Warning: Attempt to read property "ID" on int in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-content/themes/Divi/includes/builder/post/PostStack.php on line 62

Sur le terrain, résistances féministes et queers s’organisent avant le second tour

Depuis l’annonce de la dis­so­lu­tion de l’Assemblée nationale le 9 juin 2024, les militant·es fémin­istes et LGBT+ sont à l’avant-garde des mobil­i­sa­tions con­tre l’extrême droite. À Tour­co­ing, Rennes, Calais ou Paris, de nom­breuses ini­tia­tives organ­isent trac­tages, porte-à-porte et rassem­ble­ments.
Publié le 05/07/2024

Modifié le 16/01/2025

Lors du « grand rassemblement » organisé mercredi 3 juillet 2024 par des militantes féministes en Ile-et-Vilaine. En haut à gauche, Juliette Rousseau et en bas, au centre de la banderole, Régine Komokoli. Crédit : Margot Dejeux.
Lors du « grand rassem­ble­ment » organ­isé mer­cre­di 3 juil­let 2024 par des mil­i­tantes fémin­istes en Ile-et-Vilaine. En haut à gauche, Juli­ette Rousseau et en bas, au cen­tre de la ban­de­role, Régine Komokoli. Crédit : Mar­got Dejeux.

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°14 Dessin­er, à paraître le 30 août 2024. Pour soutenir notre tra­vail, ren­dez-vous ici.

« Tours et bourgs, même com­bat ! », scan­dent ce mer­cre­di 3 juil­let une cinquan­taine de mères du col­lec­tif Kune : accom­pa­g­nées de leurs enfants, elles défi­lent depuis Ville­jean, l’un des quartiers pop­u­laires de Rennes (Ille-et-Vilaine) jusqu’à la com­mune de Châteaubri­ant à une cinquan­taine de kilo­mètres de là.

Der­rière ce « grand déplace­ment », Juli­ette Rousseau et Régine Komokoli, deux mil­i­tantes fémin­istes, s’organisent depuis la dis­so­lu­tion de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron le 9 juin dernier. La pre­mière, mil­i­tante de gauche depuis une ving­taine d’années, habite dans un hameau, en zone rurale. La sec­onde vit dans un quarti­er pri­or­i­taire de Rennes où elle a créé, en 2019, un col­lec­tif de femmes con­tre les vio­lences con­ju­gales. « Face à la panique, la tristesse et l’angoisse du pro­jet fas­ciste, nous avons organ­isé cette marche, explique Régine Komokoli. Toutes les femmes du quarti­er avaient déjà été vic­times d’agressions racistes, alors nous avions peur de nous ren­dre vis­i­bles, mais, foutu pour foutu, nous devions le faire pour nos enfants. » Quant à Juli­ette Rousseau, elle avait « envie de lancer un mes­sage con­cret con­tre la fatal­ité », pour sor­tir du « mil­i­tan­tisme de gauche très urbain et très tourné vers les réseaux soci­aux ».

C’est cette même néces­sité d’action qui a fait renouer Car­o­line De Haas avec le mil­i­tan­tisme de gauche, après les deux ans d’abstinence qui ont suivi l’échec de la Nou­velle union écologique et sociale (Nupes) aux élec­tions lég­isla­tives de 2022. Fin mai, la fon­da­trice de #NousToutes se retrou­vait chez la députée Marie-Char­lotte Garin (EELV) avec un groupe de militant·es pour dis­cuter propo­si­tion de loi sur le con­sen­te­ment et grève fémin­iste. La dis­cus­sion s’est pour­suiv­ie les jours suiv­ants sur un groupe What­sApp. Au lende­main de l’annonce prési­den­tielle, le groupe change d’objectif : la vic­toire con­tre l’extrême droite devient la pri­or­ité. Pour l’historienne du fémin­isme Bib­ia Pavard : « Oui, il y a eu pri­or­i­sa­tion des luttes ; mais même si la résis­tance face à l’extrême droite prime sur tout le reste, les fémin­istes ont su se faire enten­dre dans cette cam­pagne, en s’opposant notam­ment à la can­di­da­ture d’hommes con­damnés pour des vio­lences sex­uelles, ou encore en essayant d’imposer une femme [Marine Ton­de­lier] dans le débat de l’entre-deux-tours. »

En réac­tion, Car­o­line de Haas crée avec Marylie Breuil, une autre anci­enne du col­lec­tif #NousToutes, un canal Telegram très vite rejoint par près de 30 000 per­son­nes. « On pro­pose des actions con­crètes : dis­tri­b­u­tion de tracts, inter­pel­la­tions des candidat·es arrivé·es troisièmes au pre­mier tour, porte-à-porte dans les cir­con­scrip­tions piv­ots… », détaille la mil­i­tante, qui a aus­si créé le site Cette fois on gagne avec l’activiste écol­o­giste et fémin­iste Camille Éti­enne. Dans cha­cune de ces actions, les femmes sont les pre­mières à s’impliquer : « À la dernière dis­tri­b­u­tion de tracts à Mont­par­nasse, sur les douze per­son­nes présentes, dix étaient des femmes. »

Cibler « les pédés de droite »

La présence des fémin­istes dans les mobil­i­sa­tions con­tre l’extrême droite n’est pas une nou­veauté. « Au début des années 1930, alors qu’elles n’avaient pas encore le droit de vote, les femmes étaient très engagées dans la lutte con­tre le fas­cisme, rap­pelle l’historienne Bib­ia Pavard. Ensuite, elles ont soutenu, autant que les hommes, le Front pop­u­laire puis les républicain·es lors de la guerre d’Espagne en 1936. »

En 2024, le front fémin­iste et LGBT+ se reforme. Léonce*, du col­lec­tif Les Inverti.e.s (réu­nis­sant « TrÅñ$ p€d€ G0UiñEs Cocommunist·e·s »), racon­te : « Tous les soirs, nous trac­tons dans le Marais [quarti­er his­torique­ment gay de Paris] pour cibler les pédés de droite. » Con­sciente de la bulle sociale dans laque­lle elle se trou­ve, Apolline Bazin, cofon­da­trice du média cul­turel Man­i­festo XXI, développe : « L’urgence, c’est, dans un temps record, de ne pas prêch­er qu’à des convaincu⸱es et d’aller au front. » Lun­di et mer­cre­di soir, elle était à Meaux, en Seine-et-Marne, pour soutenir la can­di­date du Nou­veau Front pop­u­laire, Amal Ben­toun­si, face à une can­di­date du Rassem­ble­ment nation­al.


« L’urgence, c’est de ne pas prêch­er qu’à des convaincu⸱es et d’aller au front. »


Pour l’activiste et autrice Blanche Sab­bah, « l’arrivée au pou­voir de l’extrême droite serait une cat­a­stro­phe général­isée : pour les femmes, les per­son­nes minori­taires et l’écologie. » Depuis le 9 juin, l’engagement de cette mil­i­tante au sein du mou­ve­ment Action Jus­tice Cli­mat a donc pris un tour­nant : « La nou­veauté, c’est de faire cam­pagne pour un par­ti poli­tique alors que je suis loin des appareils insti­tu­tion­nels. » San­dra*, mem­bre du Col­lec­tif Fémin­iste Calais, décrit elle aus­si « une cam­pagne avec beau­coup de per­son­nes qui, comme moi, n’étaient encar­tées dans aucun par­ti poli­tique aupar­a­vant. » Ce regain mil­i­tant ne vaut pas que pour les par­tis tra­di­tion­nels : il est per­cep­ti­ble dans l’ensemble des mou­ve­ments mil­i­tants. Léonce, du col­lec­tif Les Inverti·es, abonde : « Ces trois dernières semaines, cinquante per­son­nes ont rejoint nos rangs. »

À gauche tous·tes

Sur le ter­rain et les réseaux soci­aux, les modes d’organisation repren­nent des actions tra­di­tion­nelle­ment fémin­istes. Tan­dis qu’à Paris les col­lages con­tre le Rassem­ble­ment nation­al (RN) fleuris­sent sur les murs, à Tour­co­ing (Nord), ce sont les pochoirs qui habil­lent désor­mais les trot­toirs, à l’initiative de la Brigade du respect. Ce col­lec­tif, orig­i­naire de Lille, lutte depuis 2019 con­tre le har­cèle­ment de rue, mais « face à l’urgence de la sit­u­a­tion, on se devait de s’exprimer, racon­te Salomé*, avant de pré­cis­er : Je suis dans un tel niveau de nerfs que je suis inca­pable de tracter et de me retrou­ver face à une per­son­ne raciste. Avec la Brigade, on agit la nuit, sans per­son­ne autour. Ce n’est que le lende­main matin que les per­son­nes voient nos mes­sages. » Non loin, à Calais, au lieu de coller des feuilles blanch­es recou­vertes de let­tres noires con­tre le patri­ar­cat comme elle le fait d’habitude, Céline* appose sur les murs les affich­es du can­di­dat Nou­veau Front pop­u­laire.

En trois semaines de cam­pagne, fémin­istes, antiracistes et queers ont con­vergé dans une lutte com­mune à gauche con­tre l’extrême droite. Calais a accueil­li une déam­bu­la­tion poli­tique et citoyenne en défense des per­son­nes exilées, queers et pales­tini­ennes. Pour Léonce, des Inverti·es, « le con­sen­sus se crée plus facile­ment, nous n’avons plus le temps de débat­tre ».

« À gauche tous·tes »« No pasarán » ou « Prési­dent du chaos, joue pas avec nos vies », peut-on lire depuis le 9 juin sur les trot­toirs de Tour­co­ing et Lille. Salomé, de la Brigade du respect, sou­tient : « Nos pochoirs sont faits avec de la bombe de pein­ture qui dure six mois au sol. Nous res­terons présentes après les résul­tats de dimanche. » Tous et toutes l’affirment : quelle que soit l’issue du scrutin dimanche soir, la résis­tance fémin­iste, queer, antiraciste n’en est qu’à ses débuts.

* Ces per­son­nes n’ont pas souhaité men­tion­ner leur nom de famille.

Marie-Agnès Laffougère

Journaliste indépendante, elle travaille pour Têtu, Livres Hebdo et Radio France sur des sujets liés au genre et aux questions LGBT+. Voir tous ses articles

Résister en féministes

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue La Défer­lante n°14 Dessin­er, à paraître le 30 août 2024. Pour soutenir notre tra­vail, ren­dez-vous ici.


Notice: ob_end_flush(): Failed to send buffer of zlib output compression (1) in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-includes/functions.php on line 5471

Notice: ob_end_flush(): Failed to send buffer of zlib output compression (1) in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-includes/functions.php on line 5471

Notice: ob_end_flush(): Failed to send buffer of zlib output compression (1) in /home/clients/f3facd612bb3129d1c525970fad2eeb3/sites/tpp.revueladeferlante.org/wp-content/plugins/really-simple-ssl/class-mixed-content-fixer.php on line 107