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« L’accès à la PMA reste trop théorique »

Céline Ces­ter, prési­dente de l’association Les Enfants d’Arc En Ciel, se bat depuis onze ans pour accom­pa­g­n­er les familles LGBTQ+ dans les dif­férentes démarch­es que néces­site un pro­jet parental. Un an après l’ouverture en France de la PMA (pro­créa­tion médi­cale­ment assistée) à toutes les femmes, le « faire famille » demeure un par­cours dif­fi­cile pour nom­bre de per­son­nes.
Publié le 22/06/2023

Modifié le 16/01/2025

Accès à la PMA - La Déferlante 7
Béa Uhart

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°7. La Défer­lante est une revue trimestrielle indépen­dante con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société.

Quel com­bat porte votre asso­ci­a­tion Les Enfants d’Arc En Ciel ?

Ce qui m’y a amenée, il y a onze ans, c’était ma volon­té de devenir maman, de fonder une famille. Comme bien des les­bi­ennes, j’avais besoin d’infos : com­ment faire, où aller, quels sont nos droits ? C’était com­pliqué. J’ai ren­con­tré cette asso­ci­a­tion, qui m’a apporté des répons­es, et je me suis investie. Au fil des années, j’ai pris de plus en plus de respon­s­abil­ités. Je mil­i­tais déjà depuis longtemps [chez Aides, asso­ci­a­tion française de lutte con­tre le VIH et les hépatites virales]. L’approche com­mu­nau­taire est très impor­tante pour moi. Ce qui me plaît, dans l’idée de rassem­bler des infor­ma­tions et de les met­tre à dis­po­si­tion des autres, c’est que l’on devient véri­ta­ble­ment acteurs et actri­ces de la lutte et que les per­son­nes que l’on aide le devi­en­nent aus­si. Quand est arrivé le com­bat pour la PMA pour tous et toutes, on l’a mené avec beau­coup de con­vic­tion. Mais on a accueil­li le résul­tat avec beau­coup de décep­tion.

La loi fête sa pre­mière année, où en est-on de son appli­ca­tion?

Le sim­ple fait que des femmes puis­sent désor­mais rester en France pour être suiv­ies médi­cale­ment, c’est déjà énorme. Mais en fonc­tion de l’endroit où l’on habite, l’accès à la PMA est plus ou moins théorique. J’étais récem­ment en réu­nion avec du per­son­nel de Cecos (cen­tres d’étude et de con­ser­va­tion des œufs et du sperme humains) : actuelle­ment, le pre­mier ren­dez-vous est don­né pour le dernier trimestre 2023 ! À Lyon et à Mont­pel­li­er, c’est com­pliqué, il faut atten­dre deux ans et demi pour le pre­mier essai… mais à côté de ça, on a des cen­tres qui don­nent des ren­dez-vous à six ou neuf mois, ce qui cor­re­spond aux délais habituels pour les spé­cial­istes.

Avec le temps, on va y arriv­er. Mais atten­dre, c’est com­pliqué. Dès que les femmes approchent de la quar­an­taine, les cen­tres don­nent moins de ren­dez-vous. Il y a tou­jours beau­coup d’incompréhension dans les salles d’examen, des ques­tions mal­adroites et des dis­cours de médecins qui relèvent d’un manque de respect. Cela va être un tra­vail très long pour que le per­son­nel médi­cal apprenne à tra­vailler avec des cou­ples les­bi­ens, à anticiper avec justesse les échogra­phies endovagi­nales, à ne pas pos­er la ques­tion « avez-vous des rap­ports sex­uels ? ». On a des retours de ren­dez-vous avec des psys qui sont cat­a­strophiques… Mais on a aus­si des ser­vices qui ont tout mis en œuvre pour accueil­lir cor­recte­ment ce nou­veau pub­lic, qui ont tra­vail­lé avec nous pour savoir com­ment le recevoir.


« La PMA pour toutes, c’est en grande par­tie des mots… Pour nous, ce com­bat n’est pas
théorique, on va se mobilis­er, encore, dans les mois et les années à venir. »


Vous avez espoir d’éduquer aus­si les professionnel·les qui ne viendraient pas vers vous?

On a par­ticipé à un webi­naire à l’initiative de la fédéra­tion des Cecos en mars 2022 : nous
avons eu toute une mat­inée pour expli­quer les  ressen­tis et les besoins des femmes que l’on ren­con­tre. J’espère que ça a porté ses fruits, mais claire­ment, il faudrait un tra­vail de longue haleine pour certain·es psys. Certain·es deman­dent com­ment les patientes comptent par­ler à l’enfant de sa con­cep­tion: c’est intime. D’autres leur deman­dent ce qu’elles pensent de l’anonymat des don­neurs : c’est hors sujet. Un Cecos a affir­mé à des femmes, début 2022, qu’ils n’avaient «pas encore les décrets » pour organ­is­er les ren­dez-vous ! Je me dis que, si nous n’étions pas là, ces femmes-là attendraient tou­jours qu’on leur donne un feu vert. Voilà pourquoi je lutte, parce que rien n’est jamais ter­miné. Pour garder le moral, au quo­ti­di­en, il faut vrai­ment se con­cen­tr­er sur les choses pos­i­tives. Il y a eu par exem­ple la créa­tion du Comité de suivi de l’Agence de bio­médecine, dont la pre­mière réu­nion s’est tenue en novem­bre 2021. Il s’agit d’un espace formel et insti­tu­tion­nel qui nous per­met de relay­er les retours de ter­rain. Ses mem­bres sont intervenu·es sys­té­ma­tique­ment quand des ren­dez-vous psys s’étaient mal passés.

Il y a des exclu·es de la PMA et de la fil­i­a­tion: les per­son­nes trans. Com­ment tra­vaillez-vous avec elles?

Nous sommes con­scientes qu’il faut con­tin­uer de lut­ter pour que toutes les per­son­nes exclues obti­en­nent les mêmes droits. Les per­son­nes trans en effet, mais aus­si les mères sociales, sans droits sur leurs enfants, celles qui n’entrent pas dans les dis­posi­tifs juridiques, car elles ne sont pas passées par la PMA… Je trou­ve inad­mis­si­ble que des per­son­nes restent sans solu­tion, sans droits sur la fil­i­a­tion. Nous sommes une petite asso­ci­a­tion. De sep­tem­bre à décem­bre 2021 nous avons reçu plus de 4000 deman­des d’accompagnement. Depuis le début de l’année, c’est cinq à dix deman­des par jour que nous devons absorber. C’est colos­sal, cette ges­tion du « ser­vice après-vente » de la loi bioéthique. Cer­taines ne com­pren­nent pas les infos, s’interrogent sur les cas­es dans lesquelles elles entrent. En ce qui con­cerne la fil­i­a­tion, toutes les semaines, des femmes enceintes qui ont fait une PMA à l’étranger nous con­tactent parce qu’elles s’étonnent de ne pas pou­voir faire de recon­nais­sance anticipée chez le notaire. Il y a tou­jours des for­mu­laires Cer­fa qui ne sont pas mis à jour. Le min­istère de la Jus­tice fait la sourde oreille et c’est à nous d’insister. Nous obtenons des réac­tions, des répons­es à nos mails, que quand on leur dit « on va com­mu­ni­quer auprès des médias ». La PMA pour toutes, c’est en grande par­tie des mots… Pour nous, ce com­bat n’est pas théorique, on va se mobilis­er, encore, dans les mois et les années à venir.

Êtes-vous con­fron­tée à ce qu’on appelle la fatigue mil­i­tante?

Cer­taines sont fatiguées, d’autres sont par­ties parce qu’elles ont estimé qu’elles avaient fait leur part du boulot. Je me suis posé la ques­tion d’arrêter, mais j’ai finale­ment renou­velé mon man­dat cette année. Quand l’envie et les con­vic­tions sont là, les coups de fatigue et les réflex­ions qui vont avec per­me­t­tent de retrou­ver l’énergie et même de se mobilis­er davan­tage. La colère est aus­si un très bon moteur. Le con­texte actuel, avec la mon­tée des extrêmes, la remise en ques­tion du droit à l’avortement, c’est très préoc­cu­pant. Je pense que cela nous pousse à réaf­firmer encore plus fort que cer­taines choses ne sont pas accept­a­bles. J’étais là en 2012, dans la rue avec mes slo­gans «on veut plus d’égalité». Dix ans après, nous n’avons tou­jours pas accès aux mêmes droits que les autres. On a l’impression que, comme des pigeons, il faudrait qu’on se con­tente des miettes que l’on con­sent à nous don­ner : la recon­nais­sance anticipée, l’accès pour cer­taines à la PMA… Mais on ne s’envolera pas : tant que cer­taines devront con­tin­uer de pay­er pour leur fil­i­a­tion, nous aurons tou­jours faim.

1. Les Cecos indiquent sur leur site que le délai d’attente entre la pre­mière prise de ren­dez-vous en vue un d’un don de sper­ma­to­zoïdes et l’attribution des pail­lettes de sperme pour une PMA est de 12 à 18 mois. Le par­cours de PMA prévoit au min­i­mum une con­sul­ta­tion médi­cale, une con­sul­ta­tion psy­chologique, une démarche légale auprès du notaire, une prise en charge par un·e gyné­co­logue spécialisé·e et l’attribution des pail­lettes.

Anne-Laure Pineau

Journaliste pigiste indépendante, membre du collectif Youpress et de l’AJL (Association des journalistes lesbiennes, gay, bi·es, trans et intersexes). Pour ce numéro, elle a écrit le scénario de la BD sur Diana Sacayan. Voir tous ses articles

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Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°7. La Défer­lante est une revue trimestrielle indépen­dante con­sacrée aux fémin­ismes et au genre. Tous les trois mois, en librairie et sur abon­nement, elle racon­te les luttes et les débats qui sec­ouent notre société.


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