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La FemTech est-elle vraiment féministe ?

Flo, Clue, Glow, Nat­ur­al Cycles… : il existe aujourd’hui une mul­ti­tude d’applications de suivi men­stru­el. Mais le suc­cès des start-up de la femtech soulève de nom­breuses ques­tions éthiques.
Publié le 28/07/2023

Modifié le 16/01/2025

Femtech - Illustration : Maëlle Réat pour La Déferlante
Illus­tra­tion : Maëlle Réat pour La Défer­lante

Dans le milieu des start-up, on aime les bonnes his­toires. Ida Tin en a plusieurs à son réper­toire. L’entrepreneuse danoise a cofondé Clue en 2012, une appli­ca­tion qui per­met de suiv­re son cycle men­stru­el sur smart­phone. Dans la presse, elle racon­te que son pro­pre ser­vice l’a aidée à tomber enceinte.

Par­fois, elle men­tionne son enfance à voy­ager à moto avec ses par­ents, et com­ment cela lui a ouvert les yeux sur l’importance des droits repro­duc­tifs partout dans le monde. Sou­vent, elle insiste sur les dif­fi­cultés qu’elle a eues pour lever des fonds pour son entre­prise, face à des investis­seurs majori­taire­ment mas­culins qui ne voy­aient pas le poten­tiel de son pro­jet.

Mais il y a une autre his­toire sur laque­lle Ida Tin est moins loquace : com­ment Clue, aux côtés d’autres appli­ca­tions de suivi des règles, a été accusée de met­tre en dan­ger les per­son­nes men­struées aux États-Unis, à la suite de l’abrogation du célèbre arrêt Roe vs Wade en juin 2022 (1). Et si ces out­ils, très pra­tiques pour con­naître l’arrivée des men­stru­a­tions et sur­veiller d’autres paramètres de san­té gyné­cologique, se retour­naient con­tre leurs utilisateur·ices ? Et si leurs don­nées intimes se retrou­vaient entre les mains de la jus­tice, laque­lle pour­rait les con­damn­er pour avorte­ment illé­gal ? « Si vous utilisez une appli­ca­tion de suivi des règles, sup­primez-la tout de suite », recom­mandait car­ré­ment une entre­pre­neuse dans un tweet partagé plus de 60 000 fois en 2022.

Psy­chose injus­ti­fiée ou réveil salu­taire ? Dans tous les cas, cette séquence a provo­qué un fort malaise dans l’industrie de la femtech, qui revendi­quait jusqu’ici une image fémin­iste. C’est juste­ment Ida Tin qui a inven­té en 2016 le terme (abrévi­a­tion de female tech­nol­o­gy) pour désign­er l’activité des start-up liées à la san­té gyné­cologique et au bien-être des per­son­nes s’identifiant comme femmes. Elles dévelop­pent objets con­nec­tés, appli­ca­tions ou plate­formes con­sacrées à la san­té repro­duc­tive ou périnéale, à la mater­nité, au post-par­tum, au bien-être sex­uel, à la ménopause, à cer­taines mal­adies chroniques (endométriose, syn­drome des ovaires polykys­tiques (2)) et, donc, au suivi des men­stru­a­tions à des fins de con­tra­cep­tion, d’aide à la fer­til­ité ou sim­ple­ment pour mieux s’informer. Dans ce dernier cas, on peut aus­si par­ler de « men­strutech » [un terme pro­posé par l’autrice de ces lignes en 2017 et repris depuis par plusieurs médias français].

La femtech est un marché en pleine crois­sance. En 2020, sa val­ori­sa­tion était estimée à 21,7 mil­liards de dol­lars, d’après l’agence FemTech Ana­lyt­ics, qui prévoit qu’elle sera mul­ti­pliée au moins par trois d’ici à 2027. Mais c’est aus­si un secteur qui a longtemps été sous­-val­orisé dans le milieu des nou­velles tech­nolo­gies, et dont le développe­ment est encore entravé par le sex­isme ambiant. « Dès lors qu’un sujet est rat­taché aux femmes ou à la san­té gyné­cologique, il y a cette impres­sion qu’il s’agit d’une niche », explique Mar­i­on Cov­ille, maître de con­férences en sci­ences de l’information et de la com­mu­ni­ca­tion à l’université de Poitiers, qui mène des recherch­es sur la femtech depuis plusieurs années. « Peu importe que, d’un point de vue numérique, cela puisse con­cern­er la moitié de la pop­u­la­tion. Étant don­né que la plu­part des espaces de prise de déci­sion sci­en­tifique ou économique sont dom­inés par les hommes, les ques­tions qui touchent les femmes seront tou­jours con­sid­érées comme de moin­dre intérêt ou cli­vantes. »


21,7 mil­liards de dol­lars
C’est la valeur estimée de la femtech en 2020, selon l’agence FemTech Ana­lyt­ics, qui prévoit un triple­ment de ce chiffre d’ici à 2027.


Un fait illus­tre bien ce dédain : l’industrie des nou­velles tech­nolo­gies, tou­jours à l’affût de nou­veaux marchés à inve­stir, a mis très longtemps avant de s’intéresser aux règles. Dès 2014, Apple était cri­tiqué par cer­tains titres de la presse spé­cial­isée améri­caine lors du lance­ment de sa pre­mière appli­ca­tion dédiée à la san­té, HealthK­it : celle-ci était capa­ble de compter les pas ou de mesur­er le pouls, mais pas de suiv­re ses men­stru­a­tions – sym­bole édi­fi­ant d’un écosys­tème du numérique dom­iné par des hommes inca­pables de pren­dre en compte des besoins qui ne sont pas les leurs.

Un monde d’entrepreneuses

Ce relatif dés­in­térêt des géants du numérique a lais­sé la voie libre aux start-up. Clue revendique aujourd’hui 11 mil­lions d’utilisateur·ices régulier·es, qui ouvrent l’application tous les mois. Elle compte par­mi ses con­cur­rentes Glow (entre­prise cofondée par Max Lechvin, égale­ment cofon­da­teur de Pay­pal), Flo ou Nat­ur­al Cycles (qui fonc­tionne avec un ther­momètre, et qui est la pre­mière appli­ca­tion de men­strutech à avoir été autorisée comme moyen de con­tra­cep­tion aux États-Unis). Au-delà des règles, des entre­pris­es s’intéressent à d’autres enjeux de san­té. C’est le cas d’Elvie, qui pro­pose un tire-lait et un réé­d­u­ca­teur de périnée con­nec­tés, ou Bloom­life, qui développe un dis­posi­tif de sur­veil­lance des femmes enceintes et des fœtus. Il existe aus­si des sites d’e‑commerce spé­cial­isés dans la con­tra­cep­tion et la san­té gyné­cologique (The Pill Club), des plate­formes de diag­nos­tic de mal­adies chroniques (Endo­Di­ag pour l’endométriose) ou de télé­con­sul­ta­tions reservées aux femmes (Maven Clin­ic). Une grande diver­sité de pro­duits, qui attire de plus en plus d’investissements. En 2022, les start-up de la femtech ont levé 1,16 mil­liard de dol­lars à l’échelle mon­di­ale : un chiffre en aug­men­ta­tion de 300 % depuis 2016, d’après les esti­ma­tions de la plate­forme Pitch­Book. À not­er cepen­dant : cela ne représente que 13 % du total des fonds lev­és par le secteur de la san­té con­nec­tée dans le monde.

Ces start-up de la femtech sont con­fron­tées à divers freins dans leur développe­ment. D’abord, elles sont sou­vent dirigées par des femmes : 70 % des entre­pris­es du secteur ont au moins une cofon­da­trice, d’après des esti­ma­tions du cab­i­net McK­in­sey, un taux large­ment supérieur à la moyenne des start-up du numérique. Or, ces dirigeantes accè­dent moins facile­ment aux cap­i­taux que leurs con­frères. En France, 88 % du mon­tant total levé par des start-up en 2021 a été cap­té par des équipes 100 % mas­cu­lines. L’autre frein est tout sim­ple­ment lié au fait que le secteur se con­sacre à des sujets con­sid­érés comme féminins, moins val­orisés. Les entre­pre­neuses du secteur subis­sent d’ailleurs une forte pres­sion pour jus­ti­fi­er l’utilité de leur pro­jet, et sont sou­vent poussées à pren­dre leur cas per­son­nel comme illus­tra­tion. « Dans la femtech, il y a une cer­taine injonc­tion au sto­ry­telling, peut-être davan­tage que dans d’autres secteurs du numérique », estime Jane Douat, direc­trice tech­nique et cofon­da­trice d’Ome­na, une appli­ca­tion française dédiée à la ménopause. « On attend de toi que tu aies eu l’idée de ton pro­duit à la suite d’une his­toire très intime, par­fois dra­ma­tique. Per­son­ne ne demande au fon­da­teur d’une appli­ca­tion de compt­abil­ité de racon­ter son accouche­ment dif­fi­cile ! »

Améliorer les connaissances sur la santé des femmes

Beau­coup d’entrepreneuses de la femtech revendiquent quelque chose de rare dans le milieu des start-up : un cer­tain engage­ment poli­tique. Il ne s’agit pas seule­ment de résoudre des prob­lèmes indi­vidu­els, mais de dénon­cer les man­que­ments d’un sys­tème. « La par­tic­u­lar­ité de la femtech est qu’elle se trou­ve au croise­ment de plusieurs sujets sen­si­bles : l’innovation, la médecine et la trans­for­ma­tion socié­tale », remar­que Juli­ette Mau­ro, fon­da­trice de My S Life, une plate­forme d’information et d’échanges sur la san­té gyné­cologique et sex­uelle. « On essaie sou­vent de ramen­er ces start-up sur des thé­ma­tiques dites de femmes, de quo­ti­di­en ou de con­som­ma­tion, alors qu’on par­le de pro­jets qui réfléchissent à la démarche patiente-médecin, avec un impact poten­tiel sur la société et la san­té publique. » À la fin de 2022, cette entre­pre­neuse a cofondé l’association Femtech France avec deux autres con­sœurs, Chris­tel Bony et Del­phine Moulu.

Leur but : fédér­er les entre­pris­es français­es du secteur (il en exis­tait 81 fin 2022) pour les ren­dre plus vis­i­bles et faciliter les liens avec d’autres acteur·ices, comme des professionnel·les de san­té (médecins, mutuelles), des lab­o­ra­toires ou encore l’industrie. Car pour elles, l’enjeu prin­ci­pal de la femtech est de faire avancer les con­nais­sances en matière de san­té des femmes, et ain­si d’améliorer la prise en charge sur le long terme. « On a besoin de faire pro­gress­er la recherche, et ces entre­pris­es peu­vent y aider avec les don­nées qu’elles col­lectent », explique Del­phine Moulu. Les parte­nar­i­ats avec des uni­ver­sités ou des lab­o­ra­toires de recherche sont ain­si fréquents dans la femtech.

Apple, qui a finale­ment ajouté une option de suivi des règles sur son appli­ca­tion de san­té, tra­vaille depuis plusieurs années avec l’université de Har­vard, aux États-Unis, et a déjà con­tribué à des travaux uni­ver­si­taires sur les douleurs des règles, le syn­drome des ovaires polykys­tiques ou l’endométriose. Mais ces col­lab­o­ra­tions peu­vent aus­si se faire avec des entre­pris­es plus inat­ten­dues. Par exem­ple, en 2021, L’Oréal a annon­cé s’associer à Clue pour « enrichir la con­nais­sance sci­en­tifique des effets hor­monaux sur la san­té de la peau ».

Au cœur de l’intime

Dans la femtech comme dans le reste des indus­tries numériques, la richesse des firmes repose sur l’accumulation d’informations con­cer­nant les inter­nautes et, très sou­vent, leur exploita­tion à des fins pub­lic­i­taires. Néan­moins, le sujet est par­ti­c­ulière­ment sen­si­ble pour la femtech, car son activ­ité touche à l’intime. En 2019, l’organisation anglaise Pri­va­cy Inter­na­tion­al épinglait les pra­tiques de six appli­ca­tions de suivi des règles qui partageaient avec Face­book des don­nées plus ou moins sen­si­bles (selon les cas), via un out­il pub­lic­i­taire pro­posé par le réseau social. En 2020, l’entreprise à l’origine de l’application Glow a accep­té de vers­er 250 000 dol­lars à l’État de Cal­i­fornie après la décou­verte de plusieurs failles de sécu­rité. En 2021, la Fed­er­al Trade Com­mis­sion (l’agence fédérale améri­caine chargée de défendre les droits des con­som­ma­teurs et des con­som­ma­tri­ces) a for­cé l’outil Flo à clar­i­fi­er auprès de son audi­ence le type d’informations col­lec­tées et de quelle manière elles pou­vaient être exploitées par des entre­pris­es tierces, notam­ment Google et Face­book. Enfin, en 2022, le site améri­cain Vice révélait qu’un site spé­cial­isé dans la revente de don­nées pro­po­sait une base per­me­t­tant d’identifier des per­son­nes ayant téléchargé des appli­ca­tions de suivi des règles. La sit­u­a­tion est com­plexe. Les pra­tiques des entre­pris­es dif­fèrent grande­ment en fonc­tion des ser­vices pro­posés, de leur mod­èle économique, de leur clien­tèle (professionnel·les de san­té ou grand pub­lic), de leur méth­ode pour anonymiser les don­nées ou encore de la manière dont celles-ci sont stock­ées.


13 %
des fonds lev­és dans le secteur de la san­té con­nec­tée en 2022 le sont par des start-up de la femtech.


Leurs oblig­a­tions ne sont d’ailleurs pas les mêmes aux États-Unis et en France où, depuis 2018, c’est le Règle­ment européen sur la pro­tec­tion des don­nées per­son­nelles (RGPD) qui fait loi. Ce texte est cen­sé garan­tir le con­sen­te­ment éclairé des inter­nautes, qui ont le droit de réclamer des infor­ma­tions sur l’exploitation de leurs don­nées per­son­nelles ain­si que leur sup­pres­sion. Le texte prévoit aus­si un cadre spé­ci­fique pour les don­nées de san­té, définies comme « celles rel­a­tives à la san­té physique ou men­tale, passée, présente ou future ». Elles doivent faire l’objet d’un héberge­ment sécurisé par­ti­c­uli­er. Néan­moins, des zones de flou per­sis­tent. D’après la Com­mis­sion nationale de l’informatique et des lib­ertés (CNIL), une infor­ma­tion « à par­tir de laque­lle aucune con­séquence ne peut être tirée [sur] l’état de san­té de la per­son­ne con­cernée » n’est pas une don­née de san­té. Par exem­ple, une appli­ca­tion qui per­me­t­trait de col­lecter un nom­bre de pas jour­nalier, en dehors d’un con­texte de suivi médi­cal, n’entre a pri­ori pas dans ce cadre encore plus pro­tecteur.

Menaces pour la vie privée

Ce débat sur la pro­tec­tion des don­nées a été relancé durant l’été 2022, après la vio­lente restric­tion du droit à l’avortement aux États-Unis. Des per­son­nes util­isant ces appli­ca­tions de suivi des règles se sont inquiétées de la sur­veil­lance numérique dont elles pour­raient faire l’objet. Mais le prob­lème dépasse large­ment les entre­pris­es de la femtech : ce sont toutes nos traces numériques qui sont poten­tielle­ment traquées – recherch­es sur Google, e‑mails, dis­cus­sions via des appli­ca­tions de mes­sagerie, pub­li­ca­tions sur des réseaux soci­aux, etc. Il existe déjà des cas, dans le sys­tème judi­ci­aire améri­cain, où des femmes ont été con­damnées pour des avorte­ments illé­gaux à cause de ces banales activ­ités en ligne.

« Je pense sincère­ment qu’on peut dévelop­per des tech­nolo­gies plus éthiques. Même en se faisant de l’argent dessus ! La clé, c’est la trans­parence », explique Marie Kochsiek. Cette soci­o­logue et développeuse alle­mande est à l’origine, avec deux amies, de Drip, une appli­ca­tion de suivi des règles d’un genre un peu par­ti­c­uli­er. Elle est open source (c’est-à-dire que n’importe qui peut accéder à son code pour véri­fi­er son fonc­tion­nement ou sug­gér­er des mod­i­fi­ca­tions), et stocke les don­nées des inter­nautes unique­ment sur leur smart­phone. Per­son­ne d’autre n’y a accès. Gra­tu­ite et non com­mer­ciale, elle est financée exclu­sive­ment grâce à des bours­es du gou­verne­ment alle­mand et de la fon­da­tion Mozil­la (organ­isme à but non lucratif, notam­ment con­nu pour dévelop­per le nav­i­ga­teur web Fire­fox). Drip revendi­quait plus de 38 000 télécharge­ments en avril 2023, un peu moins d’un an après sa mise à dis­po­si­tion sur les mag­a­sins d’applications tra­di­tion­nels. La majorité de ses utilisateur·ices sur iPhone habite aux États-Unis. « Quand on a com­mencé notre pro­jet, c’était par­fois dif­fi­cile de con­va­in­cre les autres de son intérêt. Au final, je pense que tout le monde a com­pris en 2022 », se sou­vient la développeuse. « D’ailleurs, après ce qui s’est passé aux États-Unis, plusieurs appli­ca­tions ont pro­posé des options pour anonymiser les don­nées ou les stock­er de manière plus sécurisée. Mais si ces options ne sont pas enclenchées par défaut, à quoi ça sert ? C’est juste un change­ment cos­mé­tique pour don­ner bonne con­science à ces entre­pris­es. »

D’autant que la non-prise en compte des enjeux de vie privée n’est pas le seul reproche fait à la femtech. On remet en ques­tion la fia­bil­ité de leurs infor­ma­tions et pré­dic­tions ; leurs dis­cours et leur mar­ket­ing qui ren­for­cent les normes de genre ; leur essen­tial­i­sa­tion du corps féminin autour de ses fonc­tions repro­duc­tives ; leur util­i­sa­tion par des mutuelles ou des entre­pris­es pour sur­veiller les désirs de grossesse de leurs employé·es ; leur idéolo­gie poli­tique par­fois dou­teuse. À la fin de 2022, une longue enquête du site améri­cain Busi­ness Insid­er révélait ain­si la pop­u­lar­ité crois­sante du mou­ve­ment natal­iste dans la Sil­i­con Val­ley, qui souhaite « réin­ven­ter la repro­duc­tion » avec des entre­pris­es pro­posant des aides à la fer­til­ité, des utérus arti­fi­ciels ou des tests géné­tiques sur les embryons, acces­si­bles seule­ment aux plus fortuné·es.

Répondre aux besoins

Faut-il con­damn­er toute la femtech pour autant ? L’approche de Drip, ain­si que celle d’autres pro­jets non com­mer­ci­aux sim­i­laires (Euki, Peri­od­i­cal), est plutôt d’œuvrer à une réap­pro­pri­a­tion de ces tech­nolo­gies. Si des femmes utilisent des appli­ca­tions ou d’autres ser­vices con­nec­tés dans leur par­cours san­té, il faut leur pro­pos­er de meilleurs out­ils, plutôt que leur reprocher leurs besoins. Car der­rière le suc­cès de la femtech se cachent en fait des usages rich­es et divers : des femmes qui utilisent ces appli­ca­tions comme filet de sécu­rité en plus d’une con­tra­cep­tion clas­sique, des malades chroniques qui souhait­ent enreg­istr­er leurs douleurs, des adolescent·es qui n’ont pas for­cé­ment accès à des infor­ma­tions sur les règles et/ou la sex­u­al­ité dans leur famille, des per­son­nes déçues de leur rela­tion avec leur médecin, etc.


250 000 dol­lars
C’est la somme ver­sée à l’État de Cal­i­fornie en 2020 par l’entreprise qui a créé Glow, une appli­ca­tion de suivi men­stru­el qui présen­tait plusieurs failles de sécu­rité.


« Ce phénomène nous inter­pelle, car il révèle un man­que­ment dans la prise en charge publique de beau­coup d’aspects de la san­té des femmes. En con­séquence, on assiste à un détourne­ment de leurs démarch­es vers des entre­pris­es privées », explique Cather­ine Vidal, neu­ro­bi­ol­o­giste et core­spon­s­able du groupe de tra­vail Genre et recherche en san­té, du comité d’éthique de l’Inserm. Dans ce cadre, elle a mené début 2023 une série d’auditions sur la femtech, après avoir tra­vail­lé sur la men­strutech en 2022 : « Bien sûr, cela soulève de nom­breux prob­lèmes éthiques. Mais cela démon­tre aus­si un besoin de fournir des espaces et des plate­formes de qual­ité aux femmes et à leurs reven­di­ca­tions de san­té. »

Lucie Ron­faut est jour­nal­iste indépen­dante, spé­cial­isée dans les nou­velles tech­nolo­gies et la cul­ture web. Elle est l’autrice de la newslet­ter heb­do­madaire #Règle30, qui traite du numérique avec un point de vue inclusif et fémin­iste.

 

Maëlle Réat a illus­tré cet arti­cle. Illus­tra­trice de ban­des dess­inées et autrice, elle a pub­lié en 2022 Comme une grande (Virages graphiques).

 


(1) L’arrêt dit Roe vs Wade est une dis­po­si­tion con­sti­tu­tion­nelle datant de 1973 et garan­tis­sant le droit à l’avortement dans tout le pays. Son abro­ga­tion par la Cour suprême des États-Unis per­met aux États d’interdire l’avortement.

(2) Le syn­drome des ovaires polykys­tiques, fréquent, est dû à un dérè­gle­ment hor­mon­al.

Lucie Ronfaut

Journaliste indépendante, spécialisée dans les nouvelles technologies et la culture web. Elle est l’autrice de la newsletter hebdomadaire #Règle30 qui traite du numérique avec un point de vue inclusif et féministe. Voir tous ses articles

Habiter : brisons les murs !


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