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Liban : des sages-femmes sur le qui-vive

Avec un taux de mor­tal­ité mater­nelle qui a bon­di ces dernières années, les Libanais­es sont par­mi les plus vul­nérables des vic­times de la crise économique et de l’offensive israéli­enne lancée en sep­tem­bre 2024. Pour venir en aide à ces mères et futures mères, l’Ordre des sages-femmes du Liban a mis en place un réseau d’aide d’urgence. Mal­gré la guerre, des cen­taines de soignantes tra­vail­lent quo­ti­di­en­nement. L’une d’entre elles, Darine Ayoub, a accep­té d’être suiv­ie par La Défer­lante.
Publié le 24/01/2025

Modifié le 29/01/2025

Darine Ayoub, sage-femme, rend visite à une femme enceinte dans une école transformée en centre pour personnes déplacées. La patiente y est accueillie depuis septembre 2024. Beyrouth, le 11 novembre 2024. Crédit : Ségolène Ragu pour La Déferlante
Darine Ayoub, sage-femme, rend vis­ite à une femme enceinte dans une école trans­for­mée en cen­tre pour per­son­nes déplacées. La patiente y est accueil­lie depuis sep­tem­bre 2024. Bey­routh, novem­bre 2024. Crédit : Ségolène Ragu pour La Défer­lante .

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°17 Tra­vailler, parue en févri­er 2025. Con­sul­tez le som­maire.

Le soleil tire douce­ment sa révérence sur la cap­i­tale libanaise. Il est un peu plus de 16 heures. Après plus d’une heure de trans­port, Darine Ayoub arrive enfin à sa des­ti­na­tion : une école d’un quarti­er pop­u­laire de Bey­routh, coincée entre le cen­tre-ville et la ban­lieue sud, à quelques pas d’un camp de réfugié·es palestinien·nes.

La sage-femme vient de tra­vers­er la moitié de la ville en taxi col­lec­tif pour assur­er sa mis­sion : aider les femmes enceintes déplacées. Le por­tail de l’école donne sur la cour d’un étab­lisse­ment pub­lic, fer­mé en rai­son de la guerre et recon­ver­ti en cen­tre d’accueil pour per­son­nes déplacées – plus de 1,5 mil­lion de per­son­nes ont fui les bom­barde­ments israéliens. Une infime par­tie a trou­vé refuge ici (lire l’encadré ci-dessous).

Après une journée de con­sul­ta­tions dans des struc­tures privées et publiques dans le cen­tre-ville de la cap­i­tale, la sage-femme com­mence sa deux­ième journée de tra­vail. Dans la cour, des enfants jouent, des adultes sont assis·es sur des chais­es et dis­cu­tent, fument le nar­guilé.

Darine apprend que le père d’une de ses patientes, resté dans le sud du pays, a été tué quelques jours aupar­a­vant par une frappe israéli­enne. Elle ne pour­ra pas la voir en rai­son du deuil. Mais Roukaya, enceinte de 4 mois, l’attend au troisième étage.

Une guerre qui ne dit pas son nom

Le 8 octo­bre 2023, au lende­main du mas­sacre de plus de 1 200 Israélien·nes com­mis par le Hamas près de la bande de Gaza, le Hezbol­lah, par­ti poli­tique et groupe para­mil­i­taire islamiste chi­ite, ouvrait un front depuis le sud du Liban. Durant presque un an, les com­bats sont restés can­ton­nés à cette zone, à la ban­lieue sud de Bey­routh et à l’est du pays ; le bilan des échanges de tirs et les frappes aéri­ennes est de plus de 500 mort·es, quelques mil­liers de blessé·es et près de 100 000 déplacé·es.

Les 17 et 18 sep­tem­bre 2024, Israël lance une vague d’attaques sur des appareils de com­mu­ni­ca­tion cen­sés appartenir à des mem­bres du Hezbol­lah. Elles font 37 mort·es et plus de 2 900 blessé·es. Six jours plus tard, les avions israéliens pilon­nent le Liban sud et tuent, en une seule journée, 600 per­son­nes, bilan le plus meur­tri­er depuis la guerre civile libanaise (1975–1990) selon le quo­ti­di­en L’Orient-Le Jour.
Ces attaques font rapi­de­ment place à une guerre totale, que beau­coup de médias occi­den­taux tar­dent à qual­i­fi­er comme telle. Les com­bats et les bom­barde­ments touchent l’ensemble des villes et des régions du pays, jusqu’au 27 novem­bre 2024, où un accord de cessez-le-feu de 60 jours est con­clu entre Israël et le Liban. Il a déjà été plusieurs fois vio­lé, prin­ci­pale­ment par Israël.

D’après le gou­verne­ment libanais, en trois mois, cette guerre a causé la mort de plus de 4 000 per­son­nes. On compte 16 630 blessé·es, et au moins 1,2 mil­lion de per­son­nes ont été déplacées.

Au bout d’un long couloir se trou­ve la salle de classe où cette mère de famille a trou­vé refuge après avoir fui les bom­barde­ments sur le sud du Liban en sep­tem­bre 2024. Les familles qui parta­gent la pièce ont délim­ité plusieurs espaces : d’un côté un sem­blant de cui­sine et de l’autre une cham­bre à couch­er. Ici, les hommes et les femmes vivent à des étages dif­férents.


Le fils de Roukaya, 1 an, dort sur un des mate­las posés sur le sol. Les autres femmes de la cham­brée écoutent les échanges entre la sage-femme et sa patiente. Pour Roukaya, l’aide de Darine Ayoub a été pré­cieuse con­cer­nant l’allaitement. « Vous m’avez indiqué com­ment con­tin­uer, même si j’étais enceinte, et com­ment mieux me nour­rir pour trou­ver du fer et des vit­a­mines », remer­cie-t-elle en s’adressant à Darine. Au-dehors, les derniers rayons du soleil s’effacent der­rière des nuages d’orage.

Darine Ayoub dans un taxi collectif, 
en route vers le sud de Beyrouth, 
le 11 novembre 2024. Elle communique avec les sages-femmes de son réseau grâce à des groupes sur WhatsApp.
Darine Ayoub dans un taxi col­lec­tif, en route vers le sud de Bey­routh, le 11 novem­bre 2024. Elle com­mu­nique avec les sages-femmes de son réseau grâce à des groupes sur What­sApp. Crédit : Ségolène Ragu.


Darine Ayoub fait par­tie d’un réseau de 300 sages-femmes volon­taires. Elles inter­vi­en­nent dans des dis­pen­saires, des refuges, ou auprès des femmes enceintes déplacées. Dans le con­texte de guerre de cette fin d’automne 2024, elle est la seule à avoir accep­té d’être suiv­ie lors de ses con­sul­ta­tions. Les bom­barde­ments inces­sants, le manque de sécu­rité et les ten­sions ont, en out­re, restreint les accès au ter­rain pour les jour­nal­istes.

L’initiative a été mise en place en 2022 par l’Ordre des sages-femmes pour apporter des soins d’urgence à celles qui n’y avaient plus accès en rai­son de dif­fi­cultés finan­cières. Depuis 2019, le Liban vit l’une des pires crises économiques de son his­toire. La livre libanaise a été déval­uée de près de 90 % et a plongé des mil­liers de per­son­nes dans la pau­vreté. À cela s’est ajoutée la pandémie de coro­n­avirus en 2020.

Entre 2019 et 2021, le taux de mor­tal­ité mater­nelle a triplé, pas­sant de 13,7 à 37 décès pour 100 000 nais­sances. D’après le min­istère de la San­té libanais, il est retombé en 2024 à 25,4 décès (chiffres four­nis par l’Unicef). Pour com­para­i­son, en France, ce taux était de 11,8 décès pour 100 000 nais­sances entre 2016 et 2018 (1).

Au Liban, les femmes enceintes sont pour la plu­part suiv­ies par des médecins gyné­co­logues, ce qui s’avère sou­vent coû­teux. Elles sont peu nom­breuses à savoir que les sages-femmes peu­vent les recevoir en con­sul­ta­tion. « Pour­tant, les sages-femmes appor­tent un sou­tien pri­mor­dial, qui va bien au-delà des soins médi­caux, s’enthousiasme Zeina Dagher, mem­bre du con­seil de l’Ordre et coor­di­na­trice du réseau. « C’est aus­si un sou­tien psy­chologique, des con­seils sur la nutri­tion, l’hygiène… Nous prenons en compte toute la famille, pas seule­ment la femme enceinte. »

Un réseau de sages-femmes renforcé

Il est un peu moins de 17 heures quand la con­sul­ta­tion avec Roukaya se ter­mine. Darine Ayoub se dirige vers une autre école-refuge dans les envi­rons. Bien qu’elle con­naisse le quarti­er pour y avoir suivi ses études, la quadragé­naire cherche son chemin entre les petites ruelles enchevêtrées et humides. La nuit et la pluie lui ont fait per­dre quelques repères.

Entre deux coups d’œil sur son télé­phone, elle racon­te ce qu’elle aime dans son méti­er. « C’est un tra­vail diver­si­fié. Je peux ouvrir ma clin­ique si je le souhaite, je peux faire des accouche­ments… Et puis, j’aime beau­coup les femmes… Je ne suis pas con­tre les hommes, mais je suis du côté des femmes, lâche celle qui exerce depuis plus de vingt ans. Ma fille est en train de ter­min­er ses études pour devenir sage-femme. Je l’encourage ! C’est un beau méti­er ! »

Un beau méti­er, mais qui reste pré­caire. Darine Ayoub enchaîne les journées de plus de dix heures et jon­gle entre con­sul­ta­tions dans les secteurs privé et pub­lic et ini­tia­tives volon­taires comme ici auprès des déplacées, pour un salaire d’à peine 500 dol­lars (473 euros) par mois. Avant la crise économique, les sages-femmes pou­vaient gag­n­er près du dou­ble. Mais pour cer­taines, le salaire a depuis été divisé par dix. « Au moins, je ne suis pas au chô­mage », lâche-t-elle.

Depuis le début de la guerre, le réseau des sages-femmes a été ren­for­cé. L’Unicef affirme que, depuis octo­bre 2024, plus de 2 500 femmes déplacées ont eu accès à des soins dans le cadre du pro­gramme. « En cette péri­ode de guerre, les soignantes pren­nent des risques pour se ren­dre sur le ter­rain, reprend la coor­di­na­trice du réseau, Zeina Dagher, qui racon­te ne pas avoir dor­mi pen­dant plusieurs nuits en rai­son des bom­barde­ments près de chez elle. Mais aucune n’a refusé d’y aller. »

Zeina Dagher, sage-femme et coordinatrice du réseau de l’Ordre des sages-femmes du Liban, montre le matériel mis à disposition pour former les sages-femmes aux accouchements par voie basse et par césarienne. Dans les locaux de l’organisation, à Beyrouth, le 4 décembre 2024.
Zeina Dagher, sage-femme et coor­di­na­trice du réseau de l’Ordre des sages-femmes du Liban, mon­tre le matériel mis à dis­po­si­tion pour for­mer les sages-femmes aux accouche­ments par voie basse et par césari­enne. Dans les locaux de l’organisation, à Bey­routh, le 4 décem­bre 2024. Crédit : Ségolène Ragu.


Selon elle, même celles qui ont per­du leurs proches n’ont jamais arrêté de tra­vailler. Sous pres­sion et sou­vent sans savoir où Israël allait frap­per, elles n’ont jamais cessé de pren­dre la route pour se ren­dre auprès de leurs patientes.

Darine Ayoub a elle aus­si été déplacée. Elle est orig­i­naire de Dahiyé, dans la ban­lieue sud de Bey­routh, un quarti­er sou­vent cité comme étant un fief du Hezbol­lah, où les class­es pop­u­laires trou­vent encore à se loger à des loy­ers abor­d­ables. Pour fuir les bom­barde­ments, la sage-femme a vécu près de deux mois dans un minus­cule apparte­ment avec trois autres familles. Des con­di­tions de vie pré­caires et dif­fi­ciles qui ont miné son moral.

« Sans ce tra­vail, j’aurais fait une dépres­sion. C’est comme ça que je m’adapte à la sit­u­a­tion, explique-t-elle. Quand j’ai envie de pleur­er, je quitte la con­sul­ta­tion pour ne pas pleur­er devant elles. » Depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, le 27 novem­bre 2024, Darine est retournée vivre chez elle. « Au moins ma mai­son est encore debout ! » se réjouit-elle alors que la ban­lieue sud de la cap­i­tale a été mas­sive­ment bom­bardée.

Pour soutenir morale­ment, mais aus­si finan­cière­ment les soignantes déplacées, l’Ordre des sages-femmes leur con­fie pri­or­i­taire­ment ses mis­sions de soin. Cela lui per­met de rester au plus près des besoins des femmes touchées par le con­flit. « L’objectif de notre réseau est d’avoir des sages-femmes qui vivent au sein de dif­férentes com­mu­nautés pour con­naître les femmes enceintes et pou­voir les aider », souligne la doc­teure Rima Cheaito, prési­dente de l’Ordre des sages-femmes, lors d’un entre­tien télé­phonique. Depuis que son quarti­er a été frap­pé à de nom­breuses repris­es par les bombes israéli­ennes, elle-même s’est exilée dans une zone mon­tag­neuse du pays.

Dans les bureaux de l’Ordre des sages-femmes du Liban, une carte du pays. Beyrouth, le 4 décembre 2024.
Dans les bureaux de l’Ordre des sages-femmes du Liban, une carte du pays. Bey­routh, le 4 décem­bre 2024. Crédit : Ségolène Ragu.

À l’écoute des patientes

La voilà devant un bâti­ment d’une dizaine d’étages. Darine Ayoub grimpe jusqu’au six­ième, où vivent entassées une soix­an­taine de per­son­nes. Malak, 23 ans, et Rouqaya, 32 ans, sont instal­lées dans une petite salle au bout du couloir. Les deux femmes, orig­i­naires de Yater, dans le sud du Liban, ont échap­pé aux bom­barde­ments. Elles atten­dent toutes les deux leur deux­ième enfant.

Rouqaya con­fie ses craintes, dont celle d’avoir une césari­enne. « J’ai peur, car il va fal­loir pren­dre soin de moi et du bébé alors que rien n’est pro­pre ici. Les toi­lettes sont petites et on attrape des infec­tions à répéti­tion. » Elle inter­roge Darine : « Si on est avec un homme qui nous énerve, nous fait pleur­er, nous rend triste… est-ce que cela affecte le bébé ? » La sage-femme l’encourage : « Ne le lais­sez pas faire ça ! » La fille de Malak lui demande de l’attention avant de s’installer auprès d’elle et de jouer. Darine rebon­dit : « Vous voyez ce rire quand vous faites jouer cet enfant ? Prof­itez de ce moment. »

Darine Ayoub ne peut s’attarder, car d’autres femmes réfugiées l’attendent à plusieurs kilo­mètres de là. Nous lui pro­posons de l’y con­duire. La voiture se fau­file dans une cir­cu­la­tion tou­jours très dense et dépasse le rond-point de Cola, à l’entrée sud de Bey­routh. Là se dresse un immeu­ble éven­tré, bom­bardé par l’armée israéli­enne fin sep­tem­bre.

Sous le préau d’une autre école trans­for­mée en cen­tre d’hébergement attend Rayane, 16 ans, dont le pre­mier enfant doit naître d’un jour à l’autre. L’adolescente a fui les frappes israéli­ennes. « C’est comme si elle était orphe­line, car elle n’a per­son­ne pour l’accompagner pen­dant cette grossesse », décrit la sage-femme, assise face à sa patiente.

Darine Ayoub rend visite 
à Rayane, 16 ans, enceinte, dans l’école transformée 
en centre pour personnes déplacées. Beyrouth, 
le 4 décembre 2024.
Darine Ayoub rend vis­ite à Rayane, 16 ans, enceinte, dans l’école trans­for­mée en cen­tre pour per­son­nes déplacées. Bey­routh, le 4 décem­bre 2024. Crédit : Ségolène Ragu.


Darine prend les mains de la jeune femme et les joint aux siennes sur le ven­tre arron­di. « Il t’entend, et quand tu mets ta main ici, il sait que c’est la tienne. » Des per­les de sueur se for­ment sur le front de l’adolescente. Elle sem­ble érein­tée et s’inquiète pour l’accouchement. « J’ai peur de la fac­ture… », lâche l’adolescente qui n’a aucune ressource, et dont le père ne gagne que quelques dol­lars par mois. La sage-femme lui assure que ses frais seront pris en charge. Le min­istère de la San­té libanais a annon­cé la mise en place d’une cou­ver­ture entière et gra­tu­ite des soins pour les accouche­ments et les nou­veau-nés des per­son­nes déplacées. « Avec la sit­u­a­tion, je ne sais pas com­ment je vais faire pour le nour­rir et pour l’élever », con­tin­ue Rayane. Darine Ayoub lui promet de l’aider. Avant de la quit­ter, la pro­fes­sion­nelle dépose un imposant car­ton où se trou­vent de la nour­ri­t­ure, des pro­duits hygiéniques et du lait en poudre.

De multiples responsabilités

« Les femmes enceintes déplacées ne reçoivent pas les soins dont elles ont besoin », explique la doc­teure Ghi­na Ghazeeri, pro­fesseure d’obstétrique et de gyné­colo­gie à l’Université améri­caine de Bey­routh (AUB), qui avait déjà dressé ce con­stat lors de la guerre de 33 jours entre le Hezbol­lah et Israël à l’été 2006.

Le cen­tre médi­cal de l’université accueille désor­mais les femmes enceintes pour des con­sul­ta­tions gra­tu­ites une fois par semaine. « Quand les patientes arrivent, je leur donne un ques­tion­naire pour éval­uer l’état de leur san­té men­tale. Au moins 85 % des répon­dantes dis­ent être en dépres­sion », observe-t-elle.


« Nous souf­frons beau­coup du manque de recon­nais­sance sociale. Mais quand nous nous déployons sur le ter­rain,
nous retrou­vons notre rôle. »

Rima Cheaito, prési­dente de l’Ordre des sages-femmes


Lors de ses con­sul­ta­tions, Darine Ayoub endosse de nom­breux rôles : amie, con­fi­dente, voire mère de sub­sti­tu­tion. La sage-femme écoute et ori­ente les patientes vers les struc­tures de san­té pour leur suivi, leur indique vers qui se tourn­er et assure par­fois la liai­son avec les hôpi­taux pour les accouche­ments.

« Nous, sages-femmes, souf­frons beau­coup du manque de recon­nais­sance sociale. Mais quand nous nous déployons sur le ter­rain, nous retrou­vons notre rôle », assure Rima Cheaito, qui souhaite que le développe­ment de ces réseaux replace les sages-femmes au cœur du par­cours de soins. Aller au plus près des femmes leur per­met aus­si de les sen­si­bilis­er à leurs droits, espère la prési­dente. « Nous ne voulons pas qu’elles soient con­sid­érées comme des objets, insiste-t-elle. Le taux de césari­ennes au Liban est cat­a­strophique (2). »
Après avoir une nou­velle fois récon­forté Rayane, Darine Ayoub lui glisse un bil­let de 20 dol­lars. Elle promet de revenir la voir après l’accouchement. Il est un peu plus de 19 heures. Dehors, la pluie a cessé. La quadragé­naire reprend un taxi col­lec­tif pour ren­tr­er chez elle, où l’attend un mari par­fois agacé par les inter­minables journées de tra­vail de son épouse, con­fie-t-elle à demi-mot. Quand elle n’est pas auprès des déplacées, c’est auprès de sa famille qu’elle dis­tille ses con­seils. Au chevet des autres, tou­jours. •

Ce reportage a été effec­tué à Bey­routh entre le 11 novem­bre et le 4 décem­bre 2024. Il a été édité par Diane Sul­tani Milel­li.


(1) Selon une enquête pub­liée en 2024 par San­té publique France et l’Institut nation­al de la san­té et de la recherche médi­cale (Inserm).

(2) Alexan­dre Dumont et Christophe Z. Guil­mo­to, « Trop et pas assez à la fois : le dou­ble fardeau de la césari­enne », in Pop­u­la­tions et société, no 581, Insti­tut nation­al des études démo­graphiques, sep­tem­bre 2020.

Amélie David

Journaliste indépendante actuellement installée au Liban, elle travaille notamment sur les sujets environnementaux et les droits humains. Elle signe le reportage sur les sages-femmes au Liban. Voir tous ses articles

Travailler, à la conquête de l’égalité

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°17 Tra­vailler, parue en févri­er 2025. Con­sul­tez le som­maire.


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