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Les hommes prendront-ils un jour part à la révolution sexuelle ?

La péri­ode post-#MeToo s’accompagne d’une remise en ques­tion de la sex­u­al­ité hétéronor­mée. Dans cette chronique, Mar­tin Page se demande com­ment impli­quer les hommes dans cette réflex­ion.
Publié le 12/11/2021

Modifié le 16/01/2025

Retrou­vez cet arti­cle dans la revue papi­er La Défer­lante n°4 S’aimer (décem­bre 2021.)

Il y a deux ans j’ai pub­lié un livre inti­t­ulé Au-delà de la péné­tra­tion. C’est un petit essai et une col­lec­tion de témoignages remet­tant en cause l’hégémonie de la péné­tra­tion dans les rap­ports hétéro­sex­uels (et plus générale­ment l’idée de norme sex­uelle).

Bien sûr j’ai reçu quelques insultes homo­phobes sur les réseaux soci­aux, et cer­taines per­son­nes se sont inquiétées : est-ce que je ne voudrais pas inter­dire la péné­tra­tion ? On m’a aus­si dit que je ne dis­ais rien de nou­veau. C’est vrai, dans ce livre, je ne révèle rien qui ne soit déjà su. Mal­heureuse­ment cette con­nais­sance disponible n’a pas atteint tous les ter­ri­toires et, en par­ti­c­uli­er, elle ne sem­ble pas avoir accédé au cerveau des hommes cis-hétéro­sex­uels.

Au début, à la mai­son d’édition (Mon­stro­graph), nous ven­dions ce livre sur le site Inter­net et très vite nous avons con­staté que l’adresse de fac­tura­tion et l’adresse d’expédition n’étaient sou­vent pas les mêmes. Des femmes achetaient le livre et le fai­saient expédi­er à des hommes : ex, amoureux, amis.

J’ai écrit cet ouvrage parce que j’ai com­pris que je ne devais pas faire con­fi­ance à ce que j’aimais si je désir­ais une rela­tion égal­i­taire. Je suis par­ti de mon his­toire et de mon expéri­ence de per­son­ne entre­tenant des rela­tions avec des femmes hétéro­sex­uelles, pour remet­tre en cause des atti­tudes et des habi­tudes qui me parais­saient jusqu’alors alors nor­males, naturelles, indis­cuta­bles.

Les hommes sont persuadés de déjà tout savoir

En matière de sex­u­al­ité, il faudrait échang­er et écouter, ce que les hommes font peu. Mais ce n’est pas suff­isant : plein de femmes n’osent pas par­ler, par peur de décevoir, de ne pas avoir assez de désir, d’en avoir trop ou de ne pas avoir des désirs con­formes. Pour­tant, le cou­ple et la ren­con­tre pour­raient être l’occasion de façon­ner un lieu d’intimité et de con­fi­ance pour que tout puisse s’exprimer, que jamais aucun juge­ment ne soit énon­cé. C’est ce que je veux dire aux hommes, mais quand je le fais, et c’est la tragédie de l’histoire, ce sont des femmes qui écoutent.

La respon­s­abil­ité et le tra­vail des hommes devraient être, pour com­mencer, de recon­naître leur dom­i­na­tion (qui déséquili­bre toute rela­tion, toute dis­cus­sion), et de tra­vailler à déjouer ses effets sur les femmes (sachant que dans le meilleur des cas ils y réus­siront mal et mal­adroite­ment).

Est-ce qu’on pour­rait graver sur tous les bâti­ments publics de France que ce sont tou­jours les per­son­nes dom­inées qui pro­duisent un savoir éman­ci­pa­teur sur le monde social ? Ce sont les per­son­nes racisées qui écrivent les grands textes con­tre le racisme, ce sont les militant·es handicapé·es qui nous dis­ent la réal­ité du validisme. Et dans le grand jeu hétéro­sex­uel amoureux et sen­suel, la caté­gorie qui pos­sède con­nais­sances et idées icon­o­clastes, ce sont les femmes.

Peut-être qu’il nous reste cette vieille ruse : la fiction 

Aus­si, peut-être qu’en matière de sex­u­al­ité, les mecs devraient-ils arrêter de don­ner leur avis, de par­ler de leurs préférences, de faire la pub­lic­ité des désirs qui leur con­vi­en­nent, ou de dire ce qui est bien ou pas bien. L’avis des dom­i­nants n’a pas à compter. Les hommes se doivent d’accepter et de soutenir une iné­gal­ité en leur défaveur dans l’accès à la parole (et au temps de parole) et dans l’importance don­née à cette parole. Les dom­i­nants sont les oblig­és des per­son­nes dom­inées, leurs mots n’ont, néces­saire­ment, pas la même valeur.

On me demande sou­vent com­ment con­tribuer à faire exis­ter une sex­u­al­ité non patri­ar­cale. Je cite alors des livres comme Jouis­sance Club (Jüne Plã, Marabout, 2020), Sor­tir du trou, lever la tête (Maïa Maza­u­rette, Anne Car­rière, 2020), Notre corps nous mêmes (Hors d’atteinte, 2020), Jouir est un sport de com­bat (Olympe de G. avec Stéphanie Estour­net, Larousse, 2021), La Volon­té de chang­er (bell hooks, Diver­gences, 2021), le pod­cast Les Couilles sur la table (Vic­toire Tuail­lon, Binge audio), des comptes Insta­gram aus­si.

Mais la dif­fi­culté reste tou­jours la même : ce sont les femmes qui lisent ces livres et s’informent. Des copines me dis­ent qu’elles les font traîn­er sur leur table de nuit, sur le canapé, qu’elles ini­tient des lec­tures au lit avec leur copain. Par­fois ça marche. J’ai eu des retours d’hommes qui ont com­plète­ment changé leur rap­port à la sex­u­al­ité et aux femmes ces dernières années. Grâce à des livres, grâce à des pod­casts. La sex­u­al­ité passe par les mots, par leur dif­fu­sion et leur général­i­sa­tion. 

Et comme la plu­part des hommes ne comptent pas lire des livres fémin­istes, ni amorcer un change­ment, peut-être qu’il nous reste cette vieille ruse : les attein­dre sans qu’ils le sachent, mod­i­fi­er leurs représen­ta­tions par la fic­tion, par des per­son­nages de films, de séries, de romans, qui échap­per­ont aux sché­mas clas­siques et oppres­sifs et chang­eront leur con­cep­tion des rap­ports hommes-femmes.

Martin Page

Martin Page est auteur de romans (dont L'apiculture selon Samuel Beckett), de livres jeunesse (dont Le permis d'être un enfant), et d’essais (Manuel d’écriture et de survie, Au-delà de la pénétration). Avec sa compagne, Coline Pierré, il est co-créateur du laboratoire d’édition Monstrograph. Voir tous ses articles

S’aimer : pour une libération des sentiments

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