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Les mots de l’extrême droite

Ce glos­saire réca­pit­ule plusieurs notions et con­cepts, notam­ment uni­ver­si­taires, qui per­me­t­tent de décrire les phénomènes d’extrême droite. Il com­porte égale­ment quelques expres­sions de l’arsenal lex­i­cal déployé ou détourné par ses représentant·es pour dis­qual­i­fi­er le camp pro­gres­siste.
Publié le 29/07/2024

Modifié le 16/01/2025

Dico facho édition 2024

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°15 Résis­ter, parue en août 2024. Con­sul­tez le som­maire.

« Cancel culture »

L’expression, qui peut se traduire par « cul­ture de l’annulation » ou « cul­ture de l’effacement » vient, à l’origine, de la droite états-uni­enne. Éti­quette fourre-tout (comme la « théorie du genre » ou le « wok­isme »), elle vise à dis­créditer tout un réper­toire d’actions que les minorités – femmes, per­son­nes racisées, LGBT+, hand­ies… – met­tent en place pour con­tr­er, dans l’espace pub­lic, la min­imi­sa­tion des oppres­sions qu’elles subis­sent.

Il peut s’agir de déboulon­nage de stat­ues de fig­ures liées à l’esclavagisme ou à la coloni­sa­tion, du boy­cott ou de la dénon­ci­a­tion d’œuvres, d’institutions ou de per­son­nal­ités jugées racistes, trans­pho­bes, grosso­phobes, validistes, sex­istes, etc. Depuis #MeToo, l’expression « can­cel cul­ture » est util­isée à tout bout de champ pour dénon­cer une pré­ten­due tyran­nie du « poli­tique­ment cor­rect » et une pré­sumée ostraci­sa­tion d’individus – prin­ci­pale­ment mas­culins, blancs, hétéro­sex­uels et cis­gen­res – érigés en vic­times.

« Grand remplacement »

Pop­u­lar­isée par l’écrivain d’extrême droite Renaud Camus dans les années 2010, puis large­ment relayée par Éric Zem­mour et d’autres fig­ures réac­tion­naires, cette théorie con­spir­a­tionniste pré­tend qu’un rem­place­ment des Européens dits « de souche » par des pop­u­la­tions immi­grées non européennes (prin­ci­pale­ment du Maghreb et d’Afrique sub­sa­hari­enne) men­ac­erait les sup­posées valeurs tra­di­tion­nelles de l’Occident. Obses­sion des iden­ti­taires, de l’extrême droite, voire de la droite, cette panique morale – sans fonde­ment sta­tis­tique – vise désor­mais d’autres com­mu­nautés, comme les per­son­nes trans ou homo­sex­uelles dont le nom­bre exploserait et représen­terait une men­ace civil­i­sa­tion­nelle.

Fémonationalisme

La notion de fémona­tion­al­isme – définie par la chercheuse fémin­iste et marx­iste Sara R. Far­ris en 2012 – désigne l’instrumentalisation par l’extrême droite des reven­di­ca­tions fémin­istes à des fins racistes, xéno­phobes et islam­o­phobes. La droite rad­i­cale se revendique ain­si du fémin­isme pour cibler dans ses dis­cours les hommes racisés, prin­ci­pale­ment musul­mans, présen­tés comme dan­gereux pour les femmes occi­den­tales.

Homonationalisme

Con­cep­tu­al­isé par l’universitaire états-uni­enne queer Jas­bir K. Puar en 2007, l’homonationalisme s’applique cette fois à l’instrumentalisation par l’extrême droite des reven­di­ca­tions LGBT+ à des fins racistes, xéno­phobes et islam­o­phobes. La méth­ode : présen­ter les pays occi­den­taux comme pro­gres­sistes, égal­i­taires et LGBT friend­ly, en oppo­si­tion à ceux du Sud glob­al, notam­ment d’Afrique et du Moyen-Ori­ent. La dénon­ci­a­tion de l’homophobie ou de la trans­pho­bie, sup­posées être l’apanage des étranger·es, per­met d’alimenter une rhé­torique anti-immi­gra­tion.

Masculinisme

Réac­tion­naire, misog­y­ne et antifémin­iste, ce mou­ve­ment vise à défendre les « droits des hommes ». Né en Amérique du Nord avant d’émerger en Europe, il déplore une « crise de la mas­culin­ité » provo­quée par la pro­gres­sion des droits des femmes. Incel (invol­un­tary celi­bate, ou « absti­nent sex­uel involon­taire » en français), MGTOW (Men going their own way, « hommes suiv­ant leur pro­pre voie » et revendi­quant leur haine des femmes), mil­i­tants pour les « droits des pères »… Cette galax­ie hétéro­clite se répand avec vio­lence sur les réseaux soci­aux – et ailleurs. Déjà, en décem­bre 1989, un homme tuait 14 femmes à l’université Poly­tech­nique de Mon­tréal, après avoir déclaré qu’il haïs­sait le fémin­isme.

Panique morale

Décrite dès 1972 par le soci­o­logue sud-africain Stan­ley Cohen dans son essai Folks Dev­ils and Moral Pan­ics (non traduit), la panique morale désigne des épisodes d’inquiétude col­lec­tive, sans réelle base factuelle, durant lesquels « un inci­dent, une per­son­ne ou un groupe de per­son­nes sont brusque­ment défi­nis comme une men­ace pour la société, ses valeurs et ses intérêts ». Le mécan­isme est sim­ple, selon Cohen : des « entre­pre­neurs de morale » – c’est-à-dire des per­son­nes ou des col­lec­tifs qui veu­lent mod­i­fi­er les normes du groupe social en se ser­vant des médias comme caisse de réso­nance – pointent du doigt des com­porte­ments ou des indi­vidus qu’ils éti­quet­tent comme déviants et dan­gereux. Loin d’encourager la réflex­ion, la panique morale déclenche peur, colère, répul­sion. L’extrême droite y a par exem­ple régulière­ment recours pour atta­quer les per­son­nes trans ou musul­manes.

Radical right gender gap

Cette expres­sion, qui n’a pas d’équivalent en français, a été employée pour la pre­mière fois par la poli­to­logue afro-états-uni­enne Ter­ri E. Givens en 2004. Elle désigne le dif­féren­tiel de vote pour les par­tis de la droite rad­i­cale en fonc­tion du genre, et plus pré­cisé­ment le phénomène selon lequel les femmes sont tra­di­tion­nelle­ment moins enclines que les hommes à vot­er pour l’extrême droite. Cet écart, observé dans de nom­breuses études, tend néan­moins à se réduire, notam­ment en France, où la dif­férence entre le vote mas­culin et féminin pour le Rassem­ble­ment nation­al est qua­si nulle depuis l’arrivée de Marine Le Pen à la tête du par­ti en 2011.

TERF

L’acronyme pour « trans-exclu­sion­ary rad­i­cal fem­i­nists » désigne des per­son­nes se revendi­quant fémin­istes tout en exclu­ant les femmes trans de leurs luttes, au pré­texte que celles-ci ne présen­tent pas les mêmes car­ac­tères sex­ués que les femmes cis­gen­res. Pour détourn­er les accu­sa­tions de trans­pho­bie et d’essentialisme qui leur sont faites, cer­taines per­son­nes terfs préfèrent se qual­i­fi­er de « gen­der crit­i­cal » (cri­tique du genre). En France, cer­taines d’entre elles revendiquent l’appellation « femel­listes ».

« Théorie du genre »

« Théorie du gen­der », « théorie du genre sex­uel » ou « idéolo­gie du genre » : les appel­la­tions abon­dent pour désign­er cette pré­ten­due « théorie », qui ne cor­re­spond pour­tant à aucun con­cept sci­en­tifique. L’expression, adoubée par le Vat­i­can, est util­isée par les ten­ants du camp réac­tion­naire pour dén­i­gr­er les études de genre (« gen­der stud­ies »), domaine de recherche pluridis­ci­plinaire ayant établi une dis­tinc­tion entre sexe biologique et genre, et donc mis en évi­dence la con­struc­tion sociale, his­torique et cul­turelle de ce dernier. Dénon­cée par La Manif pour tous, la sup­posée « théorie du genre » sert de pré­texte pour s’en pren­dre tour à tour à l’éducation sex­uelle à l’école, la tran­si­d­en­tité, et plus générale­ment à toute remise en ques­tion de la dif­férence entre les sex­es et du mod­èle tra­di­tion­nel de la famille hétéronor­mée.

« Wokisme »

Nou­velle marotte des réac­tion­naires de tous bor­ds, l’« idéolo­gie woke » est, en quelque sorte, l’héritière du « poli­tique­ment cor­rect ». Passé sim­ple du verbe « to wake » (se réveiller), le mot « woke » désigne, durant la ségré­ga­tion, le fait d’être conscient·e des dis­crim­i­na­tions visant les Noir·es aux États-Unis. En 1965, Mar­tin Luther King exhorte ain­si des étudiant·es de l’université Ober­lin, dans l’Ohio, à « rester éveil­lés » (« stay woke »). En 2008, la chanteuse états-uni­enne Erykah Badu pop­u­larise l’expression dans Mas­ter Teacher. Repris en slo­gan lors du mou­ve­ment Black Lives Mat­ter, en 2013, le terme qual­i­fie désor­mais les per­son­nes sen­si­bles aux injus­tices sys­témiques touchant toutes les minorités : femmes, per­son­nes hand­i­capées, racisées, trans ou LGBT+. Détourné de son sens ini­tial, le qual­i­fi­catif « woke » et ses dérivés fran­cisés « wok­isme » et « wok­iste » sont aujourd’hui prin­ci­pale­ment util­isés par la droite et l’extrême droite comme mot repous­soir pour dis­créditer toute reven­di­ca­tion pro­gres­siste et occul­ter la réal­ité des dis­crim­i­na­tions.

Rozenn Le Carboulec

Journaliste indépendante, elle est passée par L’Obs et la rédaction en chef de Têtu. Créatrice du podcast Quouïr pour Nouvelles écoutes, elle travaille aujourd’hui principalement avec Mediapart. Elle est l’autrice de Les Humilié·es. Dix ans après le mariage pour tous : l’heure du bilan (Équateurs, mai 2023). Voir tous ses articles

Résister en féministes : la lutte continue

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°15 Résis­ter, parue en août 2024. Con­sul­tez le som­maire.


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