Warning: Attempt to read property "ID" on int in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-content/themes/Divi/includes/builder/post/PostStack.php on line 62

Réforme des retraites : « Les femmes de chambre cessent souvent le travail vers 45 ans »

Publié le 03/02/2023

Modifié le 16/01/2025

La réforme des retraites, en débat depuis lundi 30 janvier au sein de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, est présentée tantôt comme un moyen de corriger les effets néfastes du système actuel pour les femmes aux carrières hachées, tantôt comme une réforme qui, au contraire, les pénalise. Parmi les professions les plus précaires – temps partiels fréquents, pénibilité forte – celles du nettoyage compte un grand nombre de femmes et de personnes issues de l’immigration. Quel avenir la réforme réserve-t-elle à ses travailleur·euses ? La réponse dans cet entretien avec Camille El Mhamdi, juriste de la Confédération nationale des travailleurs-Solidarité ouvrière (CNT-SO).

À quoi les tra­vailleurs et tra­vailleuses du net­toy­age doivent-elles s’attendre si la réforme des retraites est adop­tée ?

De façon générale, dans le sys­tème actuel, les pen­sions des femmes sont inférieures de 40 % à celles des hommes. Cette réforme ne met pas fin à cette iniq­ui­té. Au con­traire, en repous­sant l’âge légal de deux ans pour tout le monde, elle va en fait con­duire les femmes à tra­vailler, en moyenne, sept mois de plus, con­tre cinq mois pour les hommes. Le rap­port d’impact qui accom­pa­gne le pro­jet de loi le dit très claire­ment.

Cette injus­tice sera encore plus forte dans le secteur du net­toy­age en rai­son de sa struc­tura­tion. Parce qu’il s’agit d’un secteur par­ti­c­ulière­ment fémin­isé – par exem­ple, 95 % de nos adhérent·es sont des femmes –, mais aus­si parce que ces tra­vailleuses sont majori­taire­ment de nation­al­ité étrangère : elles sont sou­vent arrivées en France après l’âge de 30 ou 40 ans. Le fait de com­mencer à cotis­er tard les dessert mécanique­ment.

Les car­rières hachées sont par­ti­c­ulière­ment nom­breuses dans le secteur de la pro­preté. Cette réforme parvient-elle à gom­mer les effets d’une car­rière incom­plète ?

Non. Quand le gou­verne­ment bran­dit, par exem­ple, la prise en compte des con­gés parentaux dans la compt­abil­i­sa­tion des trimestres de coti­sa­tion, il la lim­ite à qua­tre trimestres sup­plé­men­taires. Or, les femmes tra­vail­lant […]

Les tâch­es liées au net­toy­age sont exclues des critères de péni­bil­ité du sys­tème des retraites.
Crédit pho­to : Cre­ative Com­mons.

à temps par­tiel pour des rémunéra­tions très bass­es ont ten­dance à pren­dre plus d’un an de con­gé parental, car il ne représente pas pour elles de perte sig­ni­fica­tive de revenus. Pour ces petits salaires, la reprise du tra­vail engage des frais – de garde d’enfants notam­ment – aux­quels il est dif­fi­cile de faire face. Ce qui est présen­té comme une avancée dans la réforme est donc claire­ment insuff­isant.

EN FIN DE CARRIÈRE, CES FEMMES SONT SOUVENT SOLLICITÉES POUR AIDER LEURS FAMILLES,
AVEC DES CONSÉQUENCES NÉFASTES
SUR LEUR NIVEAU DE RETRAITE
 

Même remar­que pour les fameuses pen­sions min­i­males à 1 200 euros. La con­di­tion pour y par­venir est de cotis­er 43 annu­ités. Très peu de tra­vailleuses du secteur du net­toy­age y parvi­en­nent. Elles ne seront donc pas con­cernées par la mesure présen­tée comme la plus sociale de cette réforme. Par ailleurs les péri­odes de non-emploi ne seraient pas davan­tage pris­es en compte que dans le sys­tème actuel [6 employé·es sur 10 ont con­nu un épisode de non-emploi avant de trou­ver leur employeur actuel.

Que va-t-il se pass­er spé­ci­fique­ment pour les travailleur·euses à temps par­tiel, qui représen­tent plus de la moitié des postes du secteur ?

Là non plus, la réforme ne règle rien des iné­gal­ités du sys­tème actuel. Pour valid­er un trimestre de retraite, il faut percevoir dans l’année un salaire représen­tant 150 fois le mon­tant du smic horaire brut. Si on est payé au niveau du smic – les agents d’entretien ont générale­ment un taux horaire très légère­ment au-dessus – il faut donc réalis­er 150 heures en trois mois pour valid­er un trimestre. Dès lors, si on ne tra­vaille que 40 heures par mois au smic, le trimestre n’est pas compt­abil­isé comme cotisé. Ce sont des sit­u­a­tions rares, mais qui exis­tent tout de même.
La ques­tion se pose par­ti­c­ulière­ment pour les femmes en fin de car­rière. Elles sont sou­vent sol­lic­itées pour aider leurs familles : s’occuper de leurs petits-enfants ou de leurs par­ents âgés, avec des con­séquences néfastes sur leur niveau de retraite. Là non plus, la réforme n’apporte aucune véri­ta­ble amélio­ra­tion.

On sait que, au-delà des trou­bles mus­cu­lo-squelet­tiques dont elles souf­frent, ces professionnel·les déclar­ent fréquem­ment des can­cers en rai­son de l’exposition aux com­posants chim­iques des pro­duits ménagers. Ce pro­jet de réforme en tient-il compte ?

Les métiers du net­toy­age sont des métiers à péni­bil­ité forte. Par exem­ple, dans le secteur de l’hôtellerie, les femmes de cham­bre arrê­tent sou­vent de tra­vailler vers 45 ans. Mais les critères de péni­bil­ité pou­vant con­cern­er le secteur du net­toy­age ont été exclus par les ordon­nances Macron en 2017 : la manu­ten­tion manuelle de charges, les pos­tures pénibles, les vibra­tions mécaniques et l’exposition aux risques chim­iques.
Pour ce qui est du tra­vail de nuit qui est, lui, recon­nu, il implique de tra­vailler neuf heures, de façon con­séc­u­tive, entre 21 heures et 7 heures. Or, les femmes de ménage com­men­cent sou­vent à tra­vailler à 3 heures du matin, ou tard le soir, mais elles ne tra­vail­lent que très rarement neuf heures d’affilée. Elles sor­tent donc de cette caté­gorie.

En revanche, ce qui va rester dans cette réforme, c’est l’individualisation de la prise en compte de la péni­bil­ité, avec le compte pro­fes­sion­nel de préven­tion (C2P). Mais cela implique que la salariée en fasse la demande elle-même. Or, dans le secteur du net­toy­age, la plu­part d’entre elles sont pré­caires, très isolées, et n’ont pas con­nais­sance de ce droit. Quant à celles tra­vail­lant chez des par­ti­c­uliers, elles ne sont tout sim­ple­ment pas con­cernées par ce dis­posi­tif.

  Pour aller plus loin :

🗞️ Dans Libéra­tion, les soci­o­logues Sibylle Gol­lac et Céline Bessière dis­sèquent un impen­sé de la réforme des retraites : si les femmes y sont défa­vorisées, c’est parce que le tra­vail domes­tique qu’elles effectuent gra­tu­ite­ment n’est pas pris en compte dans le cal­cul des pen­sions.

📰 Marie, 66 ans, con­seil­lère Pôle emploi, ne peut pas encore béné­fici­er de sa retraite à taux plein. Elle a pour­tant com­mencé à tra­vailler à 14 ans, con­nu des dizaines de métiers, un divorce et un can­cer. Son témoignage est à lire dans Medi­a­part.

→ Retrou­vez la revue de presse ain­si que les coups de cœur de la rédac­tion juste ici.

Couverture La Déferlante #9 - Baiser pour une sexualité qui libère

Précommandez le dernier numéro de La Déferlante  !

Pour ce pre­mier numéro de 2023, nous con­sacrons notre dossier au thème BAISER car, oui la révo­lu­tion sex­uelle reste encore à venir ! On y par­le de sex­olo­gie fémin­iste, de désirs qui font désor­dre, on y décon­stru­it les normes validistes et on plonge à pieds joints dans le réc­it de sci­ence-fic­tion éro­tique « Tout est chaos », signé Wendy Delorme et Elise Bon­nard.

⟶ Vous souhaitez recevoir La Défer­lante, au tarif de 15 euros (au lieu de 19), et sans engage­ment ? Décou­vrez notre offre d’abonnement à durée libre.

Sylvie Fagnart

Journaliste indépendante au sein du collectif Hors cadre, elle s’intéresse au numérique et aux questions de genre. Elle travaille avec le magazine en ligne Chut! et l’émission « Affaires sensibles » sur France Inter. Dans le numéro Travailler, elle cosigne le focus sur le travail domestique et l’histoire d’un slogan. Voir tous ses articles


Notice: ob_end_flush(): Failed to send buffer of zlib output compression (1) in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-includes/functions.php on line 5471

Notice: ob_end_flush(): Failed to send buffer of zlib output compression (1) in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-includes/functions.php on line 5471

Notice: ob_end_flush(): Failed to send buffer of zlib output compression (1) in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-content/plugins/really-simple-ssl/class-mixed-content-fixer.php on line 107