pays de fic­tion dans la tête. Mais dans cet univers fic­tif, je veux men­er un com­bat de jus­tice sociale. Oui, la révo­lu­tion passe par des ques­tions de représen­ta­tion : c’est un mou­ve­ment con­tinu entre le dedans et le dehors, et il n’y a aucune rai­son d’abandonner cet univers fic­tif à l’ordre qu’ont établi les dom­i­nants depuis des siè­cles.

CAMÉLIA JORDANA Dans mon tra­vail aus­si, la jus­tice sociale est cen­trale, presque mal­gré moi. Ça passe par la chan­son et les films, dans lesquels j’incarne cer­tains par­cours de femmes, mais égale­ment dans les pro­jets que j’ai en cours : l’écriture d’un roman, d’un essai et d’un film. La réal­ité vient for­cé­ment per­cuter tout ça. Pour qu’une société soit en bonne san­té, c’est néces­saire d’être per­pétuelle­ment en mou­ve­ment.

ALICE ZENITER C’est ce qui fait que je ne sup­porte pas les posi­tions des boomers. Je trou­ve ça génial de pou­voir se dire que tel truc que j’ai tou­jours accep­té, tout à coup, me pose prob­lème. Ça sig­ni­fie que je vais devoir me défaire de cer­taines choses que j’ai aimées et effectuer un tra­vail sur moi-même ! J’aime l’idée qu’on tra­vaille tout le temps. Sinon ça ne m’intéresse pas, sinon c’est affreux de vieil­lir. •

Le palais de la Porte-Dorée

C’est la pho­tographe Lynn S.K., chargée de réalis­er les pho­togra­phies de la ren­con­tre, qui a sug­géré qu’elle ait lieu au palais de la Porte-Dorée. Con­stru­it pour l’Exposition colo­niale inter­na­tionale de 1931, il se voulait une célébra­tion de l’entreprise impéri­al­iste menée par la France au-delà des mers. Ses fresques met­tent en scène une vision stéréo­typée des pop­u­la­tions colonisées, les pièces les plus pré­cieuses de son mobili­er sont fab­riquées avec des matières pre­mières prélevées dans ces ter­ri­toires dom­inés. Les évo­lu­tions muséo­graphiques du palais sont emblé­ma­tiques des dif­fi­cultés français­es à affron­ter le fait colo­nial : le bâti­ment a abrité le Musée des Colonies (en 1931), le Musée de la France d’outre-mer (à par­tir de 1935), le Musée des Arts africains et océaniens (à par­tir de 1960)… Il est aujourd’hui offi­cielle­ment le Musée de l’Histoire de l’immigration. « Ses fresques, son objet ini­tial en font un espace poten­tielle­ment rude à vis­iter pour les per­son­nes non blanch­es, explique Lynn S.K., elle-même fran­co-algéri­enne. Mais il m’a sem­blé essen­tiel que nous puis­sions y réu­nir plusieurs femmes dont les ancêtres ont prob­a­ble­ment été oppressé·es, tué·es ou déporté·es au nom de la pré­ten­due mis­sion “civil­isatrice” que la France dis­ait men­er dans les colonies. »

Entre­tien réal­isé par Nora Bouaz­zouni, jour­nal­iste indépen­dante, le 4 sep­tem­bre 2023, au Musée nation­al de l’Histoire de l’immigration.


1. Le 27 juin 2023, Nahel M., 17 ans, est tué par un polici­er. Un témoin filme la scène, qui fait le tour des réseaux soci­aux. Des révoltes écla­tent dans plus de 500 com­munes, suiv­ies d’une répres­sion par­ti­c­ulière­ment intense.

2. Le white pass­ing est la pos­si­bil­ité, chez une per­son­ne racisée, de « pass­er » pour une per­son­ne blanche, et d’être, de ce fait, moins exposée au racisme.

3. Albin Michel, 2010.

4. L’Art de per­dre, best-sell­er couron­né par de nom­breux prix lit­téraires, racon­te l’histoire d’une famille fran­co-algéri­enne sur trois généra­tions, mar­quée par l’expérience de la guerre, de l’exil et des tiraille­ments iden­ti­taires.

5. His­torique­ment, le white whash­ing (blanchi­ment) con­sis­tait à faire jouer par des acteur·ices blanc·hes des per­son­nages qui ne l’étaient pas. Cela désigne aujourd’hui l’hégémonie des stan­dards esthé­tiques blancs dans les arts et la mode.

6. Le 23 févri­er 2005 était adop­tée une loi prévoy­ant que « les pro­grammes sco­laires recon­nais­sent en par­ti­c­uli­er le rôle posi­tif de la présence française out­re-mer, notam­ment en Afrique du Nord ». Vive­ment con­testé, cet alinéa de la loi fut abrogé par décret l’année suiv­ante.

7. Inven­té par la dessi­na­trice Ali­son Bechdel, ce test quan­ti­fie la place des femmes dans une pro­duc­tion cul­turelle à tra­vers trois critères : y a‑t-il au moins deux femmes dans cette œuvre ? Dis­cu­tent-elle entre elles ? Dis­cu­tent-elles d’autre chose que d’un homme ? (Lire l’entre­tien avec Ali­son Bechdel dans La Défer­lante n° 8, novem­bre 2022).

8. Le 23 mai 2020, dans l’émission de télévi­sion « On n’est pas couché », Camélia Jor­dana a évo­qué la peur qu’elle éprou­vait quand elle croi­sait des policiers. Ces pro­pos lui ont valu, entre autres, une réac­tion indignée du min­istre de l’Intérieur d’alors, Christophe Cas­tan­er, ain­si que de cer­tains syn­di­cats de police.

9. Pan­thères et pirates (La Décou­verte, 2022) racon­te le par­cours, au début des années 1970, de deux militant·es des Black Pan­thers, Melvin et Jean McNair, qui détour­nent un avion pour le forcer à atter­rir à Alger, alors ville-phare du tiers-mondisme.

Nora Bouazzouni

Journaliste indépendante, écrivaine et traductrice, elle écrit sur les questions d’alimentation, le genre et la pop culture. Elle est membre du comité éditorial de La Déferlante. Voir tous ses articles

Emmanuelle Josse

Ancienne consultante dans l’édition et la communication et cofondatrice du P.A.F – Collectif pour une parentalité féministe. Cofondatrice, corédactrice en chef, elle est en charge, depuis Paris, des relations libraires et de la maison d’édition. Voir tous ses articles

Rêver : La révolte des imaginaires

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°12 Rêver, paru en novem­bre 2023. Con­sul­tez le som­maire.


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