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« Marielle Franco a été tuée parce qu’elle était noire »

Publié le 19/03/2021

Modifié le 16/01/2025

Arielle, la sœur de Marielle Franco
Bléia Cam­pos 
[ARCHIVES 19 mars 2021] Il y a trois ans, Marielle Franco, activiste brésilienne, noire et bisexuelle était assassinée. Pour La Déferlante, les journalistes indépendantes Sarah Benichou et Juliette Rousseau ont rencontré à Rio de Janeiro sa sœur Anielle qui perpétue l’héritage de ses combats antiracistes et féministes. Un reportage au long cours sur les héritières de Marielle Franco sera publié dans le prochain numéro de notre revue qui paraîtra en juin prochain.

Où en est l’en­quête sur la mort de votre sœur Marielle Fran­co ?
Les assas­sins ont été arrêtés en 2019, mais ce que nous voulons c’est savoir qui leur a don­né l’ordre de tir­er. Nous n’avons tou­jours pas la date du procès mais nous avons eu une bonne nou­velle récem­ment : l’affaire sera jugée par un jury pop­u­laire. Sans cela, il n’était pas cer­tain que les assas­sins soient con­damnés.  Alors que ces deux hommes se taisent depuis deux ans, la peur de la prison pour­rait les motiv­er à rompre leur silence. Mais cette bataille sera dif­fi­cile.

Quelles sont vos prin­ci­pales attentes vis-à-vis de la procé­dure judi­ci­aire en cours ? 
Nous voulons des répons­es. Nous les méri­tons, en tant que famille bien sûr, mais nous pen­sons égale­ment que le monde entier y a droit et les attend. Marielle représen­tait beau­coup pour les Brésilien·nes. Nous, sa famille, ne sommes jamais directe­ment informé·es de l’avancement de l’enquête. Nous n’avons jamais eu accès au dossier d’in­struc­tion. Nos avo­cats non plus. Les seules infor­ma­tions dont nous dis­posons sont celles qu’on lit dans la presse. Nous atten­dons de voir ce qui va sor­tir cette année. En général, les mag­is­trats lais­sent échap­per quelques infor­ma­tions au mois de mars parce qu’il y a de gross­es mobil­i­sa­tions pour l’anniversaire de l’assassinat de Marielle.

Arielle, la sœur de Marielle Franco

Arielle, la sœur de Marielle Fran­co © Bléia Cam­pos

La phrase « Qui a com­man­dité la mort de Marielle ? » (“Quem Man­dou Matar Marielle ?”) a été partagée des dizaines de mil­liers de fois sur les réseaux soci­aux le 8 décem­bre dernier, pour les 1 000 jours de l’assassinat de Marielle. Avez-vous obtenu des répons­es à cette ques­tion ?
Nous pou­vons déjà être certain·es que le don­neur d’ordre n’est pas n’im­porte qui et que des per­son­nes très haut placées sont impliquées dans cette affaire, car il faut dis­pos­er d’un cer­tain pou­voir pour com­man­diter ce type d’assassinat [d’après la presse brésili­enne, l’enquête pointe vers le prési­dent Jair Bol­sonaro et l’un de ses fils, Flavio]. Un jour, nous saurons qui a don­né l’ordre de tuer Marielle mais, vu la façon dont cela s’est passé et les cer­cles de pou­voir que l’on imag­ine impliqués, je crois qu’il y a peu de chances que l’on con­naisse son iden­tité dans un avenir proche.

« MARIELLE INCARNAIT DE MULTIPLES COMBATS. SON ASSASSINAT A PROVOQUÉ UNE PRISE DE CONSCIENCE CHEZ DE NOMBREUSES FEMMES »

C’est l’Institut Marielle Fran­co qui a ini­tié la cam­pagne autour des 1 000 jours de l’assassinat. Quel est le rôle de cette struc­ture ? 
L’In­sti­tut Marielle Fran­co a été créé en 2019 et a gag­né en vis­i­bil­ité en 2020. Notre objec­tif était de ren­forcer et d’officialiser l’action de sa famille : nous voulons entretenir son héritage et défendre sa mémoire à chaque fois qu’elle est attaquée. À plus long terme, nous voulons égale­ment […]

lancer des « écoles Marielle », qui seront des lieux de for­ma­tion poli­tique pour les jeunes des fave­las.
Avec la pandémie du Covid-19, nous avons dû repenser notre pro­gramme d’action, sur la forme mais aus­si sur le fond. En plus des morts qu’elle a provo­qués, cette crise a fait revenir la famine dans cer­taines zones du Brésil. Trou­ver des solu­tions aux prob­lèmes que ren­con­trent les plus fragilisé·es par cette pandémie aurait été une préoc­cu­pa­tion de Mari, si elle était encore en vie. C’est pourquoi l’Institut a décidé d’a­gir en par­tic­i­pant au sou­tien des familles les plus dému­nies de la zone nord de Rio.

Portrait de Marielle Franco par l'artiste Luis Bueno dans une rue de São Paulo

Por­trait de Marielle Fran­co par l’artiste Luis Bueno dans une rue de São Paulo

Toute une généra­tion de femmes noires s’est engagée en poli­tique suite à l’assassinat de Marielle. Com­ment regardez-vous ces héri­tières de votre sœur ?
Marielle incar­nait de mul­ti­ples com­bats. Son assas­si­nat a provo­qué une prise de con­science chez de nom­breuses femmes notam­ment chez les femmes noires. Le fait que Marielle ait été assas­s­inée à la sor­tie d’une réu­nion avec d’autres femmes noires est très sig­ni­fi­catif.

Rena­ta Souza, députée noire de l’assemblée lég­isla­tive de l’État de São Paulo (ALESP) et anci­enne mem­bre du cab­i­net de Marielle Fran­co, qual­i­fie son assas­si­nat de « fémini­cide poli­tique ».  Qu’en pensez-vous ? 
Par­ler de « fémini­cide poli­tique » risque de réduire la mort de Marielle à un assas­si­nat poli­tique alors que c’est plus que cela. L’assassinat de Marielle racon­te aus­si la poli­tique d’assassinats sys­témiques dont sont vic­times les femmes noires au Brésil. Ici, nos corps sont les plus vul­nérables : l’É­tat lui-même les con­sid­ère comme jeta­bles. Pour moi, Marielle n’a pas été tuée parce qu’elle était élue ou parce qu’elle fai­sait de la poli­tique, elle a été tuée parce qu’elle était une femme noire, qu’elle s’as­sumait comme bisex­uelle, comme fave­la­da [habi­tante d’une favela] et comme mère céli­bataire. Si tu es une femme comme Marielle et que tu arrives dans une insti­tu­tion gérée par un groupe d’hommes hétéros et blancs, tu gênes for­cé­ment. Aucune per­son­ne blanche n’aurait été tuée de cette manière. Parce que Marielle était de celles dont le corps est con­sid­éré comme jetable, ces hommes ont pu se dire :  « On va la tuer, ça ne fera aucune dif­férence. »

« AUCUNE PERSONNE BLANCHE N’AURAIT ÉTÉ TUÉE DE CETTE MANIÈRE »

Com­ment peut-on soutenir votre com­bat en dehors du Brésil ?
Toutes les infor­ma­tions qui cir­cu­lent en dehors du Brésil nous don­nent de la force, notam­ment celles qui rap­pel­lent que nous voulons savoir qui a com­man­dité le meurtre de ma sœur. Il y a aus­si un enjeu à ne pas laiss­er la mémoire de Marielle dis­paraître. Les gens ont ten­dance à penser que la mémoire de Marielle ne peut être entretenue que par les per­son­nes qui évolu­ent dans les insti­tu­tions poli­tiques. Je ne suis pas d’accord : la tia [« tante », for­mule affectueuse] qui vend des hot-dogs, ici, en bas de la rue, cette femme noire, elle aus­si, peut trou­ver une source d’inspiration en la per­son­ne de Marielle. L’héritage de ma sœur va bien au-delà des assem­blées par­lemen­taires. Mari est effec­tive­ment là-bas, dans les insti­tu­tions, mais aus­si dans plein d’autres endroits. Et dans le monde entier.

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Sarah Benichou

Historienne et politiste de formation, Sarah Benichou se passionne pour l’enquête historique. En tant que journaliste indépendante, elle s’intéresse en particulier à l’extrême droite, au colonialisme, aux expériences juives et aux liens qu’entretiennent les femmes avec les instances de pouvoir. Elle est membre du collectif Youpress. Voir tous ses articles

Juliette Rousseau

Journaliste, autrice et éditrice, travaille sur les questions de justice sociale, de féminisme, d’anti-racisme, de justice climatique et sur les mouvements qui s’en revendiquent. Voir tous ses articles


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