Droits des femmes, droits des enfants : même combat ?

par

Publié le 07/02/2022

Modifié le 16/01/2025

Lucile Gautier

Les fémi­nistes de la deuxième vague ont eu tendance à mettre de côté la maternité jugée aliénante. Au point d’alimenter l’idée selon laquelle les enfants n’auraient pas de place dans l’histoire féministe française. Les mili­tantes Goundo Diawara et Emmanuelle Piet et la socio­logue Camille Masclet débattent de la manière dont les luttes fémi­nistes se sont emparées de la question des droits des enfants. Pour décons­truire les méca­nismes de domi­na­tion, la prise en compte des violences qui leur sont faites est indispensable.

Un récit puissant sur la «maternité esclave» né dans les années 1970 irrigue encore les luttes fémi­nistes, par exemple quand il est question d’assumer son non-désir d’enfant. Ces discours ont pu laisser penser qu’il n’y avait pas de place pour les enfants dans le féminisme. Au regard de l’histoire, est-ce un raccourci non fondé ?


CAMILLE MASCLET
Dans les années 1970, au-delà des reven­di­ca­tions pour un accès à la contra­cep­tion et à l’avortement libre et gratuit, qui sont assez consen­suelles chez les fémi­nistes, il y avait un débat vif autour de la maternité, consi­dé­rée comme un élément central dans l’aliénation des femmes par toute une frange de mili­tantes. Un ouvrage publié en 1975, pré­ci­sé­ment intitulé Maternité esclave, symbolise cette concep­tion. Il s’agit avant tout, alors qu’on cherche à décons­truire les rouages de l’oppression des femmes, de penser la maternité comme l’un des leviers de cette oppres­sion et de lutter contre l’assignation des femmes à la pro­duc­tion et à l’entretien des enfants et du foyer. Une autre concep­tion, parfois désignée sous le terme de « fémi­ni­tude » ou « mater­ni­tude », était aussi présente à l’époque. Portée par les fémi­nistes dif­fé­ren­tia­listes, elle actait une dif­fé­rence des sexes et cherchait à valoriser le féminin et la maternité. Selon elles, la maternité consti­tuait un pouvoir aux mains des femmes. « L’usine est aux ouvriers, l’utérus est aux femmes, la pro­duc­tion du vivant nous appar­tient », clamait ainsi un slogan du groupe Psychanalyse et politique. Longtemps, on a opposé ces deux seules visions. […]

Les mots importants

Infantisme

La pédo­psy­chiatre et socio­logue Laelia Benoit...

Lire plus