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Aux ventres des femmes, la patrie reconnaissante

Le taux de fécon­dité des Français­es fait depuis longtemps l’objet d’une atten­tion pres­sante de la part de la classe poli­tique. Pour le bien de la nation, toute bonne citoyenne est invitée à enfan­ter – enfin… toute citoyenne blanche et bien dotée sociale­ment.

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Publié le 12/11/2021

Modifié le 16/01/2025

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°4 S’aimer (décem­bre 2021.)

« Il faut se res­saisir.» C’est par cet appel impérieux que le Haut-Com­mis­sari­at au plan (HCP), fraîche­ment ressus­cité sous la direc­tion de François Bay­rou, con­clu­ait en mai dernier sa note prospec­tive sur la démo­gra­phie. Haut les cœurs, mes­dames, il faut se repro­duire !

Le lent recul du taux de fécon­dité des Français­es met­trait en dan­ger la péren­nité de notre mod­èle social, l’identité de notre pays, sa place dans le monde et même son avenir civil­i­sa­tion­nel. Rien que ça.

En effet, si le taux de fécon­dité en France reste l’un des plus élevés d’Europe avec 1,8 enfant par femme, il n’échappe pas à une ten­dance com­mune à tout le con­ti­nent : dimin­u­ant sans cesse, il s’éloigne du fameux taux de « renou­velle­ment de la pop­u­la­tion », égal à 2,05 enfants par femme. Un phénomène qui résulte de fac­teurs struc­turels et con­jonc­turels, dont il est malaisé de dis­tinguer les effets. Le développe­ment du tra­vail rémunéré des femmes, la maîtrise de la con­tra­cep­tion, les mis­es en cou­ple et grossess­es plus tar­dives se mêlent aux impacts suc­ces­sifs des crises économiques, à la dégra­da­tion des con­di­tions d’entrée sur le marché du tra­vail et du loge­ment ain­si qu’aux con­séquences dif­fi­cile­ment mesurables des poli­tiques d’égalité entre les hommes et les femmes.

Une seule solution : la reproduction

Face à cette intri­ca­tion com­plexe de fac­teurs, les pou­voirs publics inci­tent les femmes français­es à se repren­dre. Car c’est bien des femmes qu’on par­le ici, ou plutôt de celles qui peu­vent et doivent enfan­ter. L’indicateur démo­graphique qui con­cen­tre l’attention médi­a­tique et poli­tique n’est pas exprimé en nom­bre d’enfants par cou­ple, par famille, par per­son­ne – mais bien par femme, et donc, crû­ment, par ven­tre. Dans la bouche du poli­tique, il n’est plus descrip­tif mais nor­matif : il indique com­bi­en de fois chaque femme doit enfan­ter au cours de sa vie si elle souhaite accom­plir son devoir de bonne Française.

Il s’agit d’un enjeu nation­al, nous dit Bay­rou, puisque l’avenir même du mod­èle social français en dépend. La survie de notre sys­tème de retraites par répar­ti­tion reposerait tout entière sur la capac­ité des femmes à pro­duire assez de travailleur·ses pour financer les pen­sions des retraité·es. Fi des leviers vul­gaires que sont le taux de coti­sa­tion ou les mécan­ismes de redis­tri­b­u­tion. Si les Français·es souhait­ent par­tir à la retraite pas trop tard et pas trop pau­vres, une seule solu­tion : la repro­duc­tion.

Car l’alternative serait bien trop effrayante. Si les Français­es ne font pas plus d’enfants, alors il fau­dra laiss­er venir des immigré·es, c’est-à-dire, si on traduit l’avertissement du HCP, des pop­u­la­tions qui risquent de « remet­tre en cause l’équilibre social et cul­turel » (sic) du pays, des femmes qui font beau­coup d’enfants, elles, mais pas les bons. Il s’agit de s’inquiéter du « déséquili­bre dan­gereux et irrémé­di­a­ble » que représen­terait l’accroissement de l’écart numérique entre pop­u­la­tions européennes et – au hasard – africaines. Il ne suf­fit donc pas de faire des enfants pour pro­téger notre mod­èle social, encore faut-il que ceux-ci soient français pour pro­téger aus­si nos valeurs et, si pos­si­ble, blancs pour garan­tir notre influ­ence dans le monde, en faisant la preuve de notre « vital­ité » (Bay­rou n’écrit pas viril­ité).

La crainte du déclin de la population « véritablement » française

N’hésitons pas à faire la fine bouche. L’idéal serait qu’ils ne soient pas non plus des enfants de pau­vres. Le Haut-Com­mis­sari­at au plan déplore ain­si que François Hol­lande ait réduit les allo­ca­tions famil­iales des par­ents les plus aisés et abais­sé le pla­fond du quo­tient famil­ial – dis­posi­tif d’économies qui prof­ite avant tout aux rich­es –, quand pour­tant un enfant sur cinq vit aujourd’hui sous le seuil de pau­vreté (et deux sur cinq dans les familles mono­parentales). Ce sont les femmes cadres qui tirent à la baisse la fécon­dité nationale, avec leur petit 1,6 enfant par femme : c’est d’elles qu’on attend un petit peu plus d’efforts. 

La poli­tique natal­iste est un exer­ci­ce d’équilibriste : il faut encour­ager les femmes à faire des enfants, mais cer­taines plus que d’autres ; il faut pro­mou­voir la for­ma­tion et le tra­vail des femmes, mais dans une juste mesure ; il faut célébr­er le libre choix d’enfanter et de fonder une famille, tout en se ren­dant capa­ble d’atteindre col­lec­tive­ment nos objec­tifs démo­graphiques à coups d’incitations socio-économiques. 

À la source de cette ten­sion, des con­sid­éra­tions de crois­sance économique, bien sûr, mais surtout une panique morale et nationale : la crainte du déclin numérique de la pop­u­la­tion « véri­ta­ble­ment » française face à celles et ceux qui viendraient ou qui se mul­ti­pli­eraient. Une angoisse raciale tout autant que civil­i­sa­tion­nelle. Cet impératif indis­cutable du « renou­velle­ment de la pop­u­la­tion » par elle-même vient nat­u­ralis­er la cible de 2,05 enfants par femme : il ne s’agit plus seule­ment d’un but poli­tique souhaitable, mais d’une néces­sité nationale vitale. Il n’est même pas envis­agé que cet objec­tif soit périmé ou voué à le devenir alors qu’il est déjà bien remis en cause par l’ébranlement pro­fond des formes famil­iales et des manières d’être femmes. Ni qu’il soit pos­si­ble de vivre dans un monde où la pro­duc­tiv­ité du ven­tre des mères ne serait plus l’aune à laque­lle on mesure la puis­sance d’un pays – et de ses hommes.

S’aimer : pour une libération des sentiments

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