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Assistantes maternelles, des journées sans fin

Dans un secteur de la petite enfance en crise, la garde d’enfants à domi­cile est plus que jamais essen­tielle. Les assis­tantes mater­nelles – pour l’immense majorité des femmes – pro­duisent un tra­vail invis­i­bil­isé et peu rémunéra­teur, au croise­ment d’enjeux fémin­istes. Reportage auprès de qua­tre d’entre elles en région lyon­naise.
Publié le 26/01/2025

Modifié le 14/02/2025

Daisy Audouze dans son garage aménagé en salle de jeu pour les enfants qu’elle garde. Crédit : Elsa Biyick pour La Déferlante
Daisy Audouze dans son garage amé­nagé en salle de jeu pour les enfants qu’elle garde. Crédit : Elsa Biy­ick pour La Défer­lante

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°17 Tra­vailler, parue en févri­er 2025. Con­sul­tez le som­maire.

Toutes les pho­tos du reportage ont été pris­es chez Daisy Audouze, assis­tante mater­nelle à Heyrieux, à une trentaine de kilo­mètres de Lyon, le 13 novem­bre 2024.

Dans la salle de jeu, des caiss­es col­orées s’alignent sur les étagères, rem­plies de peluches, de jou­ets et de livres. Sus­pendues un peu plus loin, des pous­settes pour poupons côtoient celles à taille d’enfant.

Ce qu’on devine être un ancien garage est baigné par le soleil qui fil­tre à tra­vers la porte vit­rée. Sur le mur s’alignent de petits porte-man­teaux aux­quels les enfants accrochent blousons, bon­nets et sacs à dos. Daisy Audouze, 53 ans, les accueille tous les jours de la semaine. Cette mai­son est son lieu de tra­vail depuis main­tenant vingt-qua­tre ans. Ce jour-là, pour notre ren­con­tre, elle a con­vié trois col­lègues, Sophie, Car­o­line et Marielle, qui, comme elle, sont assis­tantes mater­nelles à Heyrieux, petite com­mune au milieu des champs, en périphérie de Lyon.

Toutes les qua­tre exer­cent depuis plusieurs années cette pro­fes­sion ultra fémin­isée (elle est com­posée à 99 % de femmes selon l’Insee) et dev­enue essen­tielle dans un secteur de la petite enfance en crise : manque de places en crèche, faibles rémunéra­tions, dégra­da­tion des con­di­tions de tra­vail, mul­ti­pli­ca­tion des cas de mal­trai­tance en col­lec­tiv­ité, etc. Les places d’accueil chez les assis­tantes mater­nelles représen­tent 53 % des places disponibles en accueil de la petite enfance. C’est donc le mode de garde majori­taire en France. Si 56 % des enfants restent avec leurs par­ents avant leur entrée à l’école, 20 % passent leurs journées chez une assis­tante mater­nelle, con­tre 18 % à la crèche, selon l’enquête mode de garde et d’accueil des jeunes enfants de la Direc­tion de la recherche, des études, de l’évaluation et des sta­tis­tiques (Drees) de 2023.

Partout dans la maison de Daisy Audouze, les objets rappellent la présence quotidienne des enfants. Crédit : Elsa Biyick pour La Déferlante.
Partout dans la mai­son de Daisy Audouze, les objets rap­pel­lent la présence quo­ti­di­enne des enfants. Crédit : Elsa Biy­ick.


Les journées de Daisy débu­tent à 6 heures tous les jours de la semaine. Les enfants arrivent pro­gres­sive­ment dans la mat­inée et repar­tent à 18 h 30, ce qui lui fait des ampli­tudes horaires de plus de 10 heures. Un écart courant dans la pro­fes­sion : à 7 heures du matin, un tiers d’entre elles ont déjà débuté leur journée selon l’enquête Con­di­tions de tra­vail de la Dares de 2019. Le temps de tra­vail se dis­cute au cas par cas avec l’employeur, le max­i­mum autorisé par la con­ven­tion col­lec­tive est de 45 heures par semaine (1) – la durée moyenne est de 41 heures. Dans le cas des assis­tantes mater­nelles employées par des particulier·es, qui représen­tent 80 % des effec­tifs, cette règle s’applique pour chaque enfant, qui a son pro­pre emploi du temps. Dans les faits, en cumu­lant plusieurs con­trats dont les horaires peu­vent être décalés, une assis­tante mater­nelle sur qua­tre tra­vaille plus de 49 heures par semaine. C’est le cas de Daisy, qui lâche : « Au bout de cer­taines semaines de 55 heures, on en a ras le bol. »

Partout dans la maison de Daisy Audouze, les objets rappellent la présence quotidienne des enfants. Crédit : Elsa Biyick pour La Déferlante.
Dans la cui­sine de Daisy Audouze, assis­tante mater­nelle. Crédit : Elsa Biy­ick.


Mal­gré ces horaires à ral­longe, leurs rémunéra­tions men­su­elles sont faibles : en moyenne 1 233 euros net par mois, selon l’enquête emploi de l’Insee de 2023. Chaque pro­fes­sion­nelle fixe son tarif, com­pris entre un seuil planch­er de 2,74 euros net de l’heure et un pla­fond jour­nalier de 45,5 euros net. En 2022, le salaire horaire net d’une « ass’ mat’ » est en moyenne de 3,78 euros par enfant.

Pen­dant qua­tre ans, Daisy Audouze a enchaîné des con­trats courts : « J’avais onze enfants, ceux du mer­cre­di n’étaient pas ceux du reste de la semaine, et les enfants du same­di étaient encore dif­férents… » Mais la lég­is­la­tion a changé : depuis 2021, les assis­tantes mater­nelles sont lim­itées à qua­tre agré­ments pour les enfants de moins de 3 ans, délivrés par la Pro­tec­tion mater­nelle et infan­tile (PMI) de leur départe­ment. Chaque heure vacante dans un con­trat à temps par­tiel est com­pliquée à com­penser par un autre enfant. La ques­tion de la retraite est aus­si en jeu quand on prend peu d’enfants comme le racon­te Car­o­line : « Mes pre­mières années n’étaient pas compt­abil­isées, je ne coti­sais pas suff­isam­ment pour valid­er les trimestres. Pour avoir une retraite con­ven­able, j’ai com­pen­sé en prenant beau­coup plus d’enfants depuis une ving­taine d’années. »

Daisy Audouze en train de lire son planning de 
la semaine. L’accueil de plusieurs enfants (jusqu’à quatre) oblige souvent les assistantes maternelles 
à dépasser les 45 heures hebdomadaires. Crédit : Elsa Biyick pour La Déferlante.
Daisy Audouze en train de lire son plan­ning de la semaine. Crédit : Elsa Biy­ick.


Un travail administratif et comptable invisible


Aujourd’hui, Daisy atteint 2 400 euros net de salaire men­su­el avec ses qua­tre con­trats à temps plein. « Finan­cière­ment, on gagne quand même plus à être ici qu’à l’usine », estime-t-elle. Pour elle, comme pour beau­coup de femmes qui choi­sis­sent de devenir assis­tantes mater­nelles, l’enjeu du retour au tra­vail après une ou plusieurs mater­nités est d’ailleurs sou­vent mis en avant. « Une des grandes moti­va­tions avancées pour pra­ti­quer ce méti­er est la pos­si­bil­ité de mieux con­cili­er leur vie pro­fes­sion­nelle et per­son­nelle lors de l’arrivée d’enfants », explique l’économiste Julie Lazès, coautrice d’une étude (2) sur les con­di­tions de tra­vail dans la pro­fes­sion. C’est le cas pour Daisy Audouze, qui a débuté dans ce méti­er en 1996 : « J’aurais pu être cais­sière en grande sur­face ou vendeuse, mais assis­tante mater­nelle c’était plus pra­tique pour rester à la mai­son avec mon fils. » Comme d’autres, elle a trans­for­mé son expéri­ence de la mater­nité en un savoir-faire. Un emploi qu’elle aime, mais qui s’est révélé bien plus com­plexe qu’un sim­ple gar­di­en­nage d’enfants.

Ces femmes ont pris l’habitude de pré­par­er elles-mêmes leurs paies ou encore d’expliquer à leurs employeur·euses les sub­til­ités de leur con­ven­tion col­lec­tive. Une hyper com­pé­tence compt­able et admin­is­tra­tive qui con­stitue un sur­tra­vail, invis­i­ble, non con­sid­éré comme tel par les per­son­nes qui les emploient, et qui n’est pas comp­té dans leur salaire, détaille l’économiste Julie Lazès. Réputé plus coû­teux pour les par­ents qu’une garde en crèche, le coût réel de ce mode de garde est égale­ment fonc­tion du quo­tient famil­ial. La dif­férence entre les deux alter­na­tives est par­fois peu lis­i­ble. C’est ce qu’explique Daisy : « avec les com­plé­ments du mode de garde (CMG) de la CAF, puis le crédit d’impôt ensuite, au bout du compte, je leur coûte pas grand-chose, dix euros par jour de leur poche pour les par­ents les plus aisés ».

En plus du soin aux enfants, Daisy Audouze et ses collègues effectuent plusieurs heures de travail administratif non rémunéré chaque semaine. Crédit : Elsa Biyick pour La Déferlante.
L’accueil de plusieurs enfants (jusqu’à qua­tre) oblige sou­vent les assis­tantes mater­nelles à dépass­er les 45 heures heb­do­madaires. Crédit : Elsa Biy­ick.


Pré­par­er la mai­son, faire le ménage, par­fois cuisin­er les repas des enfants, gér­er la paie, rédi­ger les nou­veaux con­trats… À cette liste, Sophie ajoute une demande récur­rente depuis quelques années : la tenue de cahiers de suivi dans lesquels sont con­signés « l’heure du repas, de la sieste, ce que l’enfant a mangé ou lais­sé, les activ­ités, les prom­e­nades, le nom­bre de couch­es rem­plies… ». Dans ce besoin de la con­ti­nu­ité éduca­tive entre par­ents et « ass’ mat’ » s’exprime un con­trôle des tâch­es réal­isées dans la journée, qui n’est pas tou­jours bien vécu par les assis­tantes mater­nelles.

Si Daisy, Sophie, Car­o­line et Marielle se réjouis­sent de la bonne entente qui règne dans leurs rela­tions actuelles avec les par­ents, elles insis­tent sur les règles aux­quelles elles tien­nent, telles que le vou­voiement, « qui per­met le respect », plaide Daisy. « Il faut être ferme dès le début, sinon cer­tains ouvrent sans frap­per et entrent comme s’ils étaient chez eux », ajoute Car­o­line « et ils s’installent sur le canapé et dis­cu­tent avec vous pen­dant une heure », enchaîne Sophie. Autre règle fon­da­men­tale : faire respecter les horaires inscrits dans leur con­trat de tra­vail. Pour cela, Daisy fac­ture main­tenant 20 euros l’heure sup­plé­men­taire au-delà de celles prévues au con­trat, « j’en avais ras le bol, j’ai une vie après le tra­vail et je voulais qu’on respecte ma vie d’après ».

En plus du soin aux enfants, Daisy Audouze et ses collègues effectuent plusieurs heures de travail administratif non rémunéré chaque semaine. Crédit : Elsa Biyick pour La Déferlante.
En plus du soin aux enfants, Daisy Audouze et ses col­lègues effectuent plusieurs heures de tra­vail admin­is­tratif non rémunéré chaque semaine. Crédit : Elsa Biy­ick.

Des tâches répétitives

Faire de son espace privé son espace de tra­vail n’est pas sans con­séquences sur la vie famil­iale. Il faut amé­nag­er son salon pour en faire un lieu d’accueil le matin, puis ranger tous les jou­ets le soir pour retrou­ver son espace de vie. Des tâch­es répéti­tives qui ryth­ment des jours et des semaines mar­quées par un tra­vail sans fin. Des con­flits peu­vent éclater avec leurs pro­pres enfants, qui n’apprécient pas qu’on mette des lits dans leur cham­bre, par exem­ple. Lorsqu’elle décide d’aménager une salle pour les enfants dans son ancien garage, Daisy veut retrou­ver un espace à elle, « un peu de [s]on intim­ité ». Désor­mais il y a deux portes d’entrée : une pre­mière, pro­fes­sion­nelle, pour les par­ents, qui ouvre sur la salle de jeux ; la sec­onde pour l’espace de sa vie privée. Mais inévitable­ment, les deux sphères restent intriquées. Aujourd’hui céli­bataire, assise dans sa cui­sine, Daisy Audouze con­tem­ple son intérieur : « Si je veux un jour refaire ma vie, il fau­dra aus­si qu’un homme accepte ça », dit-elle en mon­trant la pièce débor­dant de jou­ets.

Les con­di­tions de tra­vail des assis­tantes mater­nelles sont directe­ment dépen­dantes de leur sit­u­a­tion con­ju­gale. « Leurs con­joints sont plus sou­vent cadres que dans la moyenne des employées, explique l’économiste Julie Lazès, leurs époux leur assurent un niveau de vie décent, et donc per­me­t­tent qu’elles fassent un tra­vail qui n’est pas for­cé­ment bien rémunéré, dans un loge­ment con­fort­able. » Si le cou­ple se sépare, les con­di­tions d’exercice de leur pro­fes­sion, donc leurs revenus, peu­vent en pâtir. Lorsque Marielle est mise à la porte par son ancien con­joint en 2011, elle emmé­nage en urgence chez sa sœur et y pour­suit son activ­ité avec l’accord des familles qui l’emploient. Mais elle n’obtient pas d’agrément pour ce nou­veau lieu et se voit con­trainte d’arrêter le tra­vail : « Il a fal­lu que je rende les enfants le soir même. » Puis elle a dû trou­ver en urgence un loge­ment dans la même zone géo­graphique, le rénover pour finir par retrou­ver, trois semaines après, son emploi et son nou­v­el agré­ment, « mais c’était un apparte­ment, alors cer­tains par­ents ont suivi mais d’autres préféraient que leurs enfants ail­lent en mai­son ».

Daisy Audouze a dû aménager sa maison de manière à créer des espaces réservés aux enfants. Crédit : Elsa Biyick pour La Déferlante.
Daisy Audouze a dû amé­nag­er sa mai­son de manière à créer des espaces réservés aux enfants. Crédit : Elsa Biy­ick.


Comme elles sont isolées chez elles, sans col­lègues de tra­vail, les freins sont nom­breux à une reven­di­ca­tion col­lec­tive pour une amélio­ra­tion des con­di­tions de tra­vail. Daisy Audouze est aujourd’hui syn­diquée au Spa­maf, syn­di­cat longtemps majori­taire dans la pro­fes­sion, auprès duquel elle trou­ve un sou­tien juridique et pra­tique. Sou­vent, les assis­tantes mater­nelles passent plusieurs journées sans voir d’autres con­sœurs. Elles ne peu­vent pas tou­jours pren­dre de pause au cours de la journée, c’est le cas quand un des enfants ne dort pas pen­dant le temps de sieste. Pour rompre la soli­tude, elles se dépla­cent par­fois à l’occasion d’un pique-nique au parc ou pour par­ticiper à des activ­ités à la médiathèque ou au relais petite enfance. C’est sou­vent ce que font Daisy, Sophie, Marielle et Car­o­line. Mais il arrive que la fatigue liée au déplace­ment prenne le dessus : « Debout, assise, porter, tir­er… Je fais tout à pied avec une pous­sette de 15 kilos et des enfants qui pèsent 10 kilos cha­cun », détaille Daisy, qui com­mence à accuser les années quand il faut « mon­ter à l’étage jusqu’à 16 fois par jour avec un enfant dans les bras ».


« J’aurais pu être cais­sière en grande sur­face mais assis­tante mater­nelle c’était plus pra­tique pour rester à la mai­son avec mon fils. »

Daisy Audouze, assis­tante mater­nelle


Toutes pointent un manque de recon­nais­sance des con­traintes de leur pro­fes­sion. Pour la soci­o­logue Car­o­line Ibos (3), tous les aspects de leur tra­vail sont « des com­pé­tences pro­fes­sion­nelles nat­u­ral­isées comme des com­pé­tences féminines », ce qui explique leur invis­i­bil­i­sa­tion. La pro­fes­sion d’assistante mater­nelle est, de fait, à l’intersection d’enjeux éminem­ment fémin­istes. Comme le souligne Car­o­line Ibos, « ce sont des femmes des class­es pop­u­laires qui, pour des rémunéra­tions faibles, per­me­t­tent à d’autres femmes d’avoir une activ­ité rémunérée. Les assis­tantes mater­nelles se trou­vent dans ce qu’on appelle en soci­olo­gie “les chaînes du care” » (con­sul­tez notre glos­saire de con­cepts). Chaîne au sens poly­sémique d’une délé­ga­tion du soin, et de pos­si­bil­ités entravées pour celles qui en ont la charge. L’émancipation des unes se fait au détri­ment des autres.

Si les assis­tantes mater­nelles ne sont pas des tra­vailleuses domes­tiques (con­sul­tez notre glos­saire de con­cepts) au sens juridique du terme, pour Car­o­line Ibos, « on peut les remet­tre dans un spec­tre de la domes­tic­ité puisqu’elles pren­nent soin chez elles d’enfants au béné­fice d’un foy­er qui n’est pas le leur ». Le rap­port de pou­voir employeur·euse-employé·e s’incarne alors ailleurs que sur le lieu de tra­vail. Il se loge par exem­ple dans le mot « nounou », util­isé couram­ment pour désign­er les assis­tantes mater­nelles. S’il est accep­té et appré­cié par Daisy, Sophie, Marielle et Car­o­line, il est rejeté par d’autres col­lègues. Il résume à lui seul toute la dimen­sion affec­tive du méti­er, dans lequel la rela­tion de tra­vail est façon­née par « quelque chose d’incommensurable : l’amour qu’on porte aux enfants », pour­suit Car­o­line Ibos. « Ce con­trat-là béné­fi­cie tou­jours à la famille, et les con­flits seront tou­jours traduits sur le plan des sen­ti­ments. »

À Heyrieux, qui compte 5 000 habitant·es, elles sont une quar­an­taine d’assistantes mater­nelles agréées à exercer dans un ray­on de plus de 20 kilo­mètres. Comme partout depuis plusieurs années, la pro­fes­sion perd des effec­tifs par manque d’attractivité. Mais sa com­po­si­tion sociale pour­rait évoluer. « Il y a des critères très pré­cis, créer une cham­bre pour l’enfant, respecter des normes san­i­taires et de sécu­rité, donc c’est acces­si­ble à des femmes de class­es pop­u­laires qui sont dans le péri­ur­bain, souligne Car­o­line Ibos. Elles accueil­lent les enfants des class­es moyennes ou des class­es moyennes supérieures. » Avec le vieil­lisse­ment des assis­tantes mater­nelles dans les cam­pagnes et les zones péri­ur­baines, « on peut prévoir une pénurie de femmes blanch­es. On peut sup­pos­er que des femmes racisées, sociale­ment plus frag­iles, pren­dront le relais », souligne Car­o­line Ibos. Ce sera un nou­veau mail­lon dans la « chaîne du care », qui risque de déséquili­br­er encore davan­tage les rap­ports de pou­voir entre employées et familles employeuses.

Dans la salle à manger de Daisy, à Heyrieux, Car­o­line con­clut le réc­it de ses journées d’un « c’est comme un tra­vail ». Marielle la reprend aus­sitôt : « Non, c’est un tra­vail ! »

(1) Les heures effec­tuées au-delà de 45 heures sont des heures sup­plé­men­taires « majorées » selon un tarif préal­able­ment dis­cuté lors de la rédac­tion du con­trat.

(2) Geneviève Cres­son, François-Xavier Devet­ter et Julie Lazès, « Être une femme et tra­vailler chez soi. Les assis­tantes mater­nelles, entre disponi­bil­ité éten­due et rémunéra­tion lim­itée », dans Que sait-on du tra­vail ?, Press­es de Sci­ence Po, 2023.

(3) Direc­trice du Lab­o­ra­toire d’études de genre et de sex­u­al­ité (Legs) de l’université Paris 8 et mem­bre du con­seil sci­en­tifique de l’Institut du genre. Elle est notam­ment coautrice de Vers une société du care. Une poli­tique de l’attention (Le Cav­a­lier bleu, 2019) et de Qui gardera nos enfants ? Les nounous et les mères (Flam­mar­i­on, 2012).

Elsa Biy­ick
Pho­to­jour­nal­iste et pho­tographe exerçant à Lyon, iel tra­vaille sur les luttes sociales et sur les représen­ta­tions des minorités de genre dans les milieux mil­i­tants et cul­turels.

Les mots importants

Le « care »

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Camille Regache

Journaliste indépendante, elle travaille sur les questions de genre et LGBT+, dans le prolongement de son podcast « Camille » (Binge Audio) sur la norme hétérosexuelle. Elle est membre du collectif Hors cadre et de l’Association des journalistes lesbiennes, gay, bi·e·s, trans et intersexes (AJL). Elle signe le reportage sur les assistantes maternelles et l’histoire des Lesbian Avengers. Voir tous ses articles

Travailler, à la conquête de l’égalité

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°17 Tra­vailler, parue en févri­er 2025. Con­sul­tez le som­maire.


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